« They say it’s not the destination that counts but the journey. »
[On dit que ce n’est pas la destination qui compte, mais le voyage.]
Em (Marie-Hélène Panisset) et Jay (Judith Baribeau), respectivement une réalisatrice et son actrice principale, toutes deux à la carrière qui bat de l’aile, se lancent dans un voyage entre Montréal et Durham (Caroline du Nord), où leur court métrage est présenté au North Carolina Gay and Lesbian Film Festival. Elles conduisent une Jeep et tirent une tente-roulotte, et décident de tourner un film en cours de route. Il ne se passe pas grand-chose sauf qu’elles développent une belle amitié et démystifient plusieurs tabous.
Avec Two Straight Girls at a Queer Fest, Marie-Hélène Panissetoffre un road movie à la Thelma & Louise, mais sans la fin tragique. Le film, présenté au OutSouth et nommé pour le prix du public, aborde le sujet délicat de la maladie mentale et nous promène sur la fine ligne entre le vrai et le faux.
Ahhhhh, les films d’art et essai. Ceux qui me lisent régulièrement connaissent mon amour pour ces films parfois étranges. Les longs métrages québécois appartenant à cette catégorie sont peu fréquents. Il y a deux ans, j’avais eu la chance de voir Cuba, merci, gracias, pour ensuite me faire plaisir en rencontrant la coscénariste et interprète. Hé bien 2021 sera une sorte de répétition, car j’ai eu la chance de voir Two Straight Girls at a Queer Fest, pour ensuite rencontrer la réalisatrice et scénariste (et interprète) du film.
Dès le début, Panisset joue sur l’idée qu’il s’agit d’un film de merde dans lequel il ne se passe rien. Cette autodérision restera présente tout au long du film. Par moment à propos du film en soi, par moment au sujet des deux personnages. Entre autres une scène incroyable dans laquelle les deux femmes sont dans un restaurant et créent un plan où rien ne se passe, pour faire plus « film d’art et essai ». Une scène hilarante. Mais derrière ces moments « vides » se cache beaucoup.
Tout d’abord, il y a toute cette question autour de notre société qui valorise le narcissisme. Car, quoi de plus narcissique que d’écrire un film dans le but de s’auto-filmer en se mettant soi-même en scène tout en parlant d’un film que tu as toi-même fait pour dire qu’il est présenté dans un festival? 😉 Mais les deux femmes ajoutent une couche au questionnement et en amenant le spectateur à réfléchir au fait que de nos jours, trouver du travail n’est pas évident et que, parfois, la meilleure chose à faire est de se créer son propre travail.
Il y a aussi le sujet de la maladie mentale qui est légèrement touché. C’est peut-être là ma seule critique. J’aurais aimé que la chose soit prise un peu plus de front. On dirait que ça vient dire bonjour et que ça repart rapidement. Mais en le faisant dans un film de ce genre, la réalisatrice démontre beaucoup de courage.
Mais c’est vrai qu’il ne se passe rien. À part ce que je viens de mentionner, il n’y a qu’un film qui traite de l’amitié entre deux femmes, de la famille, du manque, du camping, des défis et de la réussite et de l’échec. J’imagine que Panisset aurait pu se forcer un peu pour trouver une ou deux thématiques de plus. 😉
Mais ce qui, pour moi, rend Two Straight Girls at a Queer Fest si bon, c’est qu’on se promène entre documentaire et fiction. Le spectateur ne peut faire autrement que de se demander ce qui constitue le vrai du faux. Mais ne vous en faites pas, je le demanderai à Marie-Hélène Panisset lors de notre café.
Le road movie prend une forme inédite alors que les deux protagonistes s’échangent la caméra, n’ayant pas peur de montrer leurs mauvais côtés et leurs faiblesses. Une technique qui nous amène encore plus à croire que tout ce qu’on voit est véridique. On se surprend même à espérer que ce voyage ne coûtera pas réellement sa relation de couple à Jay et que Em surmontera ses problèmes de santé mentale.
Oui, nos deux amies sont parfois énervantes, mais elles sont tout aussi adorables. Bon, ici je vais demander aux femmes de ne pas lire jusqu’au prochain paragraphe… Messieurs, il n’y a rien de plus amusant à regarder que des femmes qui doivent installer une roulotte seules, ou qui doivent reculer la Jeep avec la roulotte derrière. Shuuuut.
Tourné avec un budget restreint (c’est peu dire) avec un scénario qui tenait probablement sur une page (ok probablement un peu plus), l’odyssée des filles est tout sauf ennuyante.
Two Straight Girls at a Queer fest est un essai philosophique, soutenu par une bande sonore vivante, et de solides performances. Un film à voir dès qu’il arrivera ici!
Note : 9/10
Two Straight Girls at a Queer Fest est présenté au Outsouth Queer Film Festival, du 13 au 19 août 2021. Il devrait sortir au Québec à l’automne 2021…
Bande-annonce
Titre original : Two Straight Girls at a Queer Fest
Durée : 83 minutes
Année : 2021
Pays : Canada (Québec)
Réalisateur : Marie-Hélène Panisset
Scénario : Marie-Hélène Panisset
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