Aller au cinéma voir un film du grand Kiyoshi Kurosawa, c’est comme revenir à ses souvenirs cinéphiles d’enfance. Il y a plus de 25 ans, il réalisait le troublant et terrorisant Cure (1997) suivi des deux autres thrillers horrifiques Séance (2000) et Kaïro (2001), symbolisant alors une nouvelle vague japonaise, après les maîtres japonais adorés par les critiques de cinéma il y a un demi-siècle : Kenji Mizoguchi, Akira Kurosawa et Yasujirō Ozu.
Un mystérieux site internet semble pousser les gens qui le consultent au suicide…
Pas à la hauteur des attentes
Kiyoshi Kurosawaa toujours puisé son art du côté de la série B, celle des cinéastes inventifs, voire sulfureux japonais des années 1970. Et son dernier film, Cloud, nous amène sur le terrain d’un cinéma entre thriller et comédie, avec un scénario flémard et des personnages peu développés, voire stéréotypés. On suit les aventures de Ryosuke Yoshii, un homme en apparence ordinaire, un geek antihéros qui subvient à ses besoins en revendant des objets plus ou moins contrefaits sur Internet. Il refuse une promotion à son travail et démissionne brutalement pour se consacrer entièrement à ce business lucratif en recrutant un mystérieux assistant. Dans le même temps, il déménage dans un plus grand logement avec sa copine. Peu à peu, il va s’attirer les foudres d’acheteurs qui ont réalisé trop tard l’anarque et cherchent à le localiser pour régler leurs comptes sans diplomatie, c’est-à-dire arme au poing.
Masaki Suda dans Cloud (crédit image : Avec l’aimable autorisation du TIFF)
Dénué de fantastique, pourtant après une promesse au début du film lors d’une incursion d’une ombre fantomatique dans le réel, Cloud s’épuise dans un exercice de style réaliste plutôt macho. Dans Kaïro, réalisé au moment de la bulle Internet, un mystérieux site sur le web poussait les gens qui le consultent au suicide. Dans Cloud, il n’y a pas d’inconnu, de caché et la mise en scène semble statique, embourbée dans un récit manquant d’imaginatif. La scène finale de combats en série B s’étale à l’infini, frisant le grotesque avec tous les malheureux acheteurs décérébrés qui se vengent. Et l’assistant qui sauve son patron donne une vision un peu étrange du travail et de la servitude.
Cela étant dit, quelques personnes dans la salle ont ri ou sursauté et semblent avoir passé un bon moment. Cloud est en demi-teinte, loin du talent reconnu de Kiyoshi Kurosawa.
Cloud est présenté au TIFF les 5 et 6 septembre 2024.
