« Gloria… As-tu déjà eu un orgasme? »
Gloria (Stefanía Tortorella) ne peut pas dormir. Elle a trente ans, n’a jamais eu d’orgasme et ne s’entend pas avec les hommes qu’elle rencontre. Afin de s’endormir, elle déménage dans une maison en banlieue. Là vit une entité qui lui fera connaître le plaisir et la fera tomber amoureuse. Lorsque Gloria rencontre enfin une personne du monde des vivants qui l’intéresse, elle doit faire face à ses peurs et choisir entre l’idylle du fantasme et les vicissitudes d’une vraie relation.
Avec Muerto con Gloria, Mauro Sarser et Marcela Matta offrent une critique du monde actuel où plusieurs préfèrent choisir la facilité et l’éphémérité des relations sans complications plutôt que de bâtir un amour durable.
Je dois admettre que sur le moment, je ne voyais pas de deuxième niveau au film. C’est seulement une fois le film terminé que ça m’a frappé. Et, encore plus, le lendemain matin.
C’est à ce moment que j’ai réalisé que la partie ésotérique est une métaphore pour illustrer un processus psychologique. Mais le ton comique du film le rend subtil. Le fantôme serait-il une image de la relation éphémère que plusieurs privilégient à une relation sérieuse? Oui, une fois l’idée de l’illusion du fantasme présentée, à travers le fantôme de Dante, le concept inverse est incorporé, celui qui génère le disjonctif en Gloria. Autrement dit, la possibilité d’avoir une relation avec une personne réelle, mais en même temps de devoir faire face aux peurs, aux névroses et aux conflits de quelqu’un d’autre, en plus des siennes.
Pour renforcer cette image, et pour rendre les craintes de Gloria plus difficiles à cerner (il faut bien mettre un peu de mystère dans tout ça), il y a Sandra (Nenan Pelenur). Elle est aussi une belle représentation de ces gens qui évitent le vrai amour en restant dans des relations courtes et idylliques… Pas le temps de laisser le moindre ennui s’installer.
La vraie force de Muerto con Gloria, c’est de présenter toutes ces thématiques et ces allégories en restant léger. En plus, les réalisateurs ont ajouté une petite couche supplémentaire afin de cultiver leurs audiences.
Gloria travaille dans une libraire (ce qui est différent d’une bibliothèque, comme elle doit l’expliquer à un homme) et démontre un réel amour de la littérature. Sur ce point, le film est truffé de nombreux clins d’œil qui sauront plaire aux avides lecteurs. Tout au long du récit, des clients viennent et demandent des recommandations littéraires. Cette passion de la littérature m’a rappelé High Fidelity, avec Jack Black et John Cusack. À la différence que, eux, c’était dans un magasin de musique.
Il y a deux autres éléments que j’aimerais mentionner. Le film met en scène deux femmes comme personnages centraux. Pendant ce temps, les hommes sont placés à l’arrière-scène. Ces personnages masculins qui auront une importance dans l’histoire demeurent impersonnels jusqu’à ce qu’ils deviennent enfin importants pour Gloria. En effet, autant son fantôme d’amour que son patron passent la majeure partie du film à l’écran, mais sans visage. Jamais on ne voit leur visage avant que ces hommes soient importants pour Gloria. Dante étant un fantôme, c’est assez simple. Quant au patron de la librairie, il a soit la tête au-dessus du cadre, ou il passe en transportant quelque chose qui cache son visage. C’est une magnifique façon de créer un mystère, mais aussi de mettre à l’avant les femmes.
L’autre élément? La maudite chanson qui reste dans la tête. À la toute fin du film et pendant le générique de fin, on nous joue la chanson Gloria en espagnol. Presque 24 heures plus tard, j’en suis pas encore débarrassé.
Ghosting Gloria (Muerto con Gloria) n’est pas un grand film. Mais il est vraiment plaisant à regarder et amène de belles réflexions sans que le spectateur n’ait à se casser la tête. Une jolie réussite.
Note : 7.5/10
Muerto con Gloria était présenté au festival Fantasia les 11 et 13 août 2021.
Bande-annonce
Titre original : Muerto con Gloria
Durée : 114 minutes
Année : 2021
Pays : Uruguay
Réalisateur : Mauro Sarser et Marcela Matta
Scénario : Mauro Sarser
© 2023 Le petit septième