« In the USA, if the people want to maintain peace and security,
they have to choose Donald Trump. »
« Aux USA, si les gens veulent maintenir la paix et la sécurité,
ils devront choisir Donald Trump. »
En Birmanie, le « Vénérable W. » est un moine bouddhiste très influent. Partir à sa rencontre, c’est se retrouver au cœur du racisme quotidien, et observer comment l’islamophobie et le discours haineux se transforment en violence et en destruction. Pourtant, nous sommes dans un pays où 90 % de la population est bouddhiste, religion fondée sur un mode de vie pacifique, tolérant et non-violent.
Projeté à Cannes en séance spéciale, Le vénérable W. de Barbet Schroeder présente un extrémisme que plusieurs ne soupçonneraient même pas. On parle ici d’un moine bouddhiste qui pousse la haine envers la minorité musulmane à l’extrême. Un voyage dangereux mené de main de maitre par un réalisateur expérimenté!
Qu’est-ce que je connais du bouddhisme? Que c’est plus une philosophie qu’une religion à proprement parler. Qu’on y prône la paix et le respect. Et qu’on prône de ne rien croire aveuglément, mais plutôt de vérifier les dires d’une personne avant de la suivre aveuglément.
Qu’est-ce que j’ai appris de plus sur le bouddhisme? Que Bouddha a lui-même dit que tout change et se transforme constamment. Il a d’ailleurs annoncé, de son vivant, la fin de sa propre doctrine : il a estimé que, 5000 ans plus tard, il n’en resterait plus rien… Aucun chef religieux n’a jamais eu ce courage.
Toutes les religions ont une face claire qui prêche la paix et la bienveillance, mais la sagesse du Bouddhisme à cet égard est inégalable et augmente notre perplexité quant à ces violences. Mais il semble que certains hommes ont voulu tirer profit de certaines tensions politiques pour porter leurs propres causes.
La Birmanie est à plus de 80 % bouddhiste. Moins de 10 % de sa population est musulmane. Et pourtant, c’est selon l’idée que les musulmans envahissent le pays que Wirathu tire son pouvoir.
Ce qu’il fait actuellement n’est rien de moins qu’un génocide à l’encontre de la minorité musulmane des Rohingyas. Wirathu a d’ailleurs créé le concept 969. En fait, il s’agit d’un mouvement qui mise sur le harcèlement des musulmans pour les mener à leur perte. Par exemple, des pamphlets et des autocollants ont été créés afin que les marchants puissent signaler qu’ils ne servent pas les Kalar (mot utilisé pour dénigrer les musulmans – comparable à nègre pour un noir). Et les moines extrémistes encouragent très fortement les gens à ne pas acheter quoique se soit d’une entreprise qui appartient à un musulman.
La situation étant déjà tendue entre ces deux groupes, les positions d’extrême intolérance ne font que mettre le feu aux poudres, ce qui cause depuis plusieurs années des violences inouïes. Des villes entières ont été brulées par les deux côtés, mais principalement par les fanatiques de W. Et des camps de réfugiés remplissent la frontière du pays.
Lorsqu’on décide de faire ce genre de film, on accepte de courir des risques. Mais en rencontrant un des hommes les plus en vue et les plus aimés et détestés à la fois, on court de très grands risques.
Comment le réalisateur a procédé? « Après plus de six mois d’intenses recherches approfondies dans le secret le plus absolu, nous avons pris des visas de touristes et des billets à prix réduit. Une fois sur place, après avoir établi une base dans un hôtel modeste j’ai fini par réussir à rencontrer Wirathu et lui proposer cette aventure. Il voulait savoir pourquoi je voulais faire ce film, je lui ai répondu que Marine Le Pen partageait beaucoup de ses idées, et que si elle arrivait au pouvoir elle ferait sans doute appliquer des lois semblables à celles qu’il venait d’arriver à faire voter dans son pays. En fait, la réponse que j’avais donnée à Wirathu était assez proche de la vérité car c’était en effet des problèmes occidentaux dont je voulais aussi parler, en approchant un personnage dont le bouddhisme était en fait avant tout nationaliste et populiste. Une fois sur place j’ai donc compris que nous avions beaucoup à apprendre des bouddhistes extrémistes. Les “axes du mal” et les populismes n’ont pas de frontières. »
Mais en prenant le temps de rencontrer Wirathu, le réalisateur donnait l’impression d’être dans son camp. Du coup, lui et son équipe se sont vu menacer par les autorités de se faire arrêter et/ou expulser. D’ailleurs, les dernières entrevues ont dû être tournées en Thaïlande.
Le vénérable W. pourrait, des dires mêmes du réalisateur, s’insérer en tant que troisième volet d’une « trilogie du mal » qu’il aurait commencé avec Général Idi Amin Dada sur le dictateur ougandais (1974), puis L’Avocat de la terreur (2007) sur Jacques Vergès.
Le même point de départ à l’origine de ces projets : il s’agit de rencontrer, en les faisant parler sans les juger, des personnages au travers desquels le mal peut s’incarner sous différents visages et en laissant l’horreur ou la vérité s’installer d’elles-mêmes à mesure que le film avance.
Mais qu’est-ce qui explique la psychologie de quelqu’un comme Wirathu? Peut-on croire qu’un viol dont il aurait été témoin à l’âge de 11 ans explique ses comportements et ses obsessions? Une des scènes qui est particulièrement frappante quant à la mentalité dérangée du personnage est celle dans laquelle il montre une vidéo qu’il a lui-même produite. Cette vidéo est une reconstitution du viol d’une jeune femme bouddhiste qui aurait été violée par 3 musulmans. Oui, une reconstitution actée, ensuite distribuée dans tout le pays, afin de « crucifier » tous les musulmans du pays. Parce que vous le savez bien, si un musulman est un violeur, ils le sont tous!
Note : 8/10
* Cette citation est affichée au début du film et résume bien la tristesse du monde dans lequel nous vivons :
« Now hatred is by far the longest pleasure;
men love in haste, but they detest at leisure »
« La haine est de loin le plus long plaisir;
les hommes aiment à la hâte, mais ils détestent à loisir »
Vous connaissez le mantra de base du bouddhisme? Il revient plusieurs fois dans le film. Le voici, pour votre plaisir… et le mien :
dîghâ vâ ye va mahantâ,majjhimâ rassakâ anuka thûlâ.
Quels que soient les êtres vivants : faibles ou forts, longs, grands, moyens, courts, petits ou gros
Ditthâ vâ ye va aditthâ, ye va dûre vasanti avidûre;
bhûtâ va sambhavesî va, sabba-satta bhavantu sukhitattâ.
Visibles ou invisibles, proches ou lointains, nés ou à naître;
puissent tous les êtres sans exception être heureux
Na paro param nikubbetha, nâtimaññetha katthaci na kiñci;
byârosanâ patighasaññânâ ññama-ññassa dukkhamiccheyya.
Que personne ne déçoive ni ne méprise qui que ce soit, nulle part.
Que personne ne souhaite le mal aux autres par colère ou malveillance
Mâtâ yathâ niyam puttam, âyusâ ekaputta-manurakkhe;
evampi sabbabhûtesu; mânasam bhâvaye aparimânam.
Comme une mère protègerait son unique enfant au risque de sa propre vie,
cultivons un amour sans limites envers tous les êtres
Mettañca sabbalokasmi, mânasam bhâvaye aparimânam;
uddham adho ca tiriyañca, asambâdham averamasapattam.
Que ces pensées d’amour infini imprègnent le monde tout entier,
dessus, dessous, de toutes parts, sans obstacle, sans haine ni inimitié
Tittham caram nisinno va, sayâno yâvatâssa vitamiddho;
etam satim adhittheyya, brahmametam vihâra-midhamâhu.
Qu’il soit debout, en marche, assis ou allongé, tant qu’il est éveillé,
il devrait développer un esprit empli d’amour bienveillant.
Ceci est l’état le plus noble
Ditthiñca anupaggamma, sîlavâ dassanena sampanno;
kâmesu vineyya gedham, na hi jâtuggabbhaseyya puna-reti ti.
N’ayant pas de fausses croyances, étant vertueux, doté de la vision
pénétrante et ayant abandonné l’attachement pour les plaisirs des sens,
plus jamais il ne renaîtra dans ce monde
Mettâ-suttam nitthitam.
Ici se termine le Metta sutta
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