blue moon - Une

[FNC] Blue Moon — Un dernier verre

« We write together for a quarter of century and the first show he writes with someone else is gonna be the biggest hit he ever had. Am I bitter? Yes! »
[On écrit ensemble depuis un quart de siècle, et le premier spectacle qu’il compose avec quelqu’un d’autre est le plus grand succès de sa vie. Suis-je amer? Oui!]

Richard Linklater est un des plus grands noms du cinéma américain indépendant. Il a en effet commencé sa carrière vers la fin des années 80 et le début des années 90, une période dans laquelle le cinéma indépendant américain s’est grandement développé, notamment grâce à la fondation du Sundance Institute en 1981 par Sterling Van Wagenen et le regretté Robert Redford et la création du Festival Sundance, véritable terreau fertile pour les cinéastes indépendants, ainsi que par le désir des grands studios de surfer sur cette vague, menant à la création de plusieurs filiales. Linklater fut parmi des réalisateurs phares de ce mouvement avec Kevin Smith, Quentin Tarantino et Steven Soderbergh.

Blue Moon - Affiche

La filmographie de ce dernier se rapproche beaucoup de celle de Linklater, car elle est tout aussi éclectique. Le réalisateur peut passer avec des projets personnels (Dazed and Confused, Everybody Wants Some!!) à des films tout public (School of Rock, Hitman), en passant par des projets plus expérimentaux (A Scanner Darkly, Waking Life). Cependant, un aspect que beaucoup de cinéphiles retiennent de lui est comment il utilise le passage du temps au sein de ses films. Il peut aller dans les extrêmes, comme avec Boyhood et son projet en développement Merrily We Roll Along, dont les tournages durent entre 10 à 20 ans (le dernier film devrait sortir en 2040), ou il base toute son action en une fraction de temps, sa trilogie Before se déroulant en une journée et son plus récent film, Blue Moon, lors d’une soirée.

Le film s’attarde sur Lorenz Hart, un grand parolier américain ayant composé de célèbres comédies musicales et de grands classiques de la chanson comme My Funny Valentine, Manhattan ou bien Blue Moon. Le film se déroule sept mois avant sa mort, plus précisément le 31 mars 1943, soir de la première de la pièce Oklahoma!, composé par son ex-collaborateur Richard Rodgers. Hart quitte la pièce avant la fin et se retrouve au Sardi’s, là où la soirée de célébration de la première doit avoir lieu. Il fait le point sur sa vie, sa carrière et ses relations amoureuses, discutant avec le barman et les autres clients.

À la manière des autres films de Linklater, l’action du film est dans un contexte relativement simple. Il n’y a pas de grands artifices de mise en scène, le film se posant surtout avec son scénario, ses dialogues et ses performances d’acteurs, tout étant parfaitement maitrisés.

Ici, il n’y a que quelques personnes qui discutent. Mais si c’est plutôt Lorez Hart qui parle, racontant tout et n’importe quoi au barman et au pianiste du bar, ainsi qu’à la présence inattendue de l’essayiste E. B. White, bien avant qu’il écrive ses livres pour enfants Stuart Little et Charlotte’s Web. C’est un des nombreux liens qu’apporte Linklater sur la relève artistique, avec notamment la présence d’un jeune Stephen Sondheim, critiquant la musique de Hart comme dans la vraie vie, ou un personnage nommé George Hill qui veut devenir réalisateur, référence au cinéaste George Roy Hill de The Sting.

L’apparition de ces vedettes artistiques en devenir, ainsi que toute l’histoire du succès d’une pièce que son ami a écrite sans lui, servent à mieux comprendre toute la psychologie du personnage principal. Celle d’un grand artiste dont l’alcool, son caractère abrasif et son inhabilité de sortir complètement du placard l’ont rendu difficile auprès de ses proches et son égo prenant toute la place dans une pièce. Le fait qu’il n’arrête pas de tout le temps parler montre aussi son envie d’être remarqué et apprécié parmi la masse. En une seule soirée, on arrive à cerner tout ce qui modèle Lorenz Hart. Il est ici une figure fragile qui est magnifiquement interprété par un Ethan Hawke méconnaissable, que ce soit avec sa coiffure improbable et même tout le jeu de mise en scène pour le rendre plus petit.

Les autres acteurs ne sont pas en reste. À commencer par Margaret Qualley et Andrew Scott, qui jouent respectivement Elizabeth, la protégée de Hart, et Richard Rodgers. Chacun ayant leurs moments forts avec Ethan Hawke, leur personnage créant également une super dualité avec celui de Hawke. Mais il ne faut pas négliger les rôles plus secondaires, surtout le barman joué par Bobby Cannavale, un acteur très sous-estimé qui est pleinement mis en valeur dans le film.

Blue Moon est un film simple, mais c’est là qu’il trouve sa force, comme les autres films de Linklater. À travers d’excellents dialogues et performances d’acteurs, cette petite soirée au bar cache un magnifique portrait humain d’un maître de la musique américaine.

Blue Moon est présenté au FNC les 12 et 17 octobre 2025.

Bande-annonce  

Fiche technique

Titre original
Blue Moon
Durée
100 minutes
Année
2025
Pays
États-Unis
Réalisateur
Richard Linklater
Scénario
Robert Kaplow
Note
8 /10

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Fiche technique

Titre original
Blue Moon
Durée
100 minutes
Année
2025
Pays
États-Unis
Réalisateur
Richard Linklater
Scénario
Robert Kaplow
Note
8 /10

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