« Quand on parle trop bien, on ne sait plus comment dire les choses simplement… »
Neïla Salah (Camélia Jordana) a grandi à Créteil et rêve de devenir avocate. Inscrite à la grande université parisienne d’Assas, elle se confronte dès le premier jour à Pierre Mazard (Daniel Auteuil), professeur connu pour ses provocations et ses dérapages. Pour se racheter une conduite, ce dernier accepte de préparer Neïla au prestigieux concours d’éloquence. À la fois cynique et exigeant, Pierre pourrait devenir le mentor dont elle a besoin… Encore faut-il qu’ils parviennent tous les deux à dépasser leurs préjugés.
Le brio, d’Yvan Attal, c’est un film français construit à l’américaine. C’est un film politique et social, mais léger. Peut-être un peu trop léger…
S’il y a une chose que Le brio montre de façon assez juste, c’est les problèmes que vit actuellement la société française en ce qui concerne les difficultés ethniques. On y découvre une Française d’origine algérienne, victime de la manière dont on enferme aujourd’hui les gens dans des catégories ou des a priori, mais victime également d’elle-même. Car, oui, sa façon de réagir avec agressivité et de toujours voir du racisme dans les commentaires des gens, c’est aussi une réalité.
De prime abord, on serait tenté de voir l’interaction de Neïla et de ses amis comme très cliché. Mais c’est malheureusement une réalité beaucoup trop présente dans les cités de banlieue. Comme l’expliquait Attal, « c’est un des clichés forts sur la banlieue, cliché entretenu par certains jeunes de ces quartiers : l’idée que la seule manière de s’en sortir, hier c’était le sport ou la musique et aujourd’hui, d’être chauffeur VTC! »
Et, en contrepartie, lorsque Neïla reproche à Mounir de se contenter d’être chauffeur UBER, lui, de son côté, lui reproche sa naïveté à vouloir faire des études en croyant trouver du travail malgré le nom qu’elle porte… Voici le dilemme moral dans lequel ces jeunes se retrouvent souvent.
Quel plaisir de voir Daniel Auteuil à l’écran. Toujours aussi bon et juste dans son interprétation. Ici, il aurait été très facile de surjouer le personnage de Pierre Mazard. Mazard, cet homme qui questionne, mais qui, par moments, dérape dans ses réflexions, où sa pensée va trop loin. Cet homme qui veut faire bouger les choses. Mais c’est par la provocation qu’il s’y prend, maladroitement. Mazard est-il vraiment raciste? Je crois qu’il est surtout un type seul, qui a sans doute connu de graves problèmes personnels, qui a besoin de s’en prendre à quelqu’un… ou à l’univers. Le type de personnage qui tombe souvent dans l’excès. Mais Auteuil est splendide.
Et ce fut une belle découverte, pour moi, de voir Camélia Jordana pour la première fois au cinéma. Pas étonnant que la jeune femme se soit vu attribuer le prix du Meilleur espoir féminin à la dernière cérémonie des César pour ce rôle.
Malheureusement, Le brio copie beaucoup trop le modèle hollywoodien pour qu’il reste vraiment efficace. On voit venir les événements à l’avance. Et on connait la fin avant même d’arriver au milieu du film.
C’est dommage, car les performances des acteurs principaux valent le détour.
Les longs monologues, les concours d’éloquence, les duels verbaux entre Camélia Jordana et Daniel Auteuil font de ce film un bon moment. Le brio, bien que très prévisible, reste un film intelligent qui parle de ce qu’est la France aujourd’hui. Mais à la fin, qui profite de qui?
Le brio est présenté au Festival du Film d’Outaouais les 22 et 27 mars 2018, et sort en salles le 23 mars.
Note : 6.5/10
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