Drive my car - une

[FCMS] Drive my car — Intimité

« Je sais ce que tu penses. Tu crois qu’on partage la même peine… car on a aimé la même femme. »

Drive My Car - affiche

Alors qu’il n’arrive toujours pas à se remettre d’un drame personnel, Yusuke Kafuku (Hidetoshi Nishijima), acteur et metteur en scène de théâtre, accepte de monter Oncle Vania dans un Festival, à Hiroshima. Il y fait la connaissance de Misaki (Toko Miura), une jeune femme réservée qu’on lui a assignée comme chauffeure. Au fil des trajets, la sincérité croissante de leurs échanges les oblige à faire face à leur passé.

Avec Drive my Car, Ryusuke Hamaguchi offre un mystère captivant, une parabole de la connexion humaine et un road movie sur le chemin de l’amour, de la perte, de l’acceptation et de la paix.

Un théâtre universel

Basé sur la short story de Haruki Murakami, Drive my car met au centre de son histoire la performance théâtrale. Hamaguchi (Asako I & II) utilise à merveille ce thème afin de travailler sur les relations humaines, au-delà des langues. En effet, les comédiens prenant part à l’adaptation de Oncle Vania sont de différentes origines ethniques. Je ne vous apprendrai rien en disant qu’habituellement, les pièces sont jouées dans une seule langue, où les mots et les significations sont compris par tous les interprètes. « Mais lorsque vous enlevez ce sens, les acteurs commencent à réagir aux sons et au langage corporel de l’autre à la place, et les acteurs deviennent plus en phase avec cela. Les acteurs voient et entendent de différentes manières, ce qui permet des performances plus vivantes. Une grande partie de la force a été tirée du matériel de Tchekhov, mais a permis à des réactions plus brutes de se manifester, et c’est très crucial. » Voilà ce qu’expliquait le réalisateur du film.

Drive my car - Un théâtre universel
Il y a même le coréen langue des signes dans la pièce de théâtre

L’effet est saisissant. Le texte est présenté en japonais et en anglais sur le mur derrière la scène, alors que les comédiens jouent en japonais, cantonais, mandarin, tagalog, indonésien, allemand et malaisien.

Le théâtre devient aussi le lieu des confrontations et l’excuse pour amener tous ces personnages à interagir entre eux. D’ailleurs, Hamaguchi en profite pour glisser une réplique faisant état de l’attitude de plusieurs Japonais envers les étrangers. 

Le comportement humain

Drive my Car pourrait presque être vu comme une étude sur les comportements humains au niveau des relations interpersonnelles. D’ailleurs, le film commence d’une manière assez étonnante, alors qu’une femme en contre-jour raconte un récit érotique à un homme allongé. On comprendra éventuellement qu’il s’agit de Yusuke Kafuku et de sa femme Oto (Reika Kirishima). Le réalisateur développe cette relation de couple ambigüe pendant les 49 premières minutes du film. Puis, arrive le générique de début (mieux vaut tard que jamais) et l’histoire bascule. Le couple devient une trame de fond alors que le réalisateur nous amène dans ce qui deviendra une relation tout aussi ambigüe entre Kafuku et le jeune acteur et amant d’Oto. 

Drive my Car - comportement humain
Yusuke Kafuku (Hidetoshi Nishijima) et Misaki (Toko Miura)

La question à laquelle doit répondre le personnage est la même qui trottera dans la tête du spectateur tout au long des 2 heures 10 qui suivront : comment agir envers cet homme? Le détester? L’admirer? Lui en vouloir? Tenter de comprendre? Mais surtout, sa relation avec l’acteur amènera Kafuku à réfléchir sur sa relation avec son épouse. 

En parallèle, se met en place la relation de substitution père-fille que développe Kafuku avec sa jeune conductrice, Misaki. Avez-vous déjà remarqué que l’habitacle d’une voiture devient souvent un lieu de confession, un endroit où la discussion peut facilement devenir plus intime, plus personnelle? Dans Drive my Car, c’est dans cette voiture que les discussions les plus importantes ont lieu. De plus, visuellement, l’image elle-même se met à bouger parce que l’espace bouge. « Si vous regardez juste deux personnes parler dans un café, c’est très différent de regarder deux personnes parler dans une voiture. Aucun plan dans une voiture n’est vraiment statique; le paysage qui défile derrière devient partie intégrante de l’image. C’est hypnotisant, d’une certaine manière, et je pense que cela aide le public à continuer d’écouter ce dont les gens parlent. Cela arrive aussi dans la vraie vie aux gens, l’espace de la voiture permet de continuer à parler. »

C’est donc dans cet espace restreint que la relation entre Kafuku et Misaki prendra tranquillement de son importance. Ces deux personnages en apparence si loin l’un de l’autre se découvriront des points communs qui les rapprocheront…

Un peu plus…

Je réalise que je ne dis pas grand-chose de très précis… Mais Drive my car est un film dans une classe à part. Un film de presque 3 heures (il manque 1 minute ;-)) ne m’a jamais paru aussi court. J’étais tout simplement saisi de l’atmosphère, des dialogues et de l’originalité du scénario que je n’ai simplement pas remarqué le temps passer. 

Drive my car - Un peu plus

Entre les répétitions qui avancent et la routine qui s’installe entre Yûsuke, Misaki et la vieille Saab fonctionnant de plus en plus comme un confessionnal inattendu pour le conducteur et le passager, on ne réalise que plus loin toutes les informations sur les relations humaines que le film nous a envoyées.

Je terminerai sur une petite anecdote (parce que c’est amusant les anecdotes de tournage). Pour ce faire, je laisse la parole au réalisateur : 

« Nous avons rencontré un obstacle inattendu lorsque nous avons appris que Toko ne savait pas conduire! Elle n’avait pas de permis. Mais je croyais qu’elle aurait l’air d’être capable d’apprendre rapidement. »

Oui, parfois on prend de gros paris quand on fait un film. Comme celui d’embaucher une femme qui ne sait pas conduire pour un rôle qui demande d’être au volant d’une vraie voiture pendant plus de 80% du temps.

Drive my Car est présenté au Festival Cinéma du Monde de Sherbrooke, du 7 au 14 avril 2022.

Bande-annonce

Fiche technique

Titre original
ドライブ・マイ・カー
Durée
179 minutes
Année
2021
Pays
Japon
Réalisateur
Ryusuke Hamaguchi
Scénario
Ryusuke Hamaguchi
Note
9.5 /10

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Fiche technique

Titre original
ドライブ・マイ・カー
Durée
179 minutes
Année
2021
Pays
Japon
Réalisateur
Ryusuke Hamaguchi
Scénario
Ryusuke Hamaguchi
Note
9.5 /10

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