« There’s something seriously fucked up goin’ on here. Read the writing on the wall! »
[Il se passe quelque chose de vraiment bizarre ici. Lis ce qui est écrit sur le mur!]
Alex (Jen Houston) et Ben (Charley Tucker) trouvent l’appartement de leurs rêves dans l’East Village de New York (alias eVil – le Mal). Peu importe qu’il soit maudit si le loyer est bon marché et qu’il dispose d’une cuisine, n’est-ce pas? Mais lorsque la situation pénible de colocation avec des fantômes meurtriers devient trop difficile pour eux, ils doivent demander l’aide d’amis pour échapper au mal de leur sous-location.
Avec eVil sublet, Allan Piper propose un film classé R, effrayant, drôle, sanglant et sexy qui plaira à tous les publics majeurs. En somme, un film comme on en produit peu en Amérique.
Le cinéma d’horreur utilise souvent la comédie pour contrebalancer les moments de peur ou pour augmenter l’effet de la peur lorsqu’il se produit. Mais par moments, certains créateurs vont un peu plus loin afin de réellement mélanger horreur et comédie dans une symbiose.
Parmi les titres auxquels on peut penser, il y a Evil Dead 2 et 3, ou encore Shaun of the dead. Pour les curieux, je vous invite à regarder la série Horror’s greatest. Il y a un épisode qui est consacré au cinéma qui mélange horreur et comédie.
Dans eVil sublet, on retrouve ce beau mélange de façon assez efficace. On aurait pu espérer un peu plus de moments effrayants, ceux-ci étant principalement utilisés lorsqu’on voit des visages horrifiques apparaître à l’écran. L’effet est réussi, mais 1 ou 2 séquences vraiment effrayantes de plus auraient amené ce film à un autre niveau.
Quant au volet comédie, il fait rire de bon cœur. Par moment, on utilise la caricature. Par moments, on utilise les jeux de mots. Alors qu’à d’autres moments, c’est plutôt les situations qui amènent à rire. Il ne faudrait pas oublier de mentionner les moments plus subtils qu’offre le réalisateur. Je pense, entre autres, à cette scène dans laquelle le couple dort dans le même lit. L’homme entoure sa femme de son bras gauche, pour dormir en cuillère. Mais lorsque Ben se tourne, le bras, lui, ne bouge pas. Ça prend quelques secondes pour réaliser ce qui se passe. Ainsi, sans être réellement effrayante, cette séquence apporte une belle réaction chez le spectateur.
Avant de rentrer dans ce qui est réellement des dépassements des limites, j’aimerais me pencher sur ces petites choses qui devraient être normales dans un film, mais qu’on ne voit que très rarement. eVil Sublet tourne en dérision la crise du logement aux États-Unis, le secteur bancaire, les divisions politiques, la politique sexuelle et l’industrie pharmaceutique. Mais c’est au niveau de la représentation à l’écran qu’il se distingue. Le film célèbre des groupes historiquement sous-représentés à l’écran. Quatre des cinq rôles principaux sont des personnages LGBTQ+ joués par des acteurs LGBTQ+. Il se joint ainsi à un mouvement émergent mené par des projets comme Suitable Flesh, Yellowjackets et Everything Everywhere All At Once, pour représenter les femmes de 40 à 50 ans et plus comme des puissances héroïques et sexy.
Ensuite, il ne se gêne pas pour montrer des corps complètement nus à l’écran, tant féminin (ce qui est déjà rare) que masculin (ce qui n’existe presque pas). Le tout n’est pas une façon de sexualiser les personnages, au contraire. Cette nudité semble simplement naturelle. Un corps est un corps.
Allan Piper semble ne pas se retenir, et ça transpire dans le film, ce qui est franchement agréable. Est-ce qu’il pouvait se permettre cette liberté parce que son film était en partie sociofinancé?
eVil Sublet a été financé en partie grâce à une offre de financement participatif qui consistait à transformer les visages des donateurs en fantômes dans les ombres et les recoins de l’appartement. Plus de 200 visages fantômes sont ainsi cachés tout au long du film. Cachés, mais visibles. Clairement, les donateurs étaient en mesure de se retrouver dans le film.
Je crois aussi qu’une des choses qui rendent eVil Sublet une si bonne expérience, c’est qu’il ne se prend pas pour ce qu’il n’est pas. Sans redéfinir le genre ou tenter de montrer à quel point il peut être intelligent, ce film réussit à divertir et même à exagérer, sans tomber dans le ridicule.
Voici un bon film à voir en ce mois d’octobre.
Bande-annonce
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