Dans un dialogue amical et passionné, le docteur Augustin Masset (Kad Merad) et l’écrivain Fabrice Toussaint (Denis Podalydès) se confrontent pour l’un à la fin de vie de ses patients et pour l’autre à sa propre fatalité. Emportés par un tourbillon de visites et de rencontres, tous deux démarrent un voyage sensible entre rires et larmes : une aventure humaine au cœur de notre vie à tous.
Avec Le dernier souffle, Costa-Gavras offre un film philosophique sur la peur de la mort et sur l’acceptation nécessaire de celle-ci afin de trouver la sérénité avant le dernier acte de la vie.
Apprendre à mourir
Je crois qu’on peut dire sans se tromper que la terreur de la mort et l’absence totale de préparation conduisent au refus de l’inéluctable, au caractère de l’absolu. Autrement dit, le refus humain de vivre en mortel. Ce refus, qui est d’ailleurs contourné par toutes les religions, n’a pas réussi à être accepté entièrement et à créer la sérénité. Et c’est exactement ça qui est au centre du plus récent film de Costa-Gavras.
Augustin Masset (Kad Merad) avec une patiente
Mais comment peut-on apprendre à mourir? Pas évident lorsque le simple mot « mourir » crée un malaise. Aujourd’hui, on ne dit pas « il est mort », mais « il est parti ». On ne dit pas « ton père est mort, ta mère est morte », on dit « ton papa s’en est allé ».
La question que pose le réalisateur avec Le dernier souffle est de savoir si la dignité peut aider l’acceptation de la mort. Les soins palliatifs, chez soi ou à l’hôpital, peuvent jouer ce rôle d’aider à cette dignité. Pour l’avoir vécu avec mon grand-père, je crois sincèrement que ce genre de soins aide non seulement le mourant, mais aussi les proches dans leur acceptation.
En utilisant le dialogue plutôt que le flashy, Costa-Gavras réussit avec brio à réfléchir et à faire réfléchir sur la question.
Écriture et performance
Un film de Costa-Gravras, c’est toujours plus qu’une simple « vue ». Avec Le dernier souffle, il propose un essai philosophique sur l’idée de mourir dans la dignité et ce que ça peut apporter au mourant et aux proches.
Ici, d’ailleurs, c’est à la suite de conversations avec Régis Debray et Claude Grange, un philosophe et un médecin, que le film est né. Mais la question demeure la suivante lorsqu’on veut faire un film sur un tel sujet : comment aborder le sujet pour ne pas tomber dans les clichés et les discours vides?
C’est donc par un scénario juste et profond que ça commence, et ça se poursuit avec des performances magistrales de Denis Podalydès et Kad Merad. De par ses deux personnages, le réalisateur se questionne philosophiquement à comprendre quels sont les soins, les soutiens et les conversations nécessaires pour offrir une fin de vie apaisée et respectueuse; comment trouver l’équilibre entre les besoins émotionnels et psychologiques de la personne qui part et de son entourage; et quelle est la préparation intérieure nécessaire pour que le départ soit serein.
En mettant en scène ce philosophe qui sent tranquillement la mort approché dû à son âge qui avance progressivement, tout en l’associant à un médecin qui travaille en soins palliatifs, le réalisateur peut creuser la question tant au niveau physique (soulagement de la douleur, défaillance du corps…) qu’au niveau émotionnel (refus d’accepter sa propre mort, refus des proches de laisser partir un proche qui est prêt…).
Un peu plus…
Depuis la pandémie de Covid-19, une angoisse de fond, intensifiée par l’inquiétude climatique, hante la jeunesse. Ce n’est pas une peur paisible, mais le sentiment tenace et surprenant d’une mort collective, d’une fin du monde imminente. Même les plus jeunes enfants sont obsédés par l’idée que non seulement leur existence, mais l’existence de tous pourrait s’achever bientôt.
Il est donc important qu’on se penche sur les questions de la fin de vie et un film comme Le dernier souffle pourrait être un excellent point de départ. Cela dit, ça reste un film difficile. Pas parce que ce qu’on y dit ou parce que la mise est scène sont lourds. C’est simplement que de regarder et d’écouter des gens philosopher sur l’approche de la mort risque de provoquer les mêmes questionnements chez ceux qui regardent le film. Ce qu’il n’est certainement pas une mauvaise chose en soi. Mais ce n’est jamais facile d’imaginer qu’on a peut-être dépassé la moitié de notre vie. Ou encore plus…
Par contre, il s’agit aussi d’un film qui se regarde bien et qui se comprend bien. On n’en ressort pas avec la tête lourde et le cerveau en bouillis. Juste, peut-être, avec les yeux mouillés.
Voici donc un film à voir absolument!
Le dernier souffle est présenté au festival Cinefranco le 12 novembre 2025.
