« Je suis réveillée. »
Mona (Eili Harboe) et Robby (Herman Tømmeraas) forment un jeune couple amoureux. Robby vient de décrocher l’emploi de ses rêves et ils ont conclu une offre incroyable sur un appartement spacieux, bien que délabré. Peu importe que cela nécessite pas mal de rénovation.
Avec Nightmare (Marerittet), Kjersti Helen Rasmussen propose un bon film d’horreur qui tient la route malgré quelques faiblesses.
En norvégien et en danois, les mots pour « cauchemar » sont respectivement mareritt et mareridt, qui peuvent être directement traduits par « balade en jument ».
La jument (mare) est attestée dès la saga nordique Ynglinga datant du 13e siècle. Ici, le roi Vanlandi Sveigðisson d’Uppsala a perdu la vie à cause d’un cauchemar (mara) invoqué par la sorcière finlandaise Huld ou Hulda, engagée par l’épouse abandonnée du roi, Drífa. Le roi avait rompu sa promesse de revenir dans les trois ans, et après dix ans, la femme engagea la sorcière soit pour attirer le roi vers elle, soit à défaut, pour l’assassiner. Vanlandi s’était à peine endormi qu’il se plaignait que le cauchemar « le chevauchait »; lorsque les hommes tenaient la tête du roi, celle-ci « lui marchait sur les jambes » au point de se briser, et lorsque la suite « saisit alors ses pieds », la créature « appuya mortellement sur sa tête ». Dans la mythologie sami, il existe un elfe maléfique appelé Deattán, qui se transforme en oiseau ou en un autre animal et s’assoit sur la poitrine des personnes endormies, leur donnant des cauchemars.
C’est de cette légende que s’inspire le film qui nous intéresse. Pour l’illustrer, la réalisatrice utilise aussi la peinture Le cauchemar de Henry Fuseli (1781). C’est le personnage du médecin qui traitera Mona qui présente l’œuvre au public.
Bien que Nightmare ne révolutionne rien, il propose tout de même de belles choses. À commencer par l’utilisation de la légende mentionnée précédemment. Plutôt que de l’utiliser littéralement, la présence de ce démon prend la forme d’une possession externe. Ce n’est pas Mona qui est possédée par le démon, mais plutôt ses rêves et, éventuellement, quelque chose à l’intérieur de son corps.
C’est une façon tout de même originale d’aborder la thématique de la possession et, évidemment, du conjoint qui n’y croit pas. C’est à ce niveau que le spectateur pourrait décrocher. On a parfois l’impression que la relation entre les deux personnages n’est pas vraie. Comme s’il manquait quelque chose pour qu’on y croie. Heureusement, Eili Harboe est excellente et aide à ce qu’on ne focalise pas trop sur ce détail.
Les séquences oniriques sont bien intégrées afin que le spectateur ne soit jamais trop certain si ce qui se déroule devant ses yeux appartient au rêve ou à la réalité.
On ajoute à ça les flashs où on aperçoit la mare et on se retrouve avec un film visuellement efficace.
Je dois aussi mentionner le courage de la réalisatrice dans ses choix visuels. Dans le cinéma d’horreur, on montre beaucoup de sang et de morts. Mais on montre peu de bébés morts et encore moins de sang menstruel. Rasmussen montre non seulement un bébé mort, elle montre aussi un bébé tombant du 2e étage et une sublime séquence où Robby, rempli de désir pour sa copine, baisse la culotte pour se retrouver nez à nez avec une belle flaque de sang dans le fond d’une serviette sanitaire.
Ce sont souvent les petits détails qui feront qu’un film vaudra la peine d’être vu ou recommandé. Ces détails, la réalisatrice norvégienne les maitrise, ce qui lui permet d’offrir un film d’horreur qui remplit ses attentes.
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Bande-annonce
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