Dans l’un des plus grands studios de jeux vidéo au monde, une équipe en constante évolution travaille à la création de For Honor, un jeu où Vikings, chevaliers et samouraïs s’affrontent sur un champ de bataille épique. Ce jeu, c’est le rêve du directeur de création, Jason VandenBerghe, qui, après plus de 10 ans, voit enfin son projet être accepté par un studio. Le producteur Stéphane Cardin, dont le dernier projet a été un échec, se voit confier les rênes de l’aventure. Luc Duchaine se joint à eux en tant que directeur de marque. La pression est énorme. Le jeu devra être vendu en plusieurs millions d’exemplaires dans les quelques semaines qui suivront le lancement.
De Montréal à Los Angeles, en passant par Cologne, Paris, Moscou et Seattle, Playing Hard de Jean-Simon Chartier offre un accès sans précédent à un univers secret où des joueurs / développeurs façonnent ce qui est devenue la plus grande industrie du divertissement à l’échelle planétaire. Si le jeu est le contexte du film, les personnages et leurs quêtes personnelles en sont le cœur, faisant de Playing Hard une exploration intense, émotionnelle et intime de ce qui se passe quand le jeu devient réalité.
Un reportage n’est jamais chose facile, le « faites comme si j’étais pas là » est toujours facile à dire, mais moins facile à faire… Ici, on suit la vie des personnages, de réalité et non de fiction, pour en découvrir davantage sur la secrète et (très) lucrative industrie du jeu vidéo.
On découvre que les jeux vidéo produits à l’intérieur d’un même studio sont en compétition les uns les autres auprès de la direction et du siège social. Avec toute la pression que ça implique et pose sur les épaules du producteur et des gestionnaires. La magie de ce documentaire est de montrer quand « le jeu devient réalité ». On entre dans un univers moins magique et fantastique que celui d’un jeu vidéo.
Un concepteur, un producteur, et 500 personnes plus tard, un nouveau jeu vidéo innovant, attendu par le public et contre toute attente! Plusieurs équipes prennent d’assaut une idée novatrice, brute de décoffrage et doivent en faire un chef-d’œuvre en quelques mois. Au fur et à mesure, on s’aperçoit qu’ils sont des hommes et non des machines. Ils sont des hommes avec leurs émotions, avec leurs limites, avec leurs enjeux. Les heures de travail, les déplacements, les épreuves s’accumulent. Comme on dit : ça passe ou ça casse…
On est en tête à tête avec la réalité. Dans les jeux, nous n’avons pas affaire à la dépression, à la tension quotidienne; un guerrier, un Viking ou un samouraï se doit d’être fort. Dans la vraie vie, tout ne se décide pas. Un matin, on se réveille et la machine biologique que nous sommes ne fonctionne plus et, là, pas de lignes de code à corriger, pas de concept art à retravailler… Les décisions vont se prendre pour nous… Repos obligatoire, sans crier gare pour remonter la pente, etc.
« L’immortalité arrive quand vous donnez à votre peuple quelque chose dont il avait besoin… et qu’il peut garder quand vous êtes parti », dit Jason VandenBerghe, le réalisateur de For Honor, dès les premières secondes du documentaire. Disons que ça plante le décor!
On cherche toujours à ce que les gens se souviennent de nous, de ce qu’on a fait. Le jeu vidéo est une création, mais il est une forme d’art de production. L’artiste-créateur-penseur-rêveur devra donc laisser sa place doucement à une industrie de fourmis qui feront avancer une œuvre qui deviendra un projet, avec un modèle financier et une chasse aux parts de marché, une distribution, etc. Celui qui a rêvé le concept n’est plus le numéro un du projet. C’est lui qui a amené « ce bébé » à grandir au-delà de ses espérances, mais, à présent, d’autres le choient et s’en occupent. Comment réagir dans ce cas-là? Comment passer à autre chose? Un autre projet?
Innover, encore et toujours. Proposer quelque chose qui va marcher, mais que personne n’a encore réalisé. « La pire des choses, ce serait que quelqu’un travaille sur exactement le même type de jeu et annonce le lancement avant nous. »
L’échec existe aussi, bon nombre de projets sont démarrés, puis tombent à l’eau avant même la sortie ou bien alors sortent et sont un véritable flop… Il faut prendre des risques, mais plus on en prend, plus on risque de se planter, plus on met de pression sur les équipes pour faire avancer quelque chose dont on n’est pas sûr. Finalement, For Honor aura le succès qu’on lui connaît, en quelques heures le million d’utilisateurs sera atteint. Mais à quel prix?
Note : 8/10
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