« — Celui qui a tué toute sa famille, oui.
— Ah oui, pauvre homme. »
Léa (Delphine Baril) et Christine (Charlotte Laemmel) sont obsédées par l’affaire Paul Bernardin, un homme soupçonné d’avoir tué toute sa famille et disparu mystérieusement. Alors qu’elles partent enquêter dans la maison où a eu lieu la tuerie, les médias annoncent que Paul Bernardin vient d’être arrêté dans le Nord de l’Europe…
Avec Les pistolets en plastique, Jean-Christophe Meurisse propose une comédie sombre qui mêle les genres et qui fera vibrer les spectateurs. Le genre de film qu’on adore ou qu’on déteste.
Les gens ont tendance à dire que les films créent des monstres. Mais n’est-ce pas plutôt les monstres qui créent la fiction? C’est le cas ici, alors que Les pistolets en plastique est inspiré de faits divers.
Uzès (Gaëtan Peau), le quadragénaire qui est arrêté lors de son voyage au Danemark parce que la police le soupçonne d’être Paul Bernardin, un meurtrier recherché accusé d’avoir tué sa femme et ses trois enfants quelques années auparavant, est inspiré de l’histoire de cet homme qui avait été accusé d’être Xavier Dupont de Ligonnès, qui avait commis un quintuple meurtre. Alors qu’Uzès clame son innocence, deux détectives amateurs, Léa et Christine, décident de mener leur propre enquête. Elles connaissent toute l’affaire par cœur et sont convaincues qu’il s’agit du meurtrier recherché. Ces deux femmes ont, elles, été inspirées des sœurs Papin, Christine et Léa, qui ont assassiné leurs patronnes en 1933.
Afin d’illustrer que la réalité est souvent bien pire que la fiction, je laisse la parole au réalisateur (pour ceux qui ne veulent pas connaître un des punchs du film, sauté la fin de la section) :
« Le cinéma est là, je crois, pour montrer la cruauté et le mal. Je tire sur l’élastique. L’énucléation finale n’est pas sortie du délire de l’artiste. La sœur aînée, qui était psychopathe, a énucléé sa patronne avec une cuillère… J’ai conservé ces prénoms pour mes deux héroïnes, petit clin d’œil au fait divers du passé. »
Jean-Christophe Meurisse
Le principal défi dans un film comme celui-ci est de réussir à bien tricoter toutes les intrigues afin de ne pas oublier des personnages en route et ainsi de perdre son spectateur. Et cette gestion des histoires est bien maîtrisée par Meurisse.
Les pistolets en plastique est une comédie noire, dans laquelle on va de l’absurde à l’effrayant. On se balade entre tragédie et comédie de manière permanente.
On pourrait dire qu’il s’agit à 80% d’absurde et à 20% d’horrifique. Mais l’humour décalé touche la cible que ce soit des scènes idiotes comme lorsque Zavatta (Anthony Paliotti) déambule à l’aéroport, sous une musique et un ralenti qui le montre pratiquement en héros pendant qu’il tourne son cure-dents sans l’aide de ses mains, jusqu’à`se gratter l’intérieur de la narine avec, pour finir par avoir le cure-dents coincé dans la bouche; ou des scènes qui frôlent la réalité comme lorsque les deux pauvres flics français (Vincent Dediennne et Aymeric Lompret) tentent de parler avec les policiers danois, mais que clairement, ils ne parlent pas anglais. Vous savez cette chose que l’on a tous fait plus jeune, de simplement prononcer des mots français avec un accent anglais tout en s’imaginant vraiment parler anglais? Ben ça ressemble à ça.
Puis, par moment, surtout vers la fin, on bascule dans les choses atroces, comme cette scène en flashback où Bernardin tue sa famille. Mais le meilleur moment d’horreur c’est plutôt cette scène surréelle dans laquelle les deux femmes enquêtrices amatrices s’en prennent à notre pauvre homme pour le faire avouer. Une séquence qui n’est pas sans rappeler la scène de l’oreille dans Reservoir dogs.
Ainsi, Les pistolets en plastique mélange les genres, comme le fait la réalité, afin d’offrir un petit moment de jouissance au public, malgré quelques longueurs.
La principale force du film vient de ses personnages qui représentent tous un type de personnes un peu décalé, mais tout de même très plausible. Par exemple, Léa représente ce fantasme que l’on peut avoir par moment de se débarrasser de notre vie de famille monotone et de redémarrer à neuf? Fondamentalement, elle s’investit dans cette enquête pour s’échapper de son quotidien de ménagère. Elle aime le projet que propose Bernardin. Quant à Christine, elle incarne le monstre enfoui en chacun de nous, elle fantasme l’homme.
Soyez averti, par contre. Si vous n’aimez pas l’humour noir, vous n’aimerez pas ce film.
Les pistolets en plastique est présenté au FNC les 11, 12 et 13 octobre 2024.
Bande-annonce
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