Lorsque Kaho (Aoba Kawai) et Tomoya (Ryuta Okamoto) annoncent leurs fiançailles lors d’un dîner de célébration avec des amis, ils ne sont pas préparés à l’agitation émotionnelle qui se déchaîne une fois qu’une infidélité antérieure sera révélée. Plus tard dans la soirée, Tomoya est invitée à l’appartement de son ancienne camarade de classe, Takako (Fusako Urabe), conduisant à de nouvelles révélations de passion et d’indiscrétion.
Dans Passion, le premier film de Ryusuke Hamaguchi, on plonge dans la vie d’un groupe d’amis japonais qui sera mis à l’épreuve lorsque la vérité et l’honnêteté se retrouveront à l’avant-scène. Un film qui questionne la valeur du mensonge dans le Japon moderne.
Un film de dialogue
Les films japonais misent rarement sur l’omniprésence des dialogues. Après tout, la langue japonaise est une langue particulièrement efficace, ainsi les échanges sont généralement courts au cinéma. Mais Hamaguchi, lui, développe ses dialogues pour en faire l’essence de ses films.
Donc, les personnages de Passion, comme le sont aussi ceux de ses plus récents films (on peut penser à Drive my car), parlent beaucoup entre eux amenant le spectateur à se questionner à propos de divers enjeux. Mais les mots ne sont pas là pour tout expliquer au spectateur paresseux. Au contraire. Chaque phrase est importante non seulement pour l’histoire du film, mais aussi pour le côté philosophique du film.
Le groupe d’amis
Hamaguchi questionne l’importance de l’honnêteté dans une société qui valorise le secret dans la vie de tous les jours. Mais qu’en est-il donc?
Quelle est la valeur de l’honnêteté?
Au Japon, plus que n’importe où ailleurs, on valorise la politesse et le bien des autres. Cela va jusqu’à ne pas dire la vérité afin d’éviter de blesser l’autre. Je dis bien « ne pas dire la vérité » et non pas « mentir ». Il y a une grande différence. Disons qu’on va surtout éviter de dire certaines choses qui pourraient heurter l’autre ou ne pas être consensuel.
Dans Passion, cette notion est utilisée au niveau des relations de couple pour montrer à quel point cette idée de garder ses petits secrets fait en sorte que tout fonctionne mieux. Pourquoi dire à une amie qui est en couple avec un de ses amis qu’on est amoureux d’elle si ça risque de causer des remous? C’est de là que part le réalisateur. Ce groupe d’amis conserve beaucoup de petits ou gros secrets qui, si on les révèle, détruiront l’équilibre du groupe.
Takako (Fusako Urabe)
Mais qu’arrive-t-il lorsqu’une personne décide de sortir du moule et de libérer ses sentiments? Le chaos. Ainsi, la question au centre du récit est de savoir si c’est mieux d’être honnête, ou s’il vaut mieux respecter cette règle sociétale qui dit qu’il vaut mieux garder pour soi ce qui risque de causer des remous?
Et force est de constater que bien qu’il ne prenne pas explicitement position, Hamaguchi laisse voir que cette norme du silence existe pour une très bonne raison.
Un peu plus…
Avec la sortie en salles de Evil does not exist, Mubi sort le tout premier long métrage de Ryusuke Hamaguchi, Passion. Ce premier film mérite d’être vu puisqu’il met en place le style unique du réalisateur japonais.
Un style qui mise sur les dialogues beaucoup plus que sur les silences. On pourrait probablement dire que Hamaguchi est le plus français des réalisateurs japonais avec ce film qui pavera la voie pour ses œuvres suivantes.
D’ailleurs, chacun de ses longs métrages méritent d’être vus. De notre côté, nous avons vu non seulement Drive my car et Evil does not exist, mais aussi Asako 1 & 2. Toutes de grandes œuvres.
Mais en attendant, je vous invite fortement à voir Passion.
