« Pourquoi suis-je à l’intérieur du corps de ce meurtrier? »
L’inspecteur des homicides Jae-hwan est déterminé à mettre la main au collet du dangereux tueur en série Jin-hyuk, qui a tué de nombreuses victimes, incluant le beau-frère du policier. Enragé et assoiffé de vengeance, Jae-hwan est prêt à tout pour traquer Jin-hyuk. Au bout d’une poursuite effrénée, il parvient enfin à le capturer, mais ils ont un accident qui changera leur existence pour toujours. Jae-hwan se réveille à l’hôpital et réalise que quelque chose cloche : il a désormais l’apparence de Jin-hyuk, car l’esprit de l’un se trouve dans le corps de l’autre et vice-versa. L’inspecteur devra trouver un moyen de retrouver sa propre identité afin de sauver sa famille et de se débarrasser de son ennemi mortel une fois pour toutes.
Une machine à vœux qui fait grandir un jeune garçon en Tom Hanks dans Big, un biscuit chinois qui change le corps de la fille Lindsay Lohan avec sa mère Jamie Lee Curtis dans Freaky Friday ou une opération qui a fait changer les visages de Nicolas Cage et John Travolta dans Face/Off, les histoires de « body swap » sont légion dans la fiction. À un point où ces histoires peuvent vite devenir clichés et redondantes, la plupart des films étant des comédies qui jouent sur le contraste de changement de personnalité.
Il existe cependant des films qui tentent de modifier la formule. On peut citer le précédemment nommé Face/Off, se concentrant plus sur l’action, les reboot de Jumanji qui utilisent le contexte du jeu vidéo et de l’avatar pour explorer le concept ou bien le film Blumhouse Freaky, mélangeant les films de Body swap avec le genre du slasher. De mon côté, je vous conseille Your Name, film d’animation japonais de Makoto Sinkai absolument magnifique et utilisant son concept de manière intelligente et touchante. Le film coréen Devils de Kim Jae-Hoon semble vouloir apporter sa propre pierre au genre.
Ici, les deux personnes qui se voient échanger leur corps sont Jae-hwan et Jin-hyeok. Le premier est un détective qui recherche activement le second; un dangereux tueur en série qui est responsable de la mort du partenaire du policier. De manière mystérieuse, les deux viennent à échanger de corps. Le policier se retrouve dans la peau du criminel qu’il vient d’arrêter qui lui profite de sa nouvelle position pour faire chanter Jae-hwan et lui faire chercher ses partenaires qui l’ont trahi.
À première vue, le film parait être un film « body swap » assez standard. Si l’aspect criminel contre policier le rend plus intéressant que d’autres, il rappelle la dualité entre John Travolta et Nicolas Cage dans Face/Off. De plus, le film s’inspire aussi des films coréens mettant à avant la confrontation en flic et tueurs en série, on pense notamment à I Saw the Devil de Kim Jee-won auquel il reprend la brutalité et la violence de certaines scènes. Le récit reste quand même prenant à suivre.
Cette histoire de body swap fonctionne aussi grâce aux interprètes principaux, soit Jang Dong-yoon, que l’on a pu voir récemment dans Project Wolf Hunting, qui joue le tueur et Oh Dae-hwan qui joue le policier. Chacun est bon dans son rôle respectif, mais amène une autre tournure quand ils se retrouvent dans le corps de l’autre, comme le psychopathe impulsif qui devient plus calme ou le policier honorable qui montre un visage manipulateur.
Mais le récit souffre un peu du manque de punch, notamment dans sa mise en scène qui n’est pas aussi efficace qu’elle devrait être pour un thriller. Cela s’explique surtout par le fait qu’il s’agit du premier long-métrage de son réalisateur, et donc qu’il n’a pas encore totalement établi son style derrière la caméra. Il y a cependant quelques scènes avec une lumière et une photographie intéressante, et les scènes d’action ne sont pas trop mal filmées.
Cependant, l’histoire fait un bond incroyable dans sa deuxième partie. Je ne veux pas gâcher votre plaisir et divulguer ce qui se passe, mais le film prend un tournant inattendu et surprenant. D’un coup, tout ce qu’on pensait établi est tout de suite retourné et nous est présenté sous un nouveau souffle.
Le film fait ce que les meilleurs films coréens excellent à faire, c’est-à-dire de retourner le récit de base en plein milieu du film pour un résultat à la fois surprenant, donnant l’impression que l’on regarde deux films en un. C’est un procédé que le cinéma coréen utilise régulièrement, ce qui le rend unique face à d’autres industries plus traditionnelles comme Hollywood. Et si ce n’est pas la même maîtrise que Park Chan-wook dans The Handmaidden ou Decision to Leave, Devils l’utilise avec brio. Il y a juste le climax qui est un peu décevant et qui manque, lui aussi, d’intensité.
Devils est présenté à Fantasia le 26 juillet 2023.
Bande-annonce
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