« My dying wish is that you be the new boss of the Barbara family. »
[Ma dernière volonté est que tu sois le nouveau patron de la famille Barbara.]
La carrière de la réalisatrice Catherine Hardwicke est à la fois fascinante et assez triste à suivre. Elle a commencé à avoir une bonne réputation au début des années 2000, notamment avec son premier film Thirteen en 2003, qui suit la vie tumultueuse d’une adolescente et dont le scénario est inspiré de la vie de la scénariste Nikki Reed, ainsi que Lords of Dogtown en 2005, un film qui traite de la culture du skate dans les années 70 et qui s’inspire du documentaire Dogtown and Z-Boys sorti en 2001. Ces deux films ont été remarqués par les critiques, notamment Thirteen qui lui vaudra un prix de réalisation à Sundance. Avec The Nativity en 2006, qui relate la naissance de Jésus sous un trait plus psychologique avec une Marie adolescente, la réalisatrice s’est fait une spécialité de traiter des troubles des adolescents dans ses films.
Et puis en 2008, elle a reçu les foudres de nombreuses critiques, surtout celles venant du public, quand elle a réalisé Twilight. Malgré le succès énorme du film, son nom n’a pas été vraiment reconnu dans le milieu. Sa réputation prendra un autre coup quand elle réalisera en 2011 Red Riding Hood, une version plus sombre et proche de l’esprit Twilight du célèbre conte de Charles Perrault. Le film est froidement accueilli par la critique. Depuis, les films de la réalisatrice passent assez inaperçus. On peut quand même mentionner un épisode de la série anthologique Le Cabinet des curiosités de Guillermo Del Toro où elle adapte la nouvelle La maison de la sorcière de H. P. Lovecraft. Ils ont cependant tous en commun le fait qu’ils mettent en scène des personnages de femmes fortes, qu’elles soient jeunes ou non, montrant une constante chez la réalisatrice. Et cela se retrouve dans son plus récent film, Mafia Mamma.
Après avoir exploré plusieurs genres, comme le teen movie, le fantastique, le film d’horreur, le thriller ou bien le drame érotique, Catherine Hardwicke signe ici une pure comédie. En effet, ce pitch d’une femme américaine dans la cinquantaine qui se retrouve du jour au lendemain parraine de la mafia peut facilement laisser place aux situations comiques. Surtout quand le caractère très maternel de Kristin, jouée par la fantastique Toni Collette, est mêlé à un univers aussi dur et violent qu’est la Mafia. Le film joue principalement sur cet aspect, notamment quand il mentionne à de nombreuses reprises le roman autobiographique d’Elizabeth Gilbert Eat, Pray, Love. Comme dans le livre, le personnage principal tente de fuir sa vie coincée aux États-Unis et cherche à découvrir de nouveaux horizons dans un voyage. Ici, le concept est tourné de manière humoristique, surtout quand les personnages changent le titre pour Eat, Pray, Fuck pour symboliser le but de Kristin.
Cependant, le message d’émancipation reste là. En effet, Kristin fait face à un patron et des collègues sexistes, un mari irresponsable qui l’a trompé et son fils, le seul véritable homme qui la respecte, part pour le collège et la laisse seule. Et puis elle arrive dans la Mafia, un milieu où les hommes sont majoritairement présents, tentent de tout régler leurs problèmes systématiquement avec la violence et dénigrent toutes les femmes du milieu. La seule femme de la famille, Bianca, interprétée par l’aussi talentueuse Monica Belluci, est la seule capable de bien gérer les affaires, mais est coincée dans son rôle de consigliere, soit de secrétaire. De plus, si Kristin cherche avant tout à avoir des relations avec de beaux jeunes hommes italiens typiques, elle apprendra durant le film qu’elle est capable de remettre sa vie en marche de ses propres manières et sans l’aide d’un homme. Le message féministe est certes peu subtil et loin d’être original, mais il a le mérite d’être bien traité avec le ton du film, même si le test de Bechdel est loin d’être passé (pour rappel, le test de Bechdel ne démontre pas vraiment si un film est féministe ou non, mais comment les personnages masculins sont mis en avant).
Mais bon, à part le message qui est bien traité, le reste du film est quand même d’une banalité sans nom. Mis à part les bonnes prestations de Toni Colette et Monica Bellucci, une bonne utilisation de nombreux fusils de Tchekhov (soit des éléments présentés qui auront une importance plus tard dans le récit) et certaines scènes assez drôles, le film manque sérieusement de panache. Cela se voit surtout dans sa mise en scène, qui à part une ou deux scènes bien cadrées, est d’une pauvreté créative sans nom. Les meilleures scènes sont surtout aidées par le montage et non par la caméra de Catherine Hardwicke. Et les scènes d’action n’ont juste aucune énergie. Mention spéciale au climax du film qui est d’une terrible mollesse.
Je n’ai malgré tout pas passé un mauvais moment devant Mafia Mamma. Il est tout à fait sympathique, mais ce n’est pas le genre de film pour lequel je paierais afin de le voir sur grand écran. Dans mon cas, j’attendrais qu’il soit à la location ou sur les plateformes pour envisager de le regarder. Mais si ce genre de films est dans vos goûts, vous pouvez aller le voir, vous ne serez pas déçu.
Bande-annonce
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