« Parfois, The Pink Opaque semble plus réel que ma propre vie. »
Owen (Ian Foreman), un adolescent, essaie juste de survivre en banlieue lorsque son camarade de classe lui présente une mystérieuse émission télévisée de fin de soirée – une vision d’un monde surnaturel sous le leur. Dans la pâle lueur de la télévision, la vision d’Owen de la réalité commence à se fissurer.
Jane Schoenbrun frappe fort avec I Saw the TV Glow, un film profondément original qui poursuit son exploration des thèmes de la transidentité et de la dysphorie de genre. Après We’re All Going to the World’s Fair (2021), elle nous offre un long métrage hypnotisant, produit par Emma Stone et Dave McCary, et distribué par A24, qui place les expériences transgenres au cœur de la narration cinématographique.
Quand la télévision devient un refuge
Le film nous plonge dans la vie d’Owen, incarné par Ian Foreman puis par Justice Smith, un adolescent solitaire des années 90 dont la mère est en phase terminale d’un cancer. Owen vit dans une banlieue morne et se sent étranger à sa propre existence, son quotidien terne accentuant son sentiment de déconnexion. Un jour, il fait la connaissance de Maddy (Brigette Lundy-Paine), une lycéenne fascinée par l’émission télévisée The Pink Opaque. Cette rencontre marque le début d’une aventure unique.
Cette série, mélange de Nickelodeon Snick et Buffy contre les vampires, devient pour Owen et Maddy bien plus qu’un simple divertissement. Cette série est leur refuge, brouillant en permanence les frontières entre la réalité et la fiction. Chacun de leurs visionnages devient une plongée dans une réalité alternative qui leur permet de fuir une société qu’ils perçoivent comme répressive. Bien que cela ne soit jamais dit explicitement, Owen y trouve un espace pour explorer son identité de genre, chaque épisode agissant comme un miroir révélateur de ses luttes internes.
Un Miroir pour l’Identité
Pour Owen, chaque épisode de The Pink Opaque devient une quête personnelle pour découvrir son identité. L’émission lui permet de voir au-delà des apparences et de reconnaître les aspects de lui-même qu’il a longtemps ignorés. À travers les aventures des héroïnes, il trouve le courage de faire face à ses propres démons intérieurs et de survivre dans un monde de plus en plus oppressant. De son côté, Maddy utilise la série comme un refuge face aux abus de son beau-père, puisant la force nécessaire pour affronter sa réalité difficile. Pour elle, The Pink Opaque est bien plus qu’une simple distraction; c’est une source de réconfort et de résistance.
Schoenbrun excelle à communiquer l’expérience transgenre par un langage cinématographique subtil plutôt que par une représentation frontale. Owen, fasciné par cette émission destinée aux adolescentes, illustre bien le désir de connexion et la quête d’identité des adolescents transgenres. Les thèmes de l’identité cachée et du besoin de vérité personnelle sont abordés avec une profondeur émotive remarquable. Si I Saw the TV Glow est considéré comme un film d’horreur, cette horreur est existentielle, incarnant la terreur de la perte d’identité dans le confort suburbain.
Le film est visuellement captivant, avec un filtre surréaliste et des néons évoquant l’esthétique de la télévision canadienne des années 90. La bande sonore originale, imprégnée de cette époque, accentue la dissociation d’Owen entre la fiction et sa réalité quotidienne. Cette dissociation trouvera une résonance particulière chez les personnes transgenres, offrant une représentation rare et précieuse de leur expérience.
Des faiblesses narratives
Cependant, I Saw the TV Glow présente quelques faiblesses. La métaphore centrale, bien que forte, peut parfois prendre trop de place, au détriment de l’histoire. Owen, en tant que personnage principal, reste trop passif, ce qui peut frustrer le spectateur. On attend qu’il réagisse et prenne des décisions, mais cela n’arrive pas vraiment. Ce choix narratif, même s’il est intentionnel, peut rendre le film difficile à suivre pour certains. Le style énigmatique de Schoenbrun, bien que tempéré par rapport à son précédent film, ralentit parfois le rythme. Le monologue de Maddy dans le planétarium, bien que superbement joué, dévoile trop clairement la métaphore du film, rendant l’intrigue moins captivante.
I Saw the TV Glow est un film qui mérite d’être vu et discuté. Il peut être déroutant et exigeant, mais il offre une expérience sensorielle et émotionnelle unique. Jane Schoenbrun continue de prouver qu’elle est une voix essentielle dans le cinéma contemporain, capable de capturer les complexités de l’identité transgenre avec une authenticité et une créativité remarquables.
