« Thanks for making me feel so special. »
[Merci de me faire sentir si spéciale.]
Alors que son mariage est sur le point d’imploser, Miriam (Madeleine Sims-Fewer) retourne dans sa ville natale pour chercher du réconfort auprès de sa sœur cadette (Anna Maguire) et de son beau-frère (Jesse LaVercombe). Mais un soir, une infime erreur de jugement conduit à une trahison catastrophique, laissant Miriam choquée, ébranlée et furieuse. Croyant que sa sœur est en danger, Miriam décide qu’elle doit la protéger à tout prix, mais le prix de la vengeance est élevé et elle n’est pas préparée pour soutenir le poids qu’elle prend sur ses épaules alors qu’elle commence à s’effriter émotionnellement et psychologiquement.
Présenté il y a 2 jours en première mondiale au TIFF et sélectionné au VIFF et au FNC, Violation, de Madeleine Sims-Fewer et Dusty Mancinelli, est un film de revenge qui met en scène une femme qui vit une tempête émotionnelle et psychologique alors qu’elle lutte désespérément pour faire la bonne chose.
Dès les premières secondes du film, je n’ai pu réprimer cette impression de m’embarquer dans une aventure vontrierienne. L’ambiance sombre, quasi terrifiante et la musique… Oh, la musique. Cette musique classique trop belle pour la laideur que l’on imagine sur le point de surgir.
Puis cette violence extrême contrainte dans un genre de huis clos sinistre… Puis, un loup. Terrifiant. Effrayant. Mais beau. Il mange ce qui semble être un lapin ou un lièvre. Une femme est immobile. Une superbe analogie que ce loup, avec cette forêt presque sortie d’un conte de fées. Et la musique qui vient nous chercher directement aux tripes. Oui. On aurait pu croire que Lars Von Trier était venu tourner une nouvelle version d’AntiChrist dans les Laurentides.
Violation est avant tout un film de vengeance. Et tous ces films de vengeance contiennent de la nudité féminine et des femmes dans des positions vulnérables. Cette fois-ci, c’est un homme qui est montré dans un état de vulnérabilité. Et ça « fesse » fort!
Ma comparaison à Antichrist de Von Trier ne vient pas seulement de l’image et de la musique. Je pourrais ajouter l’utilisation de la lumière naturelle et d’une image presque granuleuse. Mais, avant tout, c’est l’idée de la vengeance violente et incontrôlée d’une femme sur un homme qui me rappelle ce réalisateur.
Il est très difficile de discuter de ce thème (qui est au centre du film) sans vendre de punch. Je vais donc m’arrêter ici. Mais ceux qui le verront dans le cadre du TIFF ou encore du VIFF (vous pouvez d’ailleurs suivre notre couverture du Vancouver International Film Festival en suivant ce lien) auront certainement envie d’en parler. Je serai là pour vous. Car le premier long métrage du duo de réalisateurs ne vous laissera pas de marbre.
À quelques reprises, des plans avec un loup sont intégrés au film. Ou plutôt 3 séquences. Au début, au milieu et à la toute fin. L’introduction de cette créature représente plusieurs choses. Chaque fois, on voit la bête accompagnée par Miriam. La femme est effrayée, mais en contrôle d’elle-même. L’image est forte : la femme prendra le contrôle du loup, le domptera.
Mais le loup est aussi une créature – tout comme Miriam – qui intrigue. À la fois belle et effrayante, douce et dangereuse. Et donc, comme les sentiments ambigüs que l’homme peut ressentir envers le loup, le spectateur devra dealer avec une ambiguïté alors qu’il examine les actions de Miriam qui tente de punir ceux qui lui ont fait du tort.
Une grande partie de l’horreur et de la peur qui nous sont présentées, vient de la façon dont les sœurs interagissent et de la manière dont elles réagissent l’une envers l’autre. Il n’y a pas de filtre dans ces relations sororale qui peuvent être merveilleuses, mais qui peuvent aussi être blessantes et souffrantes de manière à laisser des cicatrices émotionnelles permanentes.
Violation traite donc de la rage féminine et de la façon dont le public a tendance à se mettre facilement derrière les anti-héros masculins mais à juger très durement les femmes qui font les mêmes choses. Quand Miriam est trahie, elle ne pleure pas, elle se met en colère et s’en prend à ses proches. Puis, les gens autour d’elle se rapportent à sa colère d’une manière patriarcale typique, conduisant à sa quête malavisée de vengeance. Les gens peuvent sympathiser avec une femme qui est bouleversée – ils ont de l’empathie pour elle -, mais le public est repoussé par la colère des femmes. Ils ne peuvent pas y faire face. Une femme doit passer par toutes les autres options émotionnelles qui s’offrent à elle avant de se mettre en colère pour que cette colère soit juste et acceptée. Du coup, on ne sait pas trop, en tant que spectateur, comment prendre le personnage principal.
Le premier long métrage de Madeleine Sims-Fewer et Dusty Mancinelli est profondément troublant. C’est un portrait effrayant et horrible de la confiance, de la loyauté et de la rivalité sororales. Combinant une esthétique luxuriante et une violence déchirante, Violation est une fable de vengeance féministe qui crée un cataclysme intime de représailles sanglantes et inévitables.
Note : 8.5/10
Violation est présenté au VIFF du 24 septembre au 7 octobre 2020.
© 2023 Le petit septième