Les Sommets du cinéma d’animation s’achèvent. Je sais que pour plusieurs, les films animés sont quasi systématiquement associés aux enfants. C’est dommage parce que ces gens se privent souvent de films vraiment magnifiques, et certains ne s’adressent pas du tout à un jeune public. L’animation permet d’aborder le monde sous un autre angle, parfois imaginaire, parfois plus terre à terre, parfois poétique. Les possibilités sont presque infinies et les techniques très variées.
Je vous présente ici quatre films d’animation qui se démarquent par leur rendu visuel et qui sont très chargés poétiquement.
[Québec, 2016, 8 min]
Gagnant du Prix du jury et du Prix du jury junior pour le court métrage à Annecy ainsi que de plusieurs autres récompenses canadiennes et internationales, dont deux prix au Festival d’Ottawa 2016 et une mention spéciale au Festival du nouveau cinéma, Vaysha, l’aveugle de Theodore Ushev est un coup de cœur. Le personnage de Vaysha a un œil vert et l’autre marron. L’un d’eux voit le passé et l’autre, l’avenir. Elle ne voit pas le présent. D’un côté, c’est la jeunesse, la pureté et l’innocence, et de l’autre, la vieillesse, la destruction, l’apocalypse. L’image – qui a un petit quelque chose à la Van Gogh – est ainsi souvent séparée en deux afin de montrer la vision du monde de Vaysha.
Cette vision du monde n’est pourtant pas unique à Vaysha. Nous devons avouer que plusieurs hommes et femmes vivent dans le passé ou se projettent dans l’avenir, oubliant ainsi de profiter du temps présent. Et à voir comment vivent les hommes, nous nous dirigeons vers la vision apocalyptique de Vaysha.
[Québec, 2016, 7 min]
La projection aux Sommets du cinéma d’animation de La bêtise était alors une première mondiale. Le réalisateur, Thomas Corriveau, est professeur à l’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM. Le film montre deux personnages, deux hommes, à l’opposé. Bien que très minimaliste, il reprend l’histoire de l’humanité en illustrant la bêtise des hommes. Le court métrage est librement inspiré de la série de gravures Les désastres de la guerre de Goya. La violence est d’ailleurs assez caractéristique dans ce film, comme elle l’est dans les relations entre les hommes dans notre société.
L’homme est-il fondamentalement bête?
[Québec, 2016, 6 min]
Ce sont les couleurs qui frappent dans ce film peint à la main. Les personnages, le cheval et les différentes formes dans Nutag-Homeland se confondent avec le paysage. Il n’y a que très peu de contrastes : les personnages et le paysage forment un tout. L’image est très poétique. L’anonymat des silhouettes s’explique bien à la fin quand on apprend que c’est là un hommage aux nations Kalmyks déportées de l’URSS, aux alentours de la Seconde Guerre mondiale.
[États-Unis, 2016, 3 min]
Primal Flux de Joan Gratz est très certainement fait en stop motion (technique d’animation image par image) avec de la pâte à modeler. Des oiseaux et des visages émergent au gré des vagues, se transforment, disparaissent et réapparaissent. Les couleurs voyagent tout autant, créent le mouvement.
Les amateurs de poésie et de beauté seront, par ces quelques films, bien servis. Ils sont aussi, à leur manière, une belle critique sociétale.
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