Première affaire - Une

[Cinemania] Première affaire – Quand travail et vie personnelle s’emmêlent

Jeune avocate fraîchement diplômée, Nora (Noée Abita) a l’impression de n’avoir rien vécu lorsqu’elle est propulsée dans sa première affaire pénale. De sa première garde à vue au suivi de l’instruction, Nora découvre la cruauté du monde qui l’entoure, dans sa vie intime comme professionnelle. Emportée par la frénésie de sa nouvelle vie, elle multiplie les erreurs et en vient à questionner ses choix.

Si la première affaire judiciaire de Nora s’avère être un parcours initiatique, le réalisateur détonne de par sa proposition cinématographique. Loin du tumulte des tribunaux et du traitement classique d’une affaire criminelle, c’est plutôt « l’affaire Nora » que le spectateur a le droit de voir. Entre tâtonnement et hésitation, Nora s’avance dans un monde où la vérité ne devient qu’un concept. Un concept qui se tord et se défigure au profit de diverses fortunes personnelles. Oui le système judiciaire ressemble parfois à une machine bête et méchante capable de broyer les gens et les avocats, mais est-ce une vérité ou une perception?

Le visage angélique de cette petite femme fraîchement diplômée contraste avec la froideur bleutée du commissariat d’Arras (nord de la France). Nora est catapultée sans ménagement au côté de Jordan, un gamin de 17 ans accusé d’un meurtre dans la région. Loin de la chaleur des bureaux parisiens, la réalisatrice plonge sa protagoniste dans les abîmes du système pénal. Si le récit ne se penche pas sur le système en lui-même, il cherche le sens de ce dernier dans les yeux de Nora qui, face à son client et cette affaire opère, un profond examen de conscience. Dois-je défendre un potentiel criminel? Jordan dit-il la vérité? Qui dois-je croire?  Dois-je contredire mes propres principes? 

Première affaire - Naïve
Nora (Noée Abita)

L’articulation du récit ne dresse pas seulement une première affaire criminelle pour son personnage principal. C’est aussi la première affaire de sa vie où les accros commencent à s’enchaîner à mesure que son obsession pour le cas de Jordan l’envahit jusqu’à s’immiscer dans ses choix personnels. Submergé par ses émotions et son incapacité à détacher sa profession de sa personne, Victoria Musiedlak transforme son personnage en une sorte de pantin emporté par un tourbillon de mauvaises décisions que sa candeur et naïveté ne font qu’aggraver.

La caméra assiste à l’impuissance et la crédulité de Nora à travers ses yeux que la cruauté de monde commence petit à petit à noircir. Si le film ressemble à une quête initiatique, c’est bien parce que la caméra ne quitte son objet d’étude que rarement. La caméra l’étouffe quasi dans chaque plan, la présente recluse dans chaque espace et même dans son petit studio parisien. Si l’émancipation est un objectif commun à tout le monde, celle-ci ne peut se faire sans une expérience de solitude ou nos choix et nos idéaux sont malmenés. 

Avant de défendre son client, Nora doit apprendre à se défendre. Contre sa mère qui la culpabilise de son traumatisme, contre l’inspecteur Servan qui la culpabilise à cause de sa beauté. Avec sa voix fluette et son air enfantin, la réalisatrice oblige son personnage à avancer malgré la douleur et la froideur visuelle de la ville d’Arras pour enfin sortir du carcan de l’immaturité soulignée dans la mise en scène comme cocon chaleureux et coloré (la maison de ses parents, le cabinet d’avocat).

Malgré quelques scènes qui s’éternisent un peu trop longtemps et des longueurs qui cassent l’effet introspectif du film, Victoria Musiedlak dresse une problématique assez actuelle : est-ce la personne qui transforme son emploi ou l’emploi qui transforme la personne? Un avocat est-il la cause ou la conséquence des défaillances du système judiciaire? Comment trouver du sens dans son travail? Comment faire le bon choix? 

Première affaire est une question de point de vue. Un point de vue qui, in fine, ne permettra pas forcément de percevoir la vérité absolue, mais plutôt sa propre vérité.  

Première affaire est présenté au festival Cinemania les 3, 6 et 8 novembre 2023.

Fiche technique

Titre original
Première affaire
Durée
98 minutes
Année
2023
Pays
France
Réalisateur
Victoria Musiedlak
Scénario
Victoria Musiedlak
Note
6 /10

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Fiche technique

Titre original
Première affaire
Durée
98 minutes
Année
2023
Pays
France
Réalisateur
Victoria Musiedlak
Scénario
Victoria Musiedlak
Note
6 /10

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