Le documentaire Premières solitudes de Claire Simon place des jeunes d’environ 16-18 ans du lycée Romain-Rolland d’Ivry-sur-Seine (France) dans une consigne pour une série de dialogues, dans le cadre d’un exercice que l’on retrouve dans un certificat en psychologie plus tard à l’Université.
Deux filles se laissent couler le dos le long du mur d’un corridor de l’école. Assises par terre, elles commencent leur dialogue-questionnaire qui porte essentiellement sur leur condition familiale. Puis, on en voit deux autres assis sur un muret qui surplombe la ville, puis encore deux autres.
Une rencontre avec une jeune et une intervenante sociale nous informe de la condition de cette fille qui ressemble en grande partie à la condition des autres.
Plus de la première moitié du film sera une répétition de témoignages où l’on apprend que le père est absent, que la mère lui interdit les visites, que parfois le ou la jeune voit son père en cachette, que la famille est complètement éclatée, que les repas ne se prennent pas ensemble, et que la plupart ne s’en plaignent pas trop. Ils et surtout elles se sont adaptés à cette vie pas trop mal, et qui les rend pas mal autonomes avant le temps.
Une mère a caché sa grossesse à son mari, un père violent, une mère violente, un père gay, ils sont vraiment de leur époque.
Plus loin, on entend que ces jeunes ne veulent pas répéter les erreurs de leurs parents, qu’ils veulent se marier, avoir 2-3 enfants et rester toute leur vie avec leur conjoint. Sauf une qui ne veut pas d’enfant, de peur de le faire souffrir si jamais l’histoire se répète.
Puis les questions tournent autour de l’amour et l’amitié.
« Grandir sans parents, faut être forts », de là l’importance d’amitiés solides. Certains ont développé le besoin d’être seuls, vivre seul comme un adulte.
Ils parlent de leur physique aussi, personne ne s’aime à cet âge-là.
On voit des ados faire leur épicerie de la semaine, ils témoignent aussi du déracinement qu’ils doivent subir lorsqu’un des parents part (le plus souvent le père) et que la mère doit changer de quartier à la recherche d’un loyer plus modeste. Une participante retourne fréquemment dans son quartier d’origine : « Putain, ça me manque… »
En résumé, ce documentaire sur les adolescents en 2018 nous indique que c’est devenu normal et naturel qu’un jeune de 16 ans ait une vie indépendante, autonome, et de ne pas voir ses parents ou du moins l’un d’entre eux.
En un sens, l’objectif de rendre compte de l’état des choses dans la population des 16-18 ans à Paris a été atteint, on a fait le tour. Par contre, ce film souffre d’un manque de naturel. On sent tout au long, sauf à quelques passages plus naturels, la pédagogie, l’aspect consigne de créer des dialogues un peu forcés.
Il n’est aucunement question ni de drogue, ni d’alcool, ni de sexe durant ces 98 minutes.
J’ai le devoir de dire que ce film est sympathique, mais ennuyant au final. Bien monté, bien tourné, mais pas mal monotone.
Le titre du film Premières solitudes est bien choisi, mais lorsqu’on dit « premières », c’est qu’il y en aura d’autres. Et je peux vous assurer qu’il y en a d’autres…
Note : 6.5/10
Premières solitudes est présenté au RIDM les 10 et 17 novembre 2018.
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