« Qui est chargé de l’enquête? »
Maigret enquête sur la mort d’une jeune fille. Rien ne permet de l’identifier, personne ne semble l’avoir connue, ni se souvenir d’elle. Il rencontre une délinquante, qui ressemble étrangement à la victime, et réveille en lui le souvenir d’une autre disparition, plus ancienne et plus intime…
Depardieu en Maigret, c’est un succès! Même si le mot « Depardieu » et tout mot qui commence par « maigre » semblent dérisoires…
Patrice Leconte, qui nous a servi des œuvres comme Monsieur Hire, Le mari de la coiffeuse et Ridicule est un grand réalisateur. Il s’attaque ici à un grand écrivain avec un très grand comédien.
Le Maigret que Patrice Leconte nous présente avec Depardieu est cool. Il n’élève jamais la voix, n’est jamais fâché. Gérard Depardieu incarne un inspecteur de police mature et qui en a vu d’autres. Il vit en harmonie avec sa femme, ce qui marque un complet décalage avec les films américains où le policier est toujours en instance de divorce parce que son travail passe avant sa famille.
Une jeune femme est retrouvée morte dans une ruelle, poignardée. Maigret va fouiller la ville pour d’abord découvrir de qui il s’agit. On se rend compte, d’ailleurs, qu’il met plus d’énergie à découvrir l’identité de la victime qu’à trouver qui est responsable de sa mort. Subtilement, l’histoire nous apprend que sa propre fille est morte quelques années auparavant. Maigret est resté marqué par la disparition de sa fille unique et s’attarde à connaître et à comprendre pourquoi cette fille s’est retrouvée là, en ville, et victime d’un meurtre.
Le film est sombre, l’époque est sombre et l’histoire l’est tout autant. L’histoire d’une fille qui espérait retrouver quelqu’un. Une fille de nulle part.
Et sans indice de départ, Maigret va s’attarder à des détails, des intuitions qui le mèneront à la vérité. À travers Maigret, Georges Simenon passe des réflexions philosophiques, comme lorsqu’il parle des criminels : « Pour exister, il met fin à l’existence d’un autre… » Et quand quelqu’un lui demande : « Vous avez des animaux chez vous? Il répond : seulement dans mon assiette! »
Maigret est anticonformiste. Ses réflexions sont d’une formidable efficacité pour nous rattacher à l’action.
Ce film se démarque aussi du fait qu’il présente des gens sans histoire. Des gens ordinaires comme moi et peut-être vous. On ne sent jamais un désir de vengeance comme dans les films policiers américains. Maigret a soif de vérité, non pas de victoire sur le mal.
On sent qu’il est très paternaliste avec Betty (Jade Labeste) la jeune fille qui va l’aider dans son enquête. Un bel attachement entre Maigret et elle. Sa fille par procuration…
Peut-être une certaine faiblesse vers la fin, alors que le film nous montre une coupable qui baisse les bras un peu trop facilement, à mon avis.
Somme toute, un bon film où le parallèle avec la perte de sa fille nous fait comprendre que Maigret est resté marqué par la lourdeur de cet événement et qu’à travers cette enquête et utilisant son immense talent, il va évoluer jusqu’à la vérité.
Sombre, mais intelligent.
Maigret est présenté au festival Fantasia le 26 juillet 2022.
Bande-annonce
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