« Moi j’suis juste une police, j’ai pas toujours la chance de rencontrer une vedette »
Dans les ombres mouvantes de Montréal, un homme nommé Donald Lavoie vagabonde, prêt à tout pour atteindre son but. Loin d’un simple brigand, il est le tueur à gages le plus célèbre du Québec, avant de devenir un informateur pour la police quelques années plus tard. Le dernier film de Raymond St-Jean s’inspire très librement de l’histoire vraie de Lavoie, qui travaillait pour les frères Dubois, rivaux de la famille mafieuse Cotroni dans les années 70.
Crépuscule pour un tueur a été présenté en avant-première le 28 février dernier dans le cadre du festival Les RDVQC. Ce film nous plonge dans l’univers sombre de la pègre montréalaise en 1970. Nous y suivons Lavoie (interprété par Éric Bruneau), un tueur impitoyable travaillant pour Claude Dubois (joué par Benoît Gouin), le chef de la mafia locale. Mais lorsque Lavoie prend sous son aile un jeune malfrat impulsif (Joakim Robillard), les choses se compliquent rapidement et il se retrouve impliqué dans un double meurtre. Bien qu’il réussisse à échapper à la justice grâce à l’aide de Dubois et de ses avocats, le sergent-détective Roger Burns (Sylvain Marcel) reste déterminé à le faire tomber.
Ce film est une véritable fresque qui explore des thèmes complexes, tels que la loyauté, la trahison et la rédemption, à travers un personnage principal féroce et ambigu. Éric Bruneau incarne très bien ce protagoniste, réussissant à montrer toutes les facettes de son personnage, aussi bien ses moments charismatiques que ses moments violents, sans jamais les valoriser. Le comédien a dû effectuer des recherches pour mieux comprendre le personnage et le jouer avec justesse. Cela se ressent dans son interprétation empreinte de sincérité et d’intensité. De plus, le réalisateur a choisi une approche réaliste qui montre la violence sans complaisance, sans jamais chercher à la rendre sensationnelle. Cette crédibilité donne une force à l’histoire et permet de mieux comprendre les enjeux de ce personnage torturé.
Le besoin de validation de Lavoie, qui a été abandonné très jeune par sa famille et qui a trouvé un père en Claude Dubois, est un angle intéressant qui permet de mieux comprendre la complexité de ce personnage. Malgré le fait qu’il ait fait tomber son mentor, il reste toujours admiratif envers lui. Le personnage de l’enquêteur Roger Burns incarne une figure paternelle, ce qui apporte un angle intéressant au récit également.
La cinématographie de Jean-François Lord est un véritable tour de force, capturant l’atmosphère sombre et oppressante des environs de Montréal dans les années 70 grâce à des plans larges saisissants. Les scènes de violence sont d’une rare intensité, brutales et graphiques, mais jamais gratuites, parfaitement intégrées au scénario et servant à renforcer la tension dramatique. Les décors et costumes sont également soignés, permettant une immersion totale dans cette époque révolue.
Bien que le film possède des atouts indéniables, certains éléments viennent cependant affaiblir sa qualité globale. En effet, la mise en scène de Raymond St-Jean peut parfois manquer d’originalité, se contentant d’un style classique qui ne surprend pas toujours. Où s’en va l’histoire? Qu’est-ce qu’on nous raconte réellement? De même, certaines scènes manquent de rythme et de tension, notamment celles où Lavoie élimine ses victimes dans des lieux isolés. Dans son ensemble, le rythme du film peut également être inégal, alternant entre des moments de lenteur et des scènes qui semblent précipitées. Certains personnages secondaires (comme sa femme par exemple, interprété par Rose-Marie Perreault), ne sont pas suffisamment développés, donnant l’impression qu’ils sont là simplement pour servir l’intrigue. De plus, l’absence de contexte sur l’histoire criminelle du Québec peut rendre plus difficile la compréhension sur l’importance de Donald Lavoie dans cette histoire. Puis également, un manque de références à d’autres œuvres de fiction ou de non-fiction traitant de la même thématique ce qui peut donner l’impression que le film manque de profondeur ou de contexte.
En somme, Crépuscule pour un tueur est un thriller sombre qui plaira aux amateurs du genre. Le film bénéficie de performances convaincantes grâce à l’interprétation impeccable d’Éric Bruneau. Il comporte aussi d’une approche réaliste et d’un dilemme moral intéressant ainsi qu’une cinématographique remarquable. Même si le film présente quelques faiblesses mineures qui pourraient décevoir certains spectateurs, il offre une plongée fascinante dans l’univers de la pègre montréalaise des années 1970.
Il sera diffusé dans toutes les salles du Québec à partir du 10 mars.
Bande-annonce
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