Vendredi soir j’ai eu l’occasion d’assister au programme 3 d’Asiate en courts. Encore une fois cette année, le programme était gagnant.
6 films sélectionnés par Laurence Ly et Dédé Chen étaient au programme, mélangeant les styles et les thèmes, mais sous la thématique « Théâtre du réel ». Voici mon regard sur les 6 films présentés.
Un duel entre deux divinités folkloriques dans un opéra cambodgien décidera du sort d’une jeune adolescente dans sa tentative de remporter le concours de dictée Paul Gérin-Lajoie.
Ce court métrage m’a laissé avec une certaine ambivalence. Autant j’ai apprécié l’histoire de l’adolescente qui tente de naviguer entre famille et école, que j’ai trouvé le traitement des divinités ennuyant et mal utilisé.
Je crois que l’approche est intéressante afin de mettre en valeur la culture traditionnelle cambodgienne et, ainsi, la placer dans une histoire qui se passe au Québec. Mais la manière de le faire manque de subtilité et donne l’impression d’un grand manque technique.
Peut-être que ce concept n’était pas fait pour un film aussi court. Ceci étant dit, le réalisateur a du talent et sa façon de créer une histoire moderne en y incluant un côté traditionnel est intéressante. Reste à voir ce que cela pourrait donner avec un peu plus de moyens et un peu plus de subtilité.
Cette œuvre collective fantaisiste débute dans une laverie automatique, puis prend des directions inattendues.
Inspiré par l’artiste visuel espagnol Paco Pomet, mis en scène par Marites Carino et chorégraphié par Emmanuelle Lê Phan, OffSpin Cycle met en scène les danseurs de Tentacle Tribe et la musique d’Elon Höglund, cofondateur de Tentacle Tribe. Tourné en grande partie en 16 mm à Montréal, ce court métrage explore les possibilités inimaginables qui s’ouvrent à nous hors de notre zone de confort. Le projet a reçu une subvention du programme Digital Now du Conseil des arts du Canada et a été financé par le Conseil des arts du Québec.
Quelle belle surprise ce fut que de retrouver ce film de danse contemporaine dans le programme 3. Ici, non seulement la chorégraphie est magnifique et bien rythmée, mais le film est tourné en pellicule. Quel culot quand même. Avec tous ces mouvements rapides et les nombreux angles, l’utilisation de la pellicule peut rapidement devenir coûteuse.
La chorégraphie est vivante et originale. L’utilisation des chandails à manches longues et attachés les uns aux autres offre une nouveauté au niveau cinématographique. Situé en pleine ville, ce film donne envie de bouger et permet à n’importe qui d’apprécier la danse, puisque les mouvements sont originaux et les jeux de couleurs associés aux déplacements offrent une richesse visuelle stimulante.
Ce film est un vrai coup de cœur.
La cinéaste alias Tranie Tronic raconte l’histoire de l’incident qui a inspiré leur dernier album Transgression et sensibilise aux dangers potentiels des rencontres avec des hommes en ligne en partageant leur expérience d’agression et de vol.
Ce film traite d’un sujet délicat, mais important. Et il faut répéter que les victimes d’agressions sexuelles ne sont JAMAIS responsables de l’acte et qu’elles ne devraient jamais être traitées comme si c’était elles qui l’avaient provoqué.
Tranie Tronic offre un témoignage plus qu’un documentaire. L’artiste raconte ce qui a mené à son agression et ce qui a suivi afin de sensibiliser. Le traitement est plutôt original, utilisant son art musical pour raconter son histoire à travers ce film.
Mais pendant le visionnement, je ne pouvais m’empêcher d’avoir une impression dérangeante. Je croyais, au départ, que c’était dû à la façon dont la victime avait été agressée. Ou plutôt le fait qu’elle avait invité, chez elle, une personne que non seulement elle ne connaissait pas (elle n’avait eu que quelques échanges via une application de rencontre louche), mais une personne qui était très insistante et pas très respectueuse dans les conversations textes. Une partie de moi se disait qu’elle était… Comment dire? Disons que le genre d’échange numérique aurait dû faire en sorte que Tranie Tronic ne rencontre pas cette autre personne.
Mais après avoir pris un peu de temps pour réfléchir au film, j’ai compris que mon malaise venait d’un autre endroit. J’ai du mal avec le fait qu’une personne fait un documentaire sur elle-même, en utilisant et en mettant de l’avant ses autres créations afin de créer son propre récit. On en vient à se demander si ce film n’est pas une sorte de promotion.
Attention. Je ne dis pas que son récit ne mérite pas d’être raconté. Je me questionne simplement sur les raisons réelles du format. Pourquoi ne pas demander à un autre réalisateur de faire le film? Pourquoi ne pas simplement raconter son expérience via sa musique, qui est son mode de création initial?
Donc, je trouve la technique intéressante, mais je me questionne sur les raisons réelles derrière le film.
Suite à un échange de messages texte avec sa mère au sujet de son chien nouvellement adopté, Abby, une jeune femme voit son expérience d’adoptée transraciale se refléter dans cette adoption.
Cette très courte animation traite de l’adoption d’une façon originale, subtile et touchante.
En mettant en parallèle l’adoption d’une enfant à celle d’un animal, la jeune réalisatrice propose un point de vue totalement nouveau sur l’adoption à l’international. Voici un film qui devrait être montré un peu partout, dont dans les écoles primaires. Il permettrait à un vaste public de mieux comprendre comment une personne adoptée peut ressentir les choses.
Une jeune cinéaste philippine tente de réécrire un souvenir douloureux de sa mère avec un récit parfait.
Avec Desync, Minerva Marie Navasca traite de deux sujets distincts, mais reliés en même temps.
Tout d’abord, il y a le syndrome de la perfection qui touche souvent les créateurs. On veut que chaque ligne soit parfaite, que chaque mot touche la cible. Mais est-ce que la phrase parfaite sonnera juste?
Cette image est mise en parallèle avec la communication familiale. Restant fidèle à ses origines, la réalisatrice met en scène une discussion typiquement culturelle entre une mère et sa fille : comment cuisiner correctement les plats traditionnels. La cuisine, c’est important aux Philippines. Mais c’est surtout une part importante du transfert de la culture. Mais lorsque la communication émotionnelle est difficile, qu’arrive-t-il dans la cuisine?
La passation des recettes est importante, tout comme le partage de ses émotions. Les espoirs d’une famille qui émigre ne sont pas toujours les mêmes que ceux de leurs enfants. Comment faire pour que les parents et les enfants se comprennent réellement? Voilà ce qui est au centre du récit de Minerva Marie Navasca.
L’utilisation du film dans le film permet à la réalisatrice de placer sa problématique familiale dans un bel élément culturel. Tout se passe dans la cuisine alors que la fille tente de préparer une Tinola qui sera acceptable par sa mère. Mais est-ce possible? Mais est-ce que le problème est vraiment la recette et sa préparation?
Desync est un magnifique film qui montre une part de réalité que vivent beaucoup de filles d’immigrants asiatiques de deuxième génération.
La formation et l’histoire du lac Baïkal en Sibérie sont réimaginées avec une animation faite à la main, mettant en vedette la voix d’une femme bouriate qui peut encore se souvenir de quelques mots de sa langue bouriate-mongole en voie de disparition.
Baigal Nuur est un bel exemple de bonne intention qui donne un résultat décevant.
Œuvre voulant mettre l’accent sur la préservation d’une langue qui disparait, Baigal Nuur est ennuyant. L’animation est très jolie, mais tout ce qu’il y a pour l’accompagner, ce sont des mots nommés un après l’autre, sans contexte.
De plus, les animations ne représentent pas toujours ce qu’on entend au moment où on l’entend. Cela diminue l’effet visuel des mots et l’apprentissage que le spectateur pourrait en faire.
Du coup, l’idée est intéressante et l’animation est belle. Mais le film est raté.
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