La scomparsa di mia madre ‒ Partir au loin…

« Mamma? Fra quanto tempo pensi di andare via? »
[Maman? Dans combien de temps penses-tu partir?]

The disapearance of my mother - afficheUne mannequin autrefois emblématique s’efforce d’échapper au monde de l’image et de disparaître pour de bon. Mais la détermination de son fils à faire un dernier film sur elle suscite une collaboration et une confrontation inattendues devant l’œil de la caméra.

Avec La scomparsa di mia madre (The Disapearance of my mother), Beniamino Barrese offre un film très personnel, qui interroge l’importance de l’image dans notre société. Il pose aussi un regard tendre sur sa mère, Benedetta Barzini.

Qui est Benedetta?

Scomparsa di mia Madre - Qui est Benedetta
Benedetta

Benedetta est une mannequin emblématique des années 1960. Elle est, entre autres, devenue une des muses de grands noms comme Warhol, Dali, Penn et Avedon. Elle était parmi les modèles les plus en vue de l’époque, tant en Europe qu’aux États-Unis.

Puis, dans les années 1970, elle s’est battue pour les droits et l’émancipation des femmes. Mais, à 75 ans, elle en a marre de tous les rôles que la vie lui a imposés et elle décide de tout laisser derrière elle pour disparaître dans un lieu aussi éloigné que possible du monde qu’elle connaît.

Elle veut disparaître…

L’opinion d’une femme vaut-elle celle d’un homme?

The Disappearance of my Mother - Opinion de femmeLa mannequin italienne s’est battue et trompa toutes les attentes (car une belle femme n’est certainement pas une intellectuelle voyons…) en devenant journaliste et universitaire ainsi qu’en critiquant la misogynie de son ancien milieu. Une tâche incommensurable dans l’Italie de l’époque.

Et c’est peu dire. Alors que Benedetta participe à une émission de télévision où elle apporte des arguments en faveur de l’égalité hommes/femmes, nous assistons à une scène qui, de nos jours, semble surréelle. Un des invités la « remet à sa place » en lui expliquant à quel point ça pourrait être dangereux si les femmes se mettaient à prendre des décisions importantes pour le pays. Et, soudainement, la pauvre femme se retrouve seule de son côté… pendant que tous semblent prendre le parti de l’homme.

Ce genre de réactions a mené la femme à développer une aversion envers les projecteurs.

Touchant

Madre - Mais encoreCaché derrière la caméra, son fils Beniamino est témoin de son voyage. Après l’avoir filmée toute son enfance, et ce malgré la résistance de la principale intéressée, il souhaite maintenant faire un film sur elle; un moyen de la garder aussi près que possible, le plus longtemps possible ‒ ou du moins aussi longtemps que sa caméra le permettra.

Le tournage du film se transforme en une bataille entre mère et fils, une bataille obstinée pour capturer l’image ultime de Benedetta ‒ l’image de sa libération. Mais la femme n’a jamais voulu faire ce film et elle le répète à plusieures reprises.

« ‒ Maman, pourquoi as-tu consenti à faire ce film?
‒ Parce que j’ai essayé de toutes les façons de te dire non. Mais mon “non” était une blessure pour toi. Et à la fin j’ai préféré me blesser moi-même plutôt que de te blesser. »

Mais pourquoi s’obstiner à faire ce film sur sa mère alors que celle-ci ne veut vraiment pas le faire? 

« We always had a strong bond, but I had a feeling that there was so much more behind the part of her that I could see and access. For instance, she never told me that she was a model. I discovered that one day when I found locked in a wardrobe a few big photo portfolios with all her Vogue and Harper’s Bazaar covers and editorials from the 1960s. I never told her I had found them, because if she didn’t tell me there was probably a reason. The Benedetta I knew was so different from the girl who was staring at me from the magazine pages – and yet, she was so similar. I couldn’t easily bring together all of the contrasting pieces of my mother’s life, and I started to feel that it was my responsibility to recompose them into a coherent story. »
[Nous avons toujours eu un lien fort, mais j’avais le sentiment qu’il y avait tellement plus derrière la femme que je pouvais voir et à laquelle j’avais accès. Par exemple, elle ne m’a jamais dit qu’elle était modèle. Je l’ai découvert un jour où j’ai trouvé, dans une armoire, des gros portfolios de photos avec toutes ses couvertures et éditoriaux de Vogue et Harper’s Bazaar des années 1960. Je ne lui ai jamais dit que je les avais trouvés, car si elle ne me le disait pas, il y avait probablement une raison. La Benedetta que je connaissais était si différente de la fille qui me regardait depuis les pages du magazine – et pourtant, elle était si semblable. Je ne pouvais pas réunir tous les éléments contrastés de la vie de ma mère et j’ai commencé à sentir qu’il était de ma responsabilité de les recomposer, en une histoire cohérente.]

La relation que l’on voit à l’écran est belle et honnête. Les « je t’aime » et les câlins font souvent place aux « cretini » (crétins) et aux mots durs. Mais on sent, surtout à la fin du film, l’amour qui unit la mère à son fils.

Mais encore…

Maintenant âgée de plus de 70 ans, son dégoût des projecteurs tourne en crise existentielle. Pour elle, l’objectif est l’ennemi. Mais son fils refuse de la laisser partir avant d’offrir un dernier adieu. Abandonnant la technique au profit de la proximité et du naturel, le réalisateur crée un portrait intime et révélateur du monde dans lequel nous vivons. 

La scomparsa di mia madre est le genre de film qui laissera des blessures à ceux qui y ont participé. Mais, pour nous tous, ça reste un hommage à une femme forte, et un exemple de détermination.

Note : 8.5/10

La scomparsa di mia madre (The Disapearance of my mother) est présenté aux RIDM pour l’ouverture le 14 novembre, ainsi que le 21 novembre 2019.

Visionnez la bande-annonce :

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