Dieu existe, son nom est Petrunya – La croix de la discorde

« Redonnez-lui la croix maintenant! Elle l’a attrapée. »

Dieu existe son nom est Petrunya - afficheÀ Stip, petite ville de Macédoine, tous les ans au mois de janvier, le prêtre de la paroisse lance une croix de bois dans la rivière et des centaines d’hommes plongent pour l’attraper. Bonheur et prospérité sont assurés à celui qui y parvient. Ce jour-là, Petrunya (Zorica Nusheva) se jette à l’eau sur un coup de tête et s’empare de la croix avant tout le monde. Ses concurrents sont furieux qu’une femme ait osé participer à ce rituel. La guerre est déclarée, mais Petrunya tient bon : elle a gagné sa croix, elle ne la rendra pas.

Avec Dieu existe, son nom est Petrunya, Teona Strugar Mitevska réussit à montrer, sans jugement, le clash entre tradition et modernité. Elle utilise l’image de la religion orthodoxe et la place de la femme pour y arriver de grande façon.

La tradition orthodoxe

Dieux existe son nom est Petrunya - La tradition
La course pour la croix

Chaque année, pour l’Épiphanie, la communauté orthodoxe d’Europe de l’est organise des lancers de croix. On les voit notamment en Bulgarie, en Russie, en Roumanie, en Serbie et en Macédoine. Et, évidemment, cette tradition, qui apporte la chance au vainqueur pendant une année complète, est réservée aux hommes. 

Mais, en 2014, une femme a attrapé la croix dans la ville de Stip, à l’est de la République de Macédoine. Son geste a soulevé un tollé au sein de la population locale et des autorités religieuses. On a essayé de lui reprendre la croix, mais la jeune femme a tenu bon. Le lendemain, elle a donné une interview à la station de radio locale, incitant les femmes à plonger pour récupérer la croix à l’avenir. La population l’a traitée de folle, de femme perturbée… C’est de cette histoire que s’inspire Dieu existe, son nom est Petrunya.

La lutte d’une femme

Dieux existe son nom est Petrunya - Lutte de femme
Petrunya et le prêtre

Si Petrunya semble faible au début du récit, on lui découvre une force incroyable à mesure que l’histoire avance. Comment une femme peut-elle passer de « j’ai de la difficulté à me lever le matin » à « je me bas pour une cause »? Pour la femme de 32 ans, c’est une goutte de trop lors d’une entrevue pour un emploi qui la pousse à agir. Lorsque le patron, un ami de la voisine de Petrunya, l’insulte  – il lui dit qu’elle n’est bonne à rien et qu’il ne la baiserait même pas -, elle explose. Le hasard a voulu qu’elle assiste au lancer de la croix. Elle plonge et… change le cours de l’histoire.

La suite du film montre sa lutte contre l’Église, contre la police et contre la justice (ou l’injustice). Et c’est là que le film devient grandiose. La joute entre elle et les autorités est jubilatoire. L’entêtement de Petrunya à vouloir garder la damnée croix contre tous – dont sa même qui va jusqu’à l’insulter et la menacer de la répudier – nous rappelle à quel point ce sont les petites choses qui créent les grandes inégalités entre les hommes et les femmes. La femme n’est même pas croyante. La croix ne représente rien pour elle autre qu’un tournant dans sa vie, l’idée du bonheur à venir.

Petrunya ne demande que ça, un peu de bonheur dans une vie triste. Sa mère est incapable de le comprendre, car elle ne conçoit pas le bonheur hors des codes traditionnels. La réalisatrice explique d’ailleurs que « la violence de leur relation découle d’une chose plus profonde et sinistre : l’injustice déguisée en tradition. Pour la mère, accepter le comportement de Petrunya reviendrait à renier tout ce qu’elle est et tout ce qu’elle a toujours été ; elle serait comme annihilée aux yeux de la société. »

Mais encore…

Dieux existe son nom est Petrunya - Mais encoreIl n’est pas rare que les films sur les combats de femmes pour l’égalité tombent à plat. Ce n’est pas le cas de Dieu existe, son nom est Petrunya de Teona Strugar Mitevska. Les liens qu’elle fait entre la religion, la tradition et la place des femmes dans la société des pays de l’est sont justes et bien scénarisés. Jamais le film ne tombe dans les clichés et la facilité.

La réalisatrice démontre qu’il est possible de s’inspirer d’un fait divers et d’en faire une œuvre de grande qualité.

Note : 8.5/10

Visionnez la bande-annonce :

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