« In the old times, it was important to take care.»
[Dans les temps anciens, c’était important de faire attention.]
Depuis la nuit des temps, les peuples autochtones récoltent la sève des arbres pour produire du sirop, une pratique qui se poursuit encore de nos jours. Deux personnages principaux, Biidaaban, une jeune personne autochtone fluide de sexe, et Sabe, un Sasquatch qui peut changer de forme, se sont mis à récolter la sève de l’érable à sucre dans leur environnement urbain. En récoltant le sirop de cette manière, ils poursuivent le travail de leurs ancêtres. Des ancêtres et des animaux tels que Ghost Caribou et Ghost Wolf sont intégrés au paysage, mais seul Biidaaban peut les voir. Ces motifs résonnent tout au long de l’oeuvre, inscrivant le film dans la tradition, mais ce qui est montré appartient bel et bien au présent.
Dans Biidaaban (The Dawn Comes), Amanda Strong utilise une esthétique visuelle riche pour mettre en lumière la confrontation entre les traditions autochtones et le mode de vie nord-américain moderne.
L’histoire du court métrage d’animation est très simple: la collecte de l’eau d’érable, dans un environnement et avec des moyens modernes. On se retrouve dans des quartiers résidentiels; le personnage de Biidaaban utilise une perceuse et des chaudières en métal… L’univers mythique autochtone est cependant représenté à divers moments par des figures animales issues de l’imaginaire anishinaabe. Malgré ce scénario très simple, Biidaaban (The Dawn Comes) est étonnamment plutôt dur à suivre. Et encore plus si on connaît peu le processus de collecte de l’eau d’érable.
Le court métrage n’est pas en noir et blanc, mais les couleurs utilisées donnent un effet similaire. On reste presque tout au long du film dans des tons sombres, noirs et bleutés. Ponctuellement, quelques éléments en couleur interrompent la trame visuelle uniforme. C’est l’utilisation du rouge qui surprend le plus l’oeil, couleur qui détonne dans l’environnement sombre. Les éléments en rouge ? Les « X » inscrits sur les arbres par, on le suppose, les habitants du quartier. Les filets qui entourent les arbres et qui emprisonnent le personnage à la fin. Un message à peine voilé, une symbolique un peu trop évidente ?
« In the old times, it was important to take care. » Cette phrase résonne comme une accusation. Accusation au monde contemporain qui empiète sur les territoires autochtones. Accusation à la culture nord-américaine qui transforme la nature en espace urbain et qui ne respecte pas les ressources naturelles offertes par la Terre nourricière.
C’est aussi le discours sous-entendu par l’esthétique de Biidaaban (The Dawn Comes). Les couleurs sombres utilisées tout au long du film contraignent l’intrigue dans l’espace nocturne. Les personnages sont ainsi prisonniers d’une nuit sans fin. Obligés de s’y dissimuler, ils attendent la venue de l’aube, comme le suggère le titre.
Le message lancé par le court métrage pourrait être plus original. En se réduisant aux revendications autochtones qui blâment la civilisation occidentale, le film nous laisse sur notre faim. On aimerait en apprendre davantage sur la culture anishinaabe. En outre, c’est, et ce malgré la superbe esthétique visuelle, long… très long pour un film qui dure moins de 20 minutes.
Note: 6/10
Biidaaban est présenté au festival Présence autochtone, le 10 août 2019.
Visionnez la bande-annonce :
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