« My father always said that if we were the toughest, the strongest nothing could ever hurt us. I believed him. We all did. »
[Mon père a toujours dit que si nous étions les plus durs, les plus forts, rien ne pourrait nous faire du mal. Je l’ai cru. Nous l’avons tous cru.]
Basée sur la vie des frères Von Erich, on raconte l’histoire touchante de frères qui donnèrent tout pour ramener la ceinture du champion mondial de lutte et être les plus forts.
« Le prix à payer pour être le meilleur en vaut-il la peine » est la question que je me posai lorsque j’ouvris les portes de la salle les yeux encore gorgés de larmes des dernières heures (et de plusieurs subséquentes) suite au visionnement. The Iron Claw n’est pas un film d’action, cela malgré que les personnages pourraient tous incarner des héros de ce genre cinématographique. L’œuvre raconte l’histoire d’hommes forts et costauds, mais avant tout d’hommes; de frères; de fils; de père; de force et de ce qu’il en coûte. Le récit ne fait pas l’éloge de ceux qui se défoncent pour être les meilleurs, en fait, c’est plutôt une histoire sur l’humilité. Si la persévérance est inutile, elle se transforme en folie et la plus pure des passions devient une obsession qui dévore tout sur son passage.
Avant toute chose, je dois préciser que je ne suis ni un fan de biopic ni un fan de films de sport, mais The Iron Claw, réalisé et écrit par Sean Durkin, m’a tout simplement sidéré. L’histoire raconte la vie des frères Von Erich, vedettes du monde de la lutte professionnelle, et leur quête commune de ramener la ceinture du champion mondial pour eux, mais aussi leur père et entraîneur, interprété par Holt McCallany, le légendaire Fritz Von Erich. Le film porte le nom de la célèbre prise signature de Fritz lorsqu’il était sur le ring, attaque finale qu’il lègue à ses fils pour qu’eux aussi puissent participer à son héritage.
La poigne de fer, c’est exactement la fermeté et la rigidité avec lesquelles Fritz élève ses enfants pour qu’ils deviennent les meilleurs, ce qui les écrase peu à peu, un à un. Pourtant, ce n’est pas un homme violent ni un homme qui n’aime pas ses fils, mais son entêtement à remporter la ceinture du champion est tout simplement trop fort. Sans qu’il puisse en prendre compte, ses fils Kevin, Kerry, David et Mike se donnent littéralement corps et âme pour une quête qui ne leur appartient pas vraiment et qui causera à tous des dommages irréversibles.
Pour un univers qui semble véhiculer le combat comme un spectacle, les thématiques abordées sont ancrées dans l’émotivité et le cheminement intérieur créant une atmosphère dichotomique où le noir et le blanc de la vie se suivent et se succèdent. Cela aide à mettre en valeur qu’un combat n’est pas que deux hommes qui s’affrontent sur le ring, mais aussi deux idées qui ébranlent le fondement de notre réalité (comme le plancher du ring, il faut avoir une certaine souplesse si l’on ne veut pas se blesser). Le film débute dans ces mêmes tons pour prendre des couleurs, suite à l’introduction, illustrant à merveille comment la pensée est forgée à l’enfance avec peu de nuance. C’est lorsque l’on rencontre les obstacles de la vie que sont testées nos croyances, notre détermination, et notre valeur; le panorama se colore de toutes ces teintes nuancées dont l’existence regorge sans l’avoir jamais soupçonné.
Une musicographie recherchée plonge le spectateur dans le monde des Von Erich et de la lutte professionnelle avec style et efficacité. En ce point, l’énergie du sport et le plus que magnifique lien fraternel qui unit ces êtres maintiennent l’intérêt de l’auditoire avec force donnant la sensation constante d’assister à une soirée de lutte en chair et en os. Les retournements dramatiques sont raides et viennent percuter le cœur avec la lourdeur d’un colosse de 100 kilos s’abattant sur son opposant depuis un saut du troisième câble; à l’opposé, les moments de joie élèvent l’âme rappelant la clameur d’une foule en délire.
Les décors et les costumes sont tout simplement époustouflants. J’ai eu un faible pour la scène où l’on montre Kevin Von Erich, interprété par le méconnaissablement musclé Zac Efron, alors qu’il est à la station de télévision. On ne peut que ressentir de la nostalgie devant la beauté et la simplicité des moyens de l’époque que l’on considérait à ce moment comme le nec plus ultra. Je profite de cette mention de Monsieur Efron pour mentionner que je suis allé voir le film un peu à l’aveuglette et en le voyant à l’écran j’ai cru que c’était un biopic sur la carrière de Lou Ferrigno.
Le film The Iron Claw en est un qui m’a fortement marqué cette année. Son exécution sans faille et le genou qu’il dépose au sol avec humilité m’obligent à lui retourner une note parfaite; je ne vois tout simplement pas comment j’aurais fait les choses autrement. Le cinéma, tout comme la lutte professionnelle, n’est pas que du spectacle; ça demande beaucoup de travail sans n’être pour autant que du sang, de la sueur et des larmes (Churchill aurait-il fait un bon lutteur 🤔). Ce sont deux réalités qui coexistent tout au long du film qui nous permettent d’apprécier davantage le réalisme des personnages et du récit, mais aussi le talent derrière l’œuvre.
Il reste un dernier point à régler, celui du legs. Qu’avons-nous hérité de nos parents et qu’allons-nous remettre à nos enfants? Le début du film démontre comment dans leur jeunesse les frères Von Erich furent marqués par les paroles en l’air de leur père au sujet de la force et de l’invulnérabilité. Les mots entrent en eux avec tellement de véracité (c’est tout de même leur père aimé et vénéré) que ceux-ci forgeront leurs caractères en fonction des attentes de cette imposante figure paternelle. Aucun parent ne devrait avoir à enterrer son enfant, encore moins en être la cause, même si c’est de façon indirecte. Les idées sont puissantes, bien plus que le physique, et le film ne manque pas d’en démontrer les effets tant bénéfiques que néfastes.
Je finis l’article et il me vient à l’esprit l’image d’une griffe tout aussi redoutable que celle des Von Erich. Vous rappelez-vous du film Liar, Liar avec Jim Carrey? Je me souviens que lui aussi utilisait « the claw ». Il est à la fois amusant et intéressant de s’arrêter pour apprécier les coïncidences étranges quand elles se manifestent. Pour l’un, la griffe est un jeu qui l’aide à se rapprocher de sa famille; pour l’autre, un lourd héritage à porter. L’un détruit sa famille avec ses mensonges tandis que l’autre la détruit avec sa vérité. J’aimerais que vous puissiez continuer l’observation de cette symétrie par vous-mêmes, mais pour cela il faut voir The Iron Claw au cinéma! En ce temps des fêtes, ne manquez pas la chance de vous rapprocher de ceux que vous aimez!
Bande-annonce
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