To Dust – Trouver réconfort

« Avant que la poussière retourne à la terre, comme elle y était,
et que l’esprit retourne à Dieu qui l’a donné. »
Qohéleth 12:7

To Dust - AfficheShmuel (Géza Röhrig), un chantre hassidique, bouleversé par la mort prématurée de sa femme, s’efforce de trouver un réconfort religieux tout en se tourmentant secrètement à propos de la décomposition de son corps. Alors qu’un partenariat clandestin s’établit avec Albert (Matthew Broderick), professeur de biologie dans un collège communautaire, les deux hommes se lancent dans une entreprise de plus en plus étrange.

Avec To Dust, Shawn Snyder propose une conversation blasphématoire et tragicomique entre la science et la religion, ainsi qu’une exploration des idiosyncrasies du deuil.

Le deuil

To Dust - Le deuil
Shmuel (Géza Röhrig) sur la tombe de sa femme

To Dust présente une histoire unique sur une question universelle : comment faire face à la perte de quelqu’un que nous aimons? Le film de Snyder cherche à montrer qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon de composer avec la mort; il y a juste de nombreuses questions qui resteront en grande partie sans réponse. Et ce, peu importe nos croyances. Ici, c’est l’épouse, la personne sur qui un homme peut compter, qui meure. Et bien que Shmuel soit hassidique, sa réaction pourrait se défendre pour n’importe qui. Évidemment, le réalisateur la montre de manière caricaturale afin d’ajouter un volet humoristique au film..

Puis, il y a l’amitié, le réconfort qui peut exister entre deux hommes ayant besoin l’un de l’autre. Pour Shmuel, son compagnon est le scientifique qui peut l’aider à comprendre; pour Albert, l’ami est celui qui redonne, à travers une mission, un sens à tout ce qu’il fait. Il existe effectivement des compagnons de voyage qui sont parfois touchés par notre douleur. Ou, à tout le moins, des compagnons qui peuvent trouver, tout comme nous, un sens pratique à se côtoyer.

Science VS Religion

To Dust - Science vs Religion
Albert (Matthew Broderick)

Au moment où il se bat pour trouver du réconfort dans sa religion, qui présente un calendrier rigoureux en ce qui concerne le deuil, Shmuel est de plus en plus hanté par les visions du cadavre en décomposition de Rivkah, sa femme. Convaincu que son âme souffrira jusqu’à ce que son corps redevienne poussière, Shmuel décide qu’il doit chercher à comprendre les processus physiques de sa dégradation, malgré le blasphème inhérent à toute enquête scientifique. Au risque d’être découvert et expulsé de sa religion, il se trouve à l’extérieur de son enclave, où ses recherches le mènent à Albert, un professeur de biologie délabré du collège local.

Grâce à ces deux personnages superbement interprétés, Snyder réussit à nous convaincre que ces deux points de vue plutôt contradictoires sont finalement réconciliables. Mais c’est le désir de critiquer le fait que le deuil est pratiquement minuté chez les hassidiques qui a amené le réalisateur à faire ce film : « And while religion can offer a much-needed comfort, the notion that an individual grieving process can be pre-determined is to me, an offensive suggestion. I believe that innate emotions, if suppressed, will fester. » [Et, bien que la religion puisse offrir un réconfort bien nécessaire, la notion selon laquelle un processus de deuil individuel peut être prédéterminé est pour moi une suggestion offensante. Je crois que les émotions innées, si elles sont supprimées, vont s’infecter.]

Et c’est avec un humour parfois subtil et parfois gros que nous naviguons entre croyances religieuses et croyances scientifiques. Mais toujours avec respect.

Rire sans se moquer

To Dust - Rire sans se moquer
Shmuel, Albert et Harold

C’est donc avec humour et une approche de type « fable » que To Dust nous divertit. En utilisant le folklore juif, lui-même rempli d’histoires mythiques pleines d’esprit et de blasphèmes, de jeux perturbants et de bavardages surnaturels, le film nous fait découvrir une branche du judaïsme qu’on connait peu (en tout cas, c’était mon cas). Le long métrage pointe cette tangente folklorique vers le monde hassidique contemporain et les racines ancestrales qu’il borde.

Mais c’est lorsqu’Albert est involontairement embarqué dans cette aventure étrange de recherches judiciaires amatrices et commence à guider Shmuel à travers des expériences scandaleuses qui visent à se rapprocher d’un calendrier pour la décomposition de Rivkah – à  commencer par le vol, l’étouffement et l’enterrement d’un cochon –, que To Dust nous amène en dehors de notre zone de confort. Avec leurs mésaventures macabres de plus en plus périlleuses, l’étrange duo ne reculera devant rien pour assouvir sa curiosité et pour trouver pour Shmuel le réconfort qu’il recherche désespérément.

Et bien que la thématique religieuse aurait pu causer de l’indignation, on se retrouve tout de même dans une balade douce.

Mais encore…

To Dust - Mais encore
Shmuel et Albert

Un autre point intéressant est le regard que pose Snyder sur les efforts que nous déployons pour éviter de faire face aux réalités de la mort et du délabrement – lire la décomposition du corps de nos êtres chers. Et comment il est morbide de regarder cette vérité biologique en face, mais comment elle est spirituelle en soi.

Au final, To Dust amène le spectateur à se demander comment, après une perte dévastatrice, confort et sens pourraient être trouvés dans l’un ou l’autre des mondes – religieux ou scientifique – et de quelle façon ils pourraient être réconciliés… ou pas.

Note : 8/10

 

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