« Je crois que tu es baisé. »
Après la mort tragique de Nat (Davika Hoorne), victime de pollution à la poussière, March (Wisarut Himmarat) sombre dans le deuil. Mais son quotidien bascule lorsqu’il découvre que l’esprit de sa femme s’est réincarné dans un aspirateur. Bien qu’absurde, leur lien renaît, plus fort que jamais — mais loin de faire l’unanimité. Sa famille, déjà hantée par un ancien accident d’ouvrier, rejette cette relation surnaturelle. Tentant de les convaincre de leur amour, Nat se propose de nettoyer l’usine pour prouver qu’elle est un fantôme utile, quitte à faire le ménage parmi les âmes errantes…
Film très attendu après le Grand Prix de la Semaine de la Critique 2025 reçu à Cannes en mai dernier, le premier long métrage du Thaïlandais Ratchapoom Boonbunchachoke, qui faisait sa première nord-américaine au TIFF, n’a pas eu l’effet escompté. Coproduction engageant trois autres pays, la France, Singapour et l’Allemagne, c’est un film bourré de créativité, de références cinématographiques, d’énergies, de scènes brillantes et drôles, pourtant on parvient à s’y ennuyer. L’exercice de style pousse le réalisateur a essayé, plusieurs voies – le fantastique, l’étrange, la comédie, l’indie, le rétro, le film LGBT – comme autant de couches superposées dans un seul et même film.
Le résultat n’est pas désagréable, au début, lorsque l’aspirateur prend vie et devient inquiétant, on pense au réalisateur français inclassable Quentin Dupieux avec le pneu tueur (Rubber, 2010). Mais la voix de casserole du fantôme et le parti pris de ne pas prendre son point de vue comme l’a fait le réalisateur polonais Jerzy Skolimowski avec un âne dans EO (2022) rendent l’exercice limité. Comment ne pas penser à Her (2013, Spike Jonze) et à la voix habitée de Scarlett Johansson, film qui annonçait l’intelligence artificielle générative? Les fantômes de A Useful Ghostqui hantent les rêves des vivants et prennent le contrôle d’un frigo ou d’un aspirateur sont un peu ringards à l’ère de ChatGPT et des robots de room service, sentent le formol dans le genre du cinéma fantastique. Le film laisse derrière lui un lot de frustrations en citant et se remémorant d’autres films. C’est finalement sa force cinéphile de renvoyer à l’histoire du cinéma, notamment aux histoires de fantômes du génial Kiyoshi Kurosawa (Kaïro, 1997), sans avoir, hélas, l’éclat du cinéaste japonais.
L’histoire de la lady girl qui appelle le service après-vente pour réparer son aspirateur habité par un fantôme et reçoit un faux réparateur qui devient le narrateur du film est sans doute sous-exploitée dans la dramaturgie du film. Au lieu de cela, le cinéaste étire une histoire de deuil et de fantôme chasseur de fantôme un peu farfelue, reposant le plus souvent sur des personnages dénués d’émotions et un peu trop mécaniques. A Useful Ghost saura plaire comme déplaire, dans un ensemble aussi bien génial que prétentieux, néanmoins il a manqué un souffle qui aurait aidé à recoller ce bric-à-brac créatif.
A useful ghost est présenté au TIFF les 11 et 13 septembre 2025.
Bande-annonce
© 2023 Le petit septième