« Sors si tu veux te battre! »
Maea, un ancien boxeur samoan, est devenu masseur de femmes enceintes. Quand sa fille enceinte vient chercher refuge chez lui, se mettant à l’abri d’un conjoint violent, Maea, déjà hanté par l’esprit d’une femme décédée, est tourmenté par l’idée de vengeance, alors même qu’il doit prendre soin de sa fille et de l’enfant à naître.
One Thousand Ropes, de Tusi Tamasese, est un drame psychologique dans lequel un père renoue avec sa plus jeune fille afin de retrouver la paix intérieure et de guérir ainsi une blessure commune qui les hante.
Tout au long du film, deux questions nous restent en tête : qui est cette étrange femme qui se tapit dans le coin du salon de Maea; et cet homme est-il bon ou mauvais?
Oui, il y a une femme qui semble vivre dans le coin du salon de Maea. Bien que ce ne soit pas clair au début, cet être prend tout son sens quand on laisse l’histoire se mettre en place. Cette femme est un esprit sans corps. Ne vous en faites pas, il ne s’agit pas d’un « punch ». Avant les campagnes d’évangélisation menées par les Chrétiens en Nouvelle-Zélande, les Samoans croyaient en la réincarnation. Cette étrange femme est donc à la recherche d’un corps pour reprendre sa place sur cette terre. Et comme Maea prodigue des massages à des femmes enceintes, elle l’a choisi pour l’aider à trouver un nouveau corps, ou un utérus, comme elle le dit dans le film. Est-ce que le vieil homme a l’intention de donner à cette femme un nouveau corps? Elle ne l’a certainement pas choisi pour rien.
Ce qui nous amène à la seconde question… La plus jeune fille de Maea s’installe chez lui après avoir été violemment battue par son amoureux. Pourquoi aller chez lui alors qu’elle ne semblait (pas plus que sa sœur) avoir de liens avec lui? Est-ce dans l’espoir qu’il ira démolir l’écœurant qui lui a fait ça? C’est ce questionnement qui nous restera bien ancré dans la tête jusqu’à la fin du film.
Les peuples autochtones d’ici, comme ceux d’ailleurs, sont souvent pris avec le même genre de problèmes : la pauvreté et la violence qui y est souvent reliée. Et les Samoans n’y font malheureusement pas exception. L’exemple de One Thousand Ropes nous laisse une triste image d’une réalité qui l’est encore plus.
Ici, le réalisateur utilise cette violence conjugale pour nous montrer une autre réalité. Les violences gratuites et la vengeance ne font pas partie de chaque être humain, qu’il soit Autochtone ou non. Maea est un homme comme bien d’autres. Il veut aider sa fille. Mais la meilleure façon de l’aider est-elle de la venger physiquement, ou de l’aider à se sortir, par elle-même, de cette mauvaise situation domestique?
Quand sa fille arrive chez lui, vulnérable : sévèrement battue et très enceinte, le père doit continuer sa lutte, d’une part avec la tentation intérieure et l’encouragement des hommes de sa vie à se venger de la façon qu’il connaît le mieux (avec ses poings) et, d’autre part, avec ses démons intérieurs – et la femme dans son salon.
Avec cette trame narrative qui aurait pu donner un film d’action sans profondeur, Tamasese fait de One Thousand Ropes un film profondément émouvant sur les relations interpersonnelles, la rédemption et les nouveaux débuts.
Note : 8/10
One Thousand Ropes est présenté au Festival Présence autochtone le 14 août 2019
Visionnez la bande-annonce :
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