« Men murder whores. Women murder their babies. What does that make me? »
« Les hommes assassinent des putes. Les femmes assassinent leurs bébés. Qu’est-ce que ça fait de moi? »
Agnes (Lora Burke) est à la recherche de quelque chose de plus grand qu’elle, d’une expérience qui transcende le banal du quotidien. C’est pourquoi elle s’adonne aux meurtres en série. Mike (Robert Notman), un détective privé un peu trop sûr de lui, a le malheur de lui déplaire. Elle voudra donc en faire sa prochaine victime, non sans explorer l’ascendant psychologique qu’elle pourrait développer sur lui. Le film dépeint le lien étrange qui se tissera entre les deux.
Dans Poor Agnes, Navin Ramaswaran crée un personnage féminin comme on en voit peu. Non seulement il met en scène une femme meurtrière, mais celle-ci n’utilise pas uniquement les armes traditionnelles féminines (séduction, empoisonnement…), elle emploie aussi la force.
Peut-on parler d’un film féministe? Peut-être. Je n’irais pas jusqu’à dire qu’il s’agit d’un manifeste féministe, mais certains éléments m’amènent à dire qu’il s’agit d’une œuvre qui, à tout le moins, propose quelque chose qui s’approche de la notion féministe. Tout d’abord, les premiers rôles féminins dans un film réalisé par un homme ne sont pas si fréquents. Ajoutons à cela que la fille en question ne se dévêt pas dans le film, et on contribue à la rareté. Et si l’on ajoute finalement que le personnage est une sociopathe qui tue simplement pour le plaisir que ça lui apporte… Vous comprenez l’idée?
Agnes Poelzl, cette femme troublée qui vit pratiquement recluse, est ce qu’on pourrait qualifier de tueur en série (tueuse en fait). D’ailleurs, Lora Burke raconte avoir regardé une grande quantité de vidéos présentant des tueurs en série afin d’être bien préparée pour ce rôle.
« I watched a lot of Youtube.com videos. I sought out interviews with well know killers like Jeffery Dahmer, Ted Bundy, Amanda Knox and so on. It was definitely harder to find footage of female psychopaths. » [J’ai regardé beaucoup de vidéos YouTube. J’ai cherché des interviews avec des tueurs bien connus comme Jeffery Dahmer, Ted Bundy, Amanda Knox et ainsi de suite. Il était définitivement plus difficile de trouver des images de psychopathes féminines.]
Poor Agnes tourne autour du syndrome de Stockholm. C’est par la relation entre Mike et Agnes qu’on voit ce thème apparaitre. Malheureusement, on ne développe pas suffisamment le « comment ». Trop rapidement Mike développe une grande peur et un grand besoin de son bourreau. C’est tout de même intéressant de voir un homme développer ce syndrome envers une femme. On voit généralement l’inverse.
La grande question ici est : à quel point Agnes a-t-elle réussi à atteindre le mental de Mike? Quand finira-t-il par se réveiller et se défendre?
Certaines scènes de Poor Agnes sont particulièrement intéressantes. Je pense entre autres à cette scène dans laquelle Agnes et Mike sont à table, avec Chris, une autre victime. Chris a manifestement été mentalement affecté par les médicaments qu’Agnes lui a donnés et ne peut pas parler correctement. Elle commence à se moquer de lui. Au début, on rit un peu comme on se moque d’un gamin différent lorsqu’on est jeune. Mais, éventuellement, un malaise se pointe. Ça devient dérangeant. Et là, bravo!
Le film de Ramaswaran, gagnant du prix du meilleur film canadien à Fantasia, nous présente une femme narcissique, cruelle et intelligente. Une tueuse au tempérament bouillant qui ne se laisse effrayer par personne. Et elle n’a qu’un seul Dieu : Agnes Poelzl.
Payez-vous un voyage avec un monstre humain et, peut-être, cela vous amènera à mieux comprendre comme les victimes de tueurs en série peuvent se laisser bluffer par le charisme de leur bourreau.
Note : 7/10
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