« What is the appropriate amount of grief? »
[Quelle est la quantité de deuil appropriée?]

À la suite de la mort de son mari, Kate (Sonja Smits) se réfugie dans un monde empli de vodka, de peine – et de costumes d’Halloween. Quand elle se lie d’amitié avec trois adolescents solitaires, ses amis et sa famille sont consternés alors qu’elle semble découvrir la femme qu’elle pourrait devenir. 

Comment surmonter le deuil d’un être proche? Quelles peuvent être les réactions de sa famille, lorsque la peine envahit le quotidien? Enfin, comment parvenir à rester soi-même, au sein d’une existence fragilisée? Toutes ces questions figurent dans Better Days, le dernier long-métrage de la réalisatrice canadienne Joan Carr-Wiggin. 

Une femme (trop) entourée 

Kate, enseignante d’Anglais à l’université, doit surmonter la mort inattendue de son mari, Eric. L’événement survient le jour de son anniversaire et à la suite de plus de trente ans de vie commune. Cette femme, d’apparence rangée, se révèle alors assez excentrique au cours de cette nouvelle phase de son existence. Ses enfants, Leah et Jason, ne manqueront pas de lui prodiguer moult conseils et recommandations, tandis que Kate souhaite avant tout vivre le deuil à sa façon, avec tranquillité et liberté. Comme dans le précédent film de Joan Carr-Wiggin, une femme est au centre d’une famille étouffante, qui peine à comprendre ses besoins et envies. 

Dans Better days, cette enseignante délaisse momentanément son travail, et se lie d’amitié avec trois adolescents à qui elle prêtera des costumes appartenant à son défunt mari et elle-même. Par ailleurs, une amie quelque peu insistante et superficielle, Jenna, vient régulièrement lui rendre visite, et l’assomme de remarques futiles et déplacées. Tout comme Leah et Jason, sa générosité est bienveillante, mais envahissante. Quitter sa maison le temps d’une conversation avec Dylan, Nisha et Hector, ses trois nouveaux amis, permet à Kate de s’extérioriser et de s’échapper d’un nouveau quotidien morne et étouffant.

Être là où on ne l’attend pas 

Kate semble voir son existence lui échapper, alors qu’autour d’elle ses proches sont eux-mêmes pétris de contradictions. Ses enfants la pensent forte et solide, mais ne peuvent s’empêcher d’angoisser face au moindre écart de leur mère, qui peine alors à les rassurer. Kate surprend, réagit de façon directe, entre colère, apathie et provocation. 

Au sein d’une société normée, se costumer, parler seule ou encore délaisser son travail choque. Cependant, pourquoi ne pas laisser chacun libre de gérer sa peine comme elle ou il le peut, au lieu de décider pour ses proches, de façon intrusive et maladroite? Le film est construit en flash-backs, avec des regards caméras de l’héroïne principale qui viennent entrecouper les scènes du passé. Kate adopte un humour noir et sardonique, face aux recommandations de ses proches qui n’auront pas les effets escomptés. Avec son dernier long-métrage, la réalisatrice canadienne nous dévoile un nouveau personnage de femme qui vit une période délicate, mais transitoire, subissant la pression de sa famille et peinant à faire entendre ses désirs. L’héroïne, Kate, y parviendra malgré tout, en déjouant les souhaits et conseils de ses proches. Le rôle principal est porté par Sonja Smits, dont l’ambiguïté sied parfaitement à l’ambivalence du personnage. Joan Carr-Wiggin parvient à faire émerger humour noir et provocation au sein d’une trame mêlant habilement comédie et drame. Les personnages secondaires sont tout aussi bien travaillés et interprétés, souvent malhabiles bien qu’empreints de bonnes intentions. 

Enfin, le scénario finement écrit est mis au service d’une mise en scène à la fois sobre et dynamique.

Bande-annonce