En Corée du Sud, il y a trois cinéastes qui trônent au-dessus de l’industrie cinématographique : Bong Joon-ho, Parck Chan-wook et Kim Jee-woon. Ils ont tous les trois défini ce qu’est le cinéma coréen actuel et l’ont popularisé partout à travers le monde, à un point où Hollywood les a engagés pour réaliser des films et des séries. Cependant, alors que ces trois noms font briller le cinéma coréen, de plus jeunes réalisateurs tentent de laisser leur trace dans le milieu. On peut citer Yeon Sang-ho (Train to Busan), Na Hong-jin (The Wailling, The Chaser) ou bien Lee Won-tae (The Gangster, the Cop, the Devil). Celui qui nous intéresse aujourd’hui se nomme Park Hoon-Jung.
Dans une industrie qui met souvent en scène des films d’action sombres et violents, le réalisateur est parfaitement dans sa zone de confort. C’est à lui que l’on doit le scénario de l’incroyable I Saw the Devil de Kim Jee-woon. Parmi les films qu’il a réalisés, il a été reconnu des critiques avec New World en 2013 ainsi que The Tiger en 2015, mais il a aussi fait le tour des festivals de cinéma de genre avec The Witch: Part 1, The Subversion et The Witch: Part 2. Son plus récent film, The Childe, s’apprête à sortir sur les écrans nord-américains.
Ce film suit Marco, un jeune boxeur Kopino (métis coréen et philippin) qui a la chance de sauver sa mère malade quand son père coréen qui l’a abandonné souhaite le rencontrer. Il sera cependant pris dans un complot familial, mais surtout pris en chasse par un assassin mystérieux appelé le Nobleman.
Plus que Marco, c’est ce dernier qui est la véritable star du film. En effet, ce personnage est assez similaire à celui d’Anton Chigurh de No Country for Old Men, dans le sens que les deux personnages sont des tueurs psychopathes poursuivant sans relâche le personnage principal. Mais si Chigurh reste silencieux et sans remords, à la manière de l’archétype du mal inarrêtable, le Nobleman est, quant à lui, beaucoup plus bavard, ouvert et a un comportement excentrique, ce qui lui donne un caractère beaucoup plus dangereux et imprévisible. Le personnage reste très divertissant à suivre et amène la grande majorité de l’intérêt du film. C’est aussi une brillante idée de le faire incarner par Kim Seon-ho, un jeune acteur surtout connu pour les dramas coréens à la télé comme Hometown Cha-Cha-Cha et qui trouve là son premier rôle au cinéma. Le contraste marche cependant beaucoup mieux pour un public coréen qui suit ce genre d’émission plutôt pour des spectateurs occidentaux.
Le personnage permet aussi au film de transmettre son message sur les classes sociales, notamment celui sur les riches ne cherchant qu’à exploiter les plus pauvres. Le demi-frère et la demi-sœur de Marco, soit les autres méchants du film, en sont la preuve. Dans une version trash de Succession, les deux utilisent Marco pour leur propre objectif égoïste. Ils n’hésitent pas à l’appeler « le cabot » à plusieurs moments. Le Nobleman amène, quant à lui, une sorte de version monstrueuse de l’image des riches. Il est bien habillé, conduit des voitures de luxe, est outré lorsque ses effets dispendieux sont souillés et apprécie prendre le dessus sur ses victimes. Ce serait comme si Zuckerberg devenait un tueur en série. Tous ces personnages font contraste avec le garçon de rue et la situation de métis de Marco, qui ne cherche qu’à survivre dans tout ce bazar. Le titre The Childe est lui aussi bien trouvé, faisant référence à une jeunesse noble, jouant ainsi avec la situation et les origines de Marco et le personnage du Nobleman (en Corée, le titre original fait complètement allusion à lui).
Mais si le message sur les riches est bien trouvé et utilisé assez intelligemment, il reste que, comme le reste du film, il manque de subtilité. Cela se voit surtout dans les personnages des méchants, notamment le personnage du demi-frère qui sert d’antagoniste. Le film veut tellement montrer qu’il est un connard qu’à certains moments, ça devient ridicule. Plusieurs scènes qui mettent de l’avant cet aspect exagèrent vraiment qu’elles viennent à manquer de rythme, dont une scène d’exécution dans un champ où l’on a juste envie que les personnages se fassent tuer rapidement.
Aussi, malgré un personnage d’assassin unique et mémorable, ainsi que de très jolies scènes d’action, le film n’a pas grand-chose de remarquable, surtout si on le compare à d’autres films coréens. Si le comparer au trio légendaire de Park, Bong et Kim serait trop facile et injuste, The Childe n’a quand même pas la même intensité que Train to Busan ou la même inventivité que The Wailing. Le film reste très cool, mais ce n’est pas lui que je conseillerais à quelqu’un qui voudrait découvrir le cinéma sud-coréen. Aussi, le twist final se voit assez loin à l’avance, et c’est dommage.
Bande-annonce
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