AUCKLAND, NEW ZEALAND - DECEMBER 07: A photo of missing British woman Grace Millane is displayed ahead of a press conference on December 07, 2018 in Auckland, New Zealand. Police are investigating the disappearance of 22-year-old British woman Grace Millane after last been seen on Saturday December 1 in Auckland. (Photo by Hannah Peters/Getty Images)

The Lie — Dans le documentaire, rien de nouveau

« I am the only person that will actually know, deep down, what happened behind that door. »
[Je suis la seule personne qui peut réellement savoir ce qui s’est passé derrière cette porte.]

Documentaire sur le crime réel du meurtre de Grace Millane suite à un rendez-vous Tinder en 2018, une affaire qui a servi de miroir à une société confrontée à un problème de violence envers les femmes.

Qui était Grace Millane?

Grace Emmie Rose Millan avait 21 ans. Elle vivait à Wickfort en Angleterre. Elle venait de recevoir son diplôme universitaire en publicité et marketing. 

The Lie - Qui était Grace
Grace Millane

Grace provenait d’une famille aimante. Elle avait deux frères et une bonne relation avec ses parents. Elle était aussi en contact fréquent avec sa famille élargie.

Grace voulait prendre une année sabbatique pour voyager. Après avoir été six semaines en Amérique du Sud, elle a débuté son séjour de deux semaines en Nouvelle-Zélande, un des pays les plus sûrs pour les touristes.

Le 1er décembre 2018, la veille de son 22e anniversaire, Grace Millane a été vue pour la dernière fois, à 21h41 par une caméra de surveillance. 

Sous l’œil de la caméra

The Lie raconte les dernières heures de vie de Grace Millane. Il nous raconte également l’enquête qui s’en est suivie, suite à l’alerte lancée par ses proches, inquiets que la jeune fille ne réponde à aucun de leurs messages pour célébrer son anniversaire. 

AUCKLAND, NEW ZEALAND - DECEMBER 06: Posters asking for information on British backpacker in shops and on light poles on December 06, 2018 in Auckland, New Zealand. Police are investigating the disappearance of 22-year-old British woman Grace Millane after last been seen on Saturday December 1 in Auckland during a trip to New Zealand. She was staying at the X Base Back Packers hostel in downtown Auckland and was last seen on CCTV footage at the SkyCity complex in the city centre. (Photo by James D. Morgan/Getty Images)
Affiches demandant des informations sur les routards britanniques dans les magasins et sur les lampadaires le 6 décembre 2018 à Auckland, en Nouvelle-Zélande – Photo by James D. Morgan/Getty Images

Pour son film, la réalisatrice Helena Coan utilise une approche narrative intéressante. Le documentaire est entièrement présenté à travers les caméras de surveillance de la ville, les vidéos d’entrevues de la police, les entrevues télé et les vidéos du procès du tribunal. La narration des gens impliqués dans l’enquête, que ce soit les policiers responsables du dossier, les proches de Grace ou des témoins du procès, se fait toujours en entrevue hors-caméra. Comme si la réalisatrice tentait de nous montrer les faits en toute objectivité, à travers les images de caméras « neutres » (caméra de surveillance de l’hôtel, magasin, CCTV, etc). 

Ce procédé était un pari risqué, car ce genre de réalisation aurait pu créer une distance entre le sujet et le public dû au côté froid et distant que nous offrent les caméras du récit. Heureusement, la réalisatrice parvient à capter l’intérêt du spectateur dès le départ et de l’inciter à porter attention à chaque image, pour ne perdre aucun détail de l’enquête. Invitant ainsi les gens à ne pas juste observer, mais à examiner, donc s’impliquer dans le dossier.

Malheureusement, outre la réalisation prenante, le documentaire n’arrive pas à dépasser le statut de série télé d’investigation policière. 

Ce qu’on aurait pu dire de plus

L’histoire de Grace Milliane est horrible. Elle est un exemple de plus sur la violence faite aux femmes encore à ce jour. Mais, outre nous montrer les détails de l’enquête et du procès, la réalisation et son film ne franchissent jamais le pas pour approfondir un sujet pertinent.

Lors du procès, on aborde la défense du rough sex (le sexe agressif ou violent) pour tenter de montrer que le meurtrier n’avait pas l’intention de tuer Grace et que c’était un accident. Il aurait été intéressant de démontrer davantage les conséquences que ce genre de défense peut causer pour les victimes de violences. Le principe est de retourner le blâme sur la victime et de déresponsabiliser l’agresseur. Cependant, ce point est abordé au-delà de la moitié du film et ne semble que survolé. 

WELLINGTON, NEW ZEALAND - DECEMBER 12:  Candles and flowers from members of the public surround a photo of British backpacker Grace Millane during a vigil at Civic Square on December 12, 2018 in Wellington, New Zealand. The body of 22-year-old Grace Millane was found in a section of bush just near Scenic Drive in West Auckland's Waitakere Ranges on Sunday, following an extensive search for the British tourist. She was seen on Saturday December 1 at the CityLIfe hotel in Auckland. A 26 year old man appeared in Auckland District Court on Monday charged with her murder. The judge granted a suppression order prohibiting the publication of the accused's name.  (Photo by Hagen Hopkins/Getty Images)
Des bougies et des fleurs du public entourent une photo de la routarde britannique Grace Millane lors d’une veillée à Civic Square le 12 décembre 2018 à Wellington, en Nouvelle-Zélande – Photo par Hagen Hopkins/Getty Images

Était-ce l’intention de la réalisatrice de dénoncer cette défense? Le documentaire finit sur une statistique sur ledit sujet, donc cela laisse sous-entendre que c’était effectivement son intention. Si tel est le cas, pourquoi aborder le sujet aussi tard dans le film? 

Voulait-elle faire un portrait sur la victime, Grace Milian, et nous montrer les répercussions de sa mort sur ses proches, comme l’avait fait le documentaire Dear Zachary? Si je dois comparer les deux films, Dear Zachary accomplit davantage son objectif, car on n’a pas l’impression de mieux connaître Grace Millan ou sa famille après avoir vu The Lie.

Il est aussi possible que nous soyons trop sollicités par ce genre d’histoire. Le genre du true crime est en effervescence depuis les dernières années et nous n’avons jamais eu autant de films, livres, séries et balados qui racontent le genre d’histoires que Grace Millan a vécu. Et, aussi horrible soit son histoire, on peut aussi se demander quelle est la pertinence de faire un documentaire sur son crime. Que pouvons-nous dire, qui n’a pas été déjà dit, tristement, des centaines de fois? 

Et, sans diminuer la tragédie ou l’impact de son meurtre, plusieurs questions auraient pû être élaborées. On aurait pu se demander si le dossier de Grace Millan n’a pas eu un traitement privilégié du fait qu’elle est une jeune touriste britannique blanche. En tant que société, avons-nous un biais qui fait qu’une jeune femme blanche suscite davantage notre sympathie? Dans un pays où les femmes maories ont 2 fois plus de chance d’être victimes de violence qu’une autre femme néozélandaise, la question aurait pu être abordée.

Autre questionnement : L’affaire a pu être résolue principalement grâce aux caméras de surveillance installées dans la ville d’Auckland. La technologie a permis d’élucider le crime, ce qui est fantastique, mais est-ce que cela implique que chaque ville devrait avoir autant de caméras de surveillance pour assurer la sécurité de ses habitants?

Ou encore : Selon le documentaire, l’accusé n’en était pas à ses premiers actes de violences. Il aurait usé de violences physiques et sexuelles avec d’anciennes partenaires. Est-ce que ses victimes ont porté plaintes? Ont-elles été entendues? Est-ce que le système judiciaire a cru en leurs témoignages? Y a-t-il une faille dans cette société où l’on rapporte que 1 femme sur 3 sera victime de violence aux mains d’un de ses partenaires dans le cours de sa vie*. Ou, est-ce que nous sommes encore dans une société trop tolérante envers la violence envers les femmes?

Car un autre aspect survolé du documentaire est la réaction du public. Au-delà de la sympathie et de l’horreur, il y avait aussi le jugement et les accusations envers Grace, qui avait « osé » rencontrer un homme sur Tinder, pour célébrer son anniversaire dans un pays où elle voyageait seule. 

Encore une fois, ce qui est arrivé à Grace Millan est horrible. Cependant, ce documentaire ne s’aventure pas au-delà d’une enquête télévisée, outre une réalisation intéressante. Il est dommage de se dire que ce film n’est qu’une goutte de plus dans un océan.

Bande-annonce  

*Statistique provenant de l’article, It’s not Ok, du 24 octobre 2020

Fiche technique

Titre original
The Lie: The Murder of Grace Millane
Durée
104 minutes
Année
2023
Pays
Royaume-Uni et Nouvelle Zélande
Réalisateur
Helena Coan
Scénario
Tom Blackwell, Nic Guttridge et Matthew Metcalfe
Note
6 /10

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Fiche technique

Titre original
The Lie: The Murder of Grace Millane
Durée
104 minutes
Année
2023
Pays
Royaume-Uni et Nouvelle Zélande
Réalisateur
Helena Coan
Scénario
Tom Blackwell, Nic Guttridge et Matthew Metcalfe
Note
6 /10

© 2023 Le petit septième