Top 5 2022 - Francois - une

Les meilleurs films de 2022 — Le top 5 de François

Le 28 décembre 2022

Voici venu le temps de mon bilan de fin d’année. Encore une fois, j’en ai vu des films. D’ailleurs, si vous pensez en avoir vu plus que moi, faites-moi signe. On pourra en jaser! Comme c’est maintenant ma petite tradition, voici mon décompte de films regardés : 8 séries, 218 courts métrages et 122 longs métrages.

Un grand total de 348, un nouveau record personnel. De ces multiples films, je tenterai de choisir les 5 meilleurs longs métrages et les 5 meilleurs courts métrages que j’ai eu l’occasion de voir en 2022. Ce sera, en quelque sorte, mes chaleureuses suggestions.

Courts métrages

5 – Partir un jour (Amélie Bonnin) – France – 25 minutes

Le bac en poche, Julien a quitté sa Normandie natale pour se construire une vie plus grande à la capitale, laissant ses souvenirs derrière lui. Aujourd’hui il revient et plusieurs questions se posent à lui : ses parents sont-ils des bouseux? Tout ce qu’on écrit a-t-il le parfum des regrets? Et peut-on perdre ses moyens au rayon gâteaux d’un supermarché?

Partir un jour

J’ai rarement été aussi touché par un court métrage. Amélie Bonin a créé, avec Partir un jour, un film étonnant. Vous savez, cette histoire d’amour manquée, qu’on a vu 40 000 fois? Hé bien il semblerait que c’est possible de faire quelque chose d’original avec cette thématique que je croyais usée à la corde. 

Et il y a la chanson interprétée par Juliette Armanet. Une version magnifique de Tu m’oublieras. Je l’écoute en boucle depuis… 

4 – III (Salomé Villeneuve) – Québec – 12 minutes

Par une chaude journée d’été sur la rive d’un lac, trois frères et sœurs sont confrontés à la mort pour la première fois à travers leur contact avec la nature.

III

Des films qui mettent en scène des enfants, c’est rarement aussi bon. Salomé Villeneuve a réussi à pousser son récit au-delà d’une histoire d’enfants traditionnelle. En mélangeant un réalisme cru à une psychologie de l’enfance bien développée, elle crée quelque chose de spécial. 

Et là où la majorité des réalisateurs et réalisatrices se concentre sur les enfants lors du tournage, la Québécoise, elle, s’est tout de même penchée sur l’image. Plusieurs plans sont particulièrement magnifiques, dont le plan final. 

Si l’enfance est un thème qui vous allume, vous ne voudrez pas passer à côté de ce film.

3 – Le danger en face (Alexis Chartrand) – Québec – 17 minutes

Alors qu’il observe la vie à l’extérieur de sa boutique, un barbier croit apercevoir celui qui en veut à sa vie et à sa famille. Confronté au danger imminent, le barbier décide de réagir.

Le danger en face

Je crois que c’est la première fois que je mets un film de genre dans un de mes tops 5. Mais le film d’Alexis Chartrand est tellement original dans sa forme, que je n’ai pas pu m’empêcher de le mettre ici. Le plus étonnant, est que malgré son côté déjanté, il reste accessible pour le grand public. 

C’est par un judicieux mélange d’accessoires en cartons et d’acteurs réels que Chartrand crée un film qui ressemble à une bande dessinée violente, mais sans sang. Un film dans lequel on tire une tonne de coups de feu sans en tirer un seul, et dans lequel les éclats de sang sont remplacés par des éjections de confettis. 

Oui, les créateurs québécois sont solides!

2 – Réminiscences  (Virginie Brunelle) – Québec – 11 minutes

Ce court-métrage de danse transpose à l’écran trois duos à la fois sensuels et brutaux. Trois histoires se chevauchent pour raconter le souvenir; ce qu’il reste des sensations nostalgiques de leur union. Les chorégraphies y subliment les fissures que l’expérience humaine engendre et qui se sédimentent en nous comme autant de vestiges affectifs. 

Réminiscences - Virginie Brunelle

Le film de Virginie Brunelle garde le spectateur dans un état de quasi-transe. Ce film de danse est simplement magistral. La réalisatrice ne se contente pas de filmer ses danseurs, elle crée une histoire forte et touchante. Elle fait réfléchir. 

Les chorégraphies sont parfaites, bien imbriquées, les unes aux autres, dans des mouvements de caméra qui nous font passer d’un duo à l’autre. Les plans sont sublimes, témoignant de toute la beauté d’une relation et de toute la douleur qu’elle contient. Le décor est à couper le souffle, et encore une fois, la réalisatrice réussit à tirer le maximum de l’union du cinéma et de la danse. 

Et si vous croyez impossible de danser sur une table en duo, vous serez renversé par ce qu’accomplit un des duos. L’amateur de danse contemporaine que je suis a été plus que comblé par ce court métrage très artistique.

1 – Casting Nelly (Jérémie Picard) Québec — 17 minutes

Alors qu’elles auditionnent pour le rôle de Nelly Arcan, des actrices articulent une parole digne et essentielle. Une approche à la fois simple et originale qui déploie un hommage sensible à cette grande écrivaine, et à toutes les femmes.

Casting Nelly

Si vous savez qui est Nelly Arcan, ou si le féminisme vous tient à cœur, vous devez absolument voir ce documentaire. 

Pour ce premier court métrage documentaire, Jérémie Picard a fait dans la simplicité. Mais une simplicité bien calculée. Pour traiter de féminisme et de la société qui les juge constamment, il fait simplement auditionner des jeunes femmes pour le rôle de Nelly Arcan. Puis, il les laisse parler, expliquer ce que représente l’autrice pour elles. Des femmes de tous les styles, de différentes origines ethniques se présentent face à la caméra et se racontent. Elles parlent non seulement de l’autrice, mais aussi de la société, de comment elles se voient dans ce monde et de ce qu’elles peuvent ressentir. 

Et c’est en écoutant d’autres jeunes femmes que Arcan raconter leurs propres histoires à travers Nelly qu’on comprend que l’auteure de Putain n’était malheureusement pas seule dans son combat contre les « imperfections » corporelles.

Longs métrages

5 – Les innocents [De uskyldige] (Eskil Vogt) — Norvège / Suède / Danemark

Un été, quatre enfants — Ada (Rakel Lenora Fløttum), Anna (Alva Brynsmo Ramstad), Aisha (Mina Yasmin Bremseth Asheim) et Ben (Sam Ashraf) — se découvrent d’étonnants pouvoirs et jouent à tester leurs limites, loin du regard des adultes. Mais ce qui semblait être un jeu d’enfants, prend peu à peu une tournure inquiétante…

The Innocents - Un film qui défi le genre

Avec Les innocents (De uskyldige), Eskil Vogt offre un film terrifiant sur l’enfance. Il propose une fable sur le bien, le mal, et surtout sur les zones grises qu’il y a entre ces deux notions dans l’imaginaire de l’enfant.

Je n’ai pas l’habitude d’aimer les films surnaturels. Mais celui de Vogt mélange si bien le réel du surnaturel qu’il en devient une fable terrifiante sur l’enfance. L’effrayant vient d’un trait spécifique à l’enfance. En effet, jusqu’à un certain âge, un humain ne fait pas très bien la différence entre les notions de bien et de mal. Et surtout, il n’est pas très bon pour maîtriser ses émotions. 

Vogt va aussi là où très peu osent s’aventurer : s’en prendre violemment à des enfants, et le montrer. Je vous assure que votre cerveau sera mis à rude épreuve dans ce long métrage qui mélange les genres afin d’offrir un résultat comme vous n’en aurez probablement jamais vu.

4 – Plan 75 (Chie Hayakawa) — Japon / France / Philippines / Qatar

Au Japon, le programme gouvernemental Plan 75 encourage les personnes âgées à être volontairement euthanasiées pour remédier à une société super âgée. Michi (Chieko Baisho), une femme âgée dont les moyens de survie disparaissent, Hiromu (Hayato Isomura), un vendeur pragmatique de Plan 75 et Maria (Stefanie Arianne), une jeune ouvrière philippine, font face à des choix de vie ou de mort.

Plan75 - Réalisme dystopique

Plusieurs sociétés riches ont un problème dû au vieillissement de la population. Le Japon figure parmi celles ayant le plus gros problème à ce niveau (avec l’Italie et le Québec). Dans Plan 75, Hayakawa imagine une solution qui semble extrême, mais qui est plausible dans un pays comme le Japon. 

Ce film tout en délicatesse se base sur deux traits culturels spécifiques au pays du soleil levant : l’esprit de sacrifice et que les personnes âgées sont prêtes à faire beaucoup d’efforts pour ne pas déranger. 

Hayakawa arrive donc avec ce film offrant une dystopie réaliste tout aussi inquiétante que plausible. C’est donc en suivant 3 personnages à la réalité différente que Plan 74 amène le spectateur à se questionner profondément sur ses valeurs et sur ce qu’il peut faire pour aider sa société à avancer dans ce monde complexe. 

3 – The Housewife [Shape of red] (Yukiko Mishima) — Japon

C’est en rencontrant son ancien amant de faculté que Toko (Kaho), depuis longtemps femme au foyer, voit soudain renaître en elle le désir de travailler, et de reprendre son métier d’architecte. Mais peut-on vraiment réinventer sa vie?

Housewife - La place de la femme au japon
Toko (Kaho) et Kurata (Satoshi Tsumabuki)

L’adultère a été un thème particulièrement utilisé au Japon en 2022. Mais The Housewife m’a particulièrement marqué par la façon qu’utilise la réalisatrice pour illustrer son propos.

Ce film, qui a causé beaucoup de remous au Japon, questionne la place qui est réservée aux femmes japonaises dans la société nippone. 

Selon les standards japonais, Toko dispose de tout ce que la société peut offrir à une trentenaire respectable : un mari ambitieux, capable de subvenir aux besoins de la famille, une petite fille adorable et une belle-mère serviable, tous cohabitants dans une maison moderne, suffisamment grande pour que chacun y trouve l’espace pour s’y épanouir. Mais pour une femme moderne, est-ce suffisant?

Voici la prémisse qui mènera la jeune épouse à se questionner. Ce questionnement la mènera à trouver un travail et à réaliser que sa vie actuelle ne lui suffit plus. Arrivera dans sa vie ce nouvel amant, qui revient du passé. 

Ce film particulièrement sulfureux ne laissera personne froid. Les scènes érotiques sont incroyablement bien réalisées et l’histoire est remplie de mystères afin de garder le spectateur à l’affût de tout développement. On ajoute à ça les sublimes décors et on se retrouve avec un des meilleurs films de la décennie. 

The Housewife se veut donc, non seulement une critique de la société japonaise, mais aussi un cri du cœur afin de dire aux femmes du pays du soleil levant qu’elles ont le droit de penser à elles et être plus qu’une épouse, une mère, un objet dans la pièce.

2 – Next Sohee [다음 소희] (July Jung) – Corée du Sud

Sohee (Kim Si-eun) est lycéenne dans une école professionnelle. Elle est ravie de décrocher un stage dans le centre d’appels d’un grand fournisseur d’accès Internet, mais le travail de bureau prisé s’avère être un lieu de travail cauchemardesque. Elle subit une immense pression de la part de l’entreprise pour atteindre la meilleure cible d’équipe. Le travail est intimidant même pour une fille audacieuse comme Sohee, mais pour aggraver les choses, les externes ne reçoivent qu’une fraction du salaire normal. Elle est peu à peu tiraillée entre la colère, la déception et la pression. Tout cela mènera à sa mort.

Next Sohee - une

Le détective Oh Yoo-jin (Bae Doona) devient responsable de cette affaire. Elle commence à suivre les traces de Sohee et des personnes qui l’entourent pour révéler les causes de sa mort. Alors qu’elle enquête sur le cas de Sohee, Yoo-jin découvre que la face cachée de l’incident est plus bouleversante et démoralisante qu’elle n’aurait jamais pu l’imaginer.

Avec Next Sohee, July Jung offre un film touchant, marquant et cruel de vérité sur la cupidité des entreprises et la facilité avec laquelle les grands patrons abusent de la naïveté des jeunes travailleurs.

Pour son deuxième long métrage, July Jung utilise un montage linéaire pour raconter une histoire qui serait normalement racontée par l’utilisation de flashback. Du coup, elle se démarque des autres films d’enquête qui nous ont été offerts jusqu’ici. 

Le cinéma sud-coréen a le vent dans les voiles depuis quelques années. Et comme le disait David dans son top 5, un peu plus tôt cette semaine, il y a de bonnes raisons à cela. 

Mais le simple montage original ne serait pas suffisant pour faire de Next Sohee un film marquant se retrouvant au numéro 2, n’est-ce pas? Vous savez cette impression qu’on laisse notre jeunesse mourir lentement, sans rien faire d’autre que de fermer les yeux? C’est grâce à une réalisation sans artifice, néanmoins magnifique, où la caméra met constamment en valeur les deux protagonistes, que Jung dénonce ce système.

Ici, on regarde tranquillement Kim dépérir, sans pouvoir y faire quoi que ce soit. Je vous avertis, ce film est dur. La première partie est presque insoutenable. Puis la seconde partie laisse les sentiments d’impuissance et de tristesse disparaître progressivement pour céder la place à ceux de la frustration et de la colère.

Avec un récit en deux temps exposant d’abord la genèse d’une tragédie, pour ensuite dévoiler les détails cruels d’une réalité connue, sur laquelle nous détournons le regard, Next Sohee est un film à voir absolument. 

1- Drive my car [ドライブ・マイ・カー] (Ryusuke Hamaguchi) — Japon

Alors qu’il n’arrive toujours pas à se remettre d’un drame personnel, Yusuke Kafuku (Hidetoshi Nishijima), acteur et metteur en scène de théâtre, accepte de monter Oncle Vania dans un Festival, à Hiroshima. Il y fait la connaissance de Misaki (Toko Miura), une jeune femme réservée qu’on lui a assignée comme chauffeuse. Au fil des trajets, la sincérité croissante de leurs échanges les oblige à faire face à leur passé.

Drive my car - Un théâtre universel

Avec Drive my Car, Ryusuke Hamaguchi offre un mystère captivant, une parabole de la connexion humaine et un road movie sur le chemin de l’amour, de la perte, de l’acceptation et de la paix.

Que dire de nouveau sur ce film qui a déjà pratiquement tout remporté? 

D’une certaine façon, on pourrait dire que Drive my car représente exactement ce à quoi les sociétés modernes doivent s’adapter : la mixité. Je ne parle pas seulement de mélange de « races ». Dans son film, Hamaguchi mélange tout d’abord cinéma et théâtre. Je sais, il n’y a rien de particulièrement nouveau à présenter une pièce de théâtre à l’intérieur d’un film. Mais le réalisateur japonais intègre l’une à l’autre de façon indivisible. Les personnages ( et comédiens) qui prendront part à l’adaptation de Oncle Vania sont de différentes origines ethniques. Mais surtout, ils ne parlent pas les mêmes langues et, souvent, ne se comprennent pas. C’est sur ce concept que mise le film. 

L’effet est saisissant. Le texte est présenté en japonais et en anglais sur le mur derrière la scène, alors que les comédiens jouent en japonais, cantonais, mandarin, tagalog, indonésien, allemand et malaisien.

Le théâtre devient aussi le lieu des confrontations et l’excuse pour amener tous ces personnages à interagir entre eux. D’ailleurs, Hamaguchi en profite pour glisser une réplique faisant état de l’attitude qu’ont plusieurs Japonais envers les étrangers.

La façon dont le récit (pourrait presque être vu comme une étude sur les comportements humains au niveau des relations interpersonnelles) est construit est tout aussi particulière. 

Drive my Car commence d’une manière assez étonnante, alors qu’une femme en contre-jour raconte un récit érotique à un homme allongé. On comprendra éventuellement qu’il s’agit de Yusuke Kafuku et de sa femme Oto (Reika Kirishima). Le réalisateur développe cette relation de couple ambigüe pendant les 49 premières minutes du film. Puis, arrive le générique de début et l’histoire bascule. 

Mais le film s’appelle Drive my car, non? Pourquoi? Parce que les grands développements de l’histoire se produiront à l’intérieur d’une vieille Saab, voiture qui sera un personnage en soi.

Alors si vous n’avez pas vu ce film (sur lequel il m’est si difficile d’écrire quelque chose de concret), il serait temps que vous vous y mettiez. 

***

Mention spéciale à Aristocrats, ce film de Yukiko Sode, aussi sur le thème de l’adulte, qui critique vivement la société japonaise tout en offrant un point de vue particulier sur l’amitié entre femmes.

Et vous, quelles ont été vos grandes découvertes de 2022?

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Le 28 décembre 2022

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