« Ne ment jamais à Ha Su-young. »
La vengeance peut s’avérer un excellent prétexte narratif. Alexandre Dumas et Le comte de Monte-Cristo ne diront pas le contraire, tout comme les cinéastes sud-coréens. Il faut dire que le plus célèbre film coréen, Oldboy, fait partie d’une trilogie intitulée la Trilogie de la vengeance. Mais outre les trois films de Park Chan-wook, on peut également noter I Saw the Devil et A Bittersweet Life de Kim Jee-won, The Man from Nowhere de Lee Jeong-beom ou bien No Mercy de Kim Hyeong-jun. Néanmoins, comme ce genre d’histoire peut être surutilisé, les films peuvent devenir de moins en moins originaux, devenant souvent des copies de John Wick. Avec Revolver, le cinéaste Oh Seung-uk amène une proposition différente.
Dans Revolver, on suit Su-young, une détective qui accepte de faire de la prison pour protéger ses collègues corrompus en échange d’une importante compensation financière. Mais à sa sortie, elle est oubliée et sans récompense. Elle va donc poursuivre les personnes corrompues qui l’ont impliqué dans son emprisonnement pour recevoir ce qui lui a été promis.
Oh Seung-uk signe ici son troisième film en 25 ans de carrière. Ses trois films sont à classer dans le genre néo-noir, proposant à chaque fois des histoires de criminels et de police dans une atmosphère sombre. Revolver ne déroge pas à la règle, car, si on pouvait s’attendre à un film dans lequel une ancienne flic se bat pour récupérer son honneur, les scènes d’action ne sont pas autant présentes. En effet, Su-young utilise plus ses talents de détective et son intelligence pour démystifier la toile de corruption dans laquelle elle est prise. Ce qui n’est pas un mal. Mettre en avant les conflits intellectuels plus que les conflits physiques rend le long-métrage unique et offre une expérience différente pour le spectateur lambda.
Le problème, c’est que le résultat n’est pas à la hauteur. La tension que tente de mettre en place le réalisateur n’arrive jamais à nous tenir en haleine. De plus, le scénario manque cruellement de panache, les enjeux n’étant pas assez forts, tout comme les personnages qui sont, pour la plupart, peu caractérisés. Tt la conclusion est loin d’être satisfaisante. La mise en scène est aussi très plate et ne propose pas de bonnes idées. Quand tu es obligé de réutiliser le même indicateur de temps pour indiquer un flashback, c’est soit un cruel manque d’inspiration ou de confiance dans la mise en scène. De ce fait, au lieu d’être pris dans l’intrigue et de se questionner à savoir où le scénario peut mener, on est plus enclin à s’ennuyer devant le film. Le comble, c’est que les véritables scènes d’action, soit dont le film essaye de se détacher, sont plutôt bien pensées, mettant l’emphase sur la stratégie plutôt que les capacités.
On peut aussi noter que malgré la pauvreté des personnages, la distribution s’en tire très bien. Jeon Do-yeon, prix de l’interprétation féminine au 60ᵉ Festival de Cannes pour Secret Sunshine de Lee Chang-dong et qui avait déjà joué pour Oh Seung-uk dans The Shameless en 2015, est excellente en tant que protagoniste, tout comme Ji Chang-wook, surtout spécialisé dans les rôles de gentil garçon, qui se fait plaisir en jouant l’antagoniste. Mais il ne faut pas négliger la présence de Lee Jung-jae, le numéro 456 de Squid Game, en personne, qui joue un petit rôle, mais dont le charisme lui permet de voler la vedette à chacune de ces scènes.
Si la promesse de Revolver de proposer un film de vengeance différent de ce qui se fait au cinéma était alléchante, le film n’arrive pas à se montrer à la mesure de ses attentes. Malgré quelques qualités, son cruel manque de panache en fait un film oubliable, alors qu’il a la possibilité d’être plus que ça.
Bande-annonce
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