Peau à peau - Une

Peau à peau — Face à face

« La première fois que je t’ai vu, je t’ai pas reconnu tout de suite. »

Peau à peau - affiche

Hantée par la mort horrible de sa sœur, une jeune mère insomniaque sombre dans une dépression post-partum.

Passe-Partum

Depuis plusieurs années déjà, l’expression au cinéma se fait de plus en plus au féminin. Dans les hautes sphères de l’industrie, on remarque la montée de femmes comme Coralie Fargeat, Greta Gerwig, Jane Campion; pour ne nommer que quelques réalisatrices. Plus localement, on voit une explosion des réalisations orchestrées par des femmes, mais aussi l’écriture ainsi que toutes les sphères qui s’y rattachent. Les réalisatrices ont un impact direct sur la création de personnages féminins. En 2019, par exemple, 84% des premiers rôles dans les films de réalisatrices étaient attribués à des femmes, comparativement à 72 % dans les films de réalisateurs. Même les hommes ont emboîté le pas et vous savez quoi, ça fait du bien de voir autre chose que des Alphas dominants et des femmes faibles.

Peau à peau - Passe-partum
Pénélope (Rose-Marie Perreault)

De mon côté, c’est le film réalisé par Anne Émond qui m’a le plus marqué cette année avec Amour Apocalypse. C’est donc évident que la vue de la bande-annonce de Peau à peau, écrit et réalisé par Chloé Cinq-Mars, m’inspirait déjà un autre chef-d’œuvre. En fin de compte, j’ai aimé, mais il a fallu quelques pirouettes mentales pour me garder concentré. Ce n’est pas mauvais loin de là. J’étais simplement déçu de sentir qu’avec un aussi bon départ, la fin est un peu précipitée à mon goût et on n’explore pas assez progressivement la folie croissante de la protagoniste interprétée par Rose-Marie Perreault. Il y a selon moi un certain laisser-aller parfois quand vient le temps de terminer quelque chose et que la dopamine s’estompe.

Avoir un enfant fonctionne de la même manière que de mettre à bas un projet. L’idée, au départ, est plaisante, mais la gestation et l’accouchement, c’est souvent une autre paire de manches. Le pire, c’est que même après sa venue au monde, le processus en soi n’est pas encore terminé; il faut encore savoir en prendre soin. Les épisodes postpartum sont de plus en plus reconnus par la science moderne, entre autres justement grâce à cet œil au féminin qui permet maintenant d’avoir une notion à la fois plus large et plus précise du monde. Ne vous inquiétez pas, je ne passerai pas mon temps à « hommespliquer » comment on se sent, j’y connais pas grand chose. À part une chose, les effets sont non négligeables, car ils peuvent être néfastes, voire dangereux, pour la vie de la mère et même du bébé.

Plus qu’un petit monde

Pénélope (Rose-Marie Perreault), ou Pen de son petit nom, semble avoir la vie parfaite; un beau bébé, un gentil copain, une belle maison, une voiture, alouette. Cependant, sous ces apparences paradisiaques, la Belle se sent tout autrement. Incapable de retrouver l’amour de son corps, elle cherche comme elle peut à s’oublier, et surtout son bébé, dont les cris sont un rappel constant de sa détresse intérieure. Parlant de cris, ses pleurs sont omniprésents tout au long du récit provoquant toutes sortes de réactions et de sensations angoissantes pour elle, mais aussi pour le spectatorat. De l’anxiété à la paranoïa, la mort de la sœur de Pénélope, Charlotte, dont le rôle est tenu par Marie Bélanger, le fantôme de cette dernière la hante sans relâche, sabotant de plus en plus son regard sur elle-même.

Peau à peau - Petit monde

À ce niveau, le film est très intéressant à regarder. On ose des plans avec des angles ainsi qu’une luminosité – ou plutôt un ombrage – qui nous sortent des plans classiques et mécaniques des séries qu’on voit ici. C’est rare que c’est en suivant les règles qu’on risque d’innover et pour ça Peau à peau n’a que des félicitations à recevoir; d’autant plus que l’horreur n’est pas quelque chose qui charme vraiment les diffuseurs chez nous. Pourtant, il n’y a pas de raison claire à ce pourquoi ces projets ne sont pas souvent financés au profit d’œuvres plus, disons… adéquates.

On voit quelque chose dont on parle peu et que l’on garde tabou au sujet des relations parents-enfants. En effet, lorsqu’on pense à une mère et son bébé, on s’imagine immédiatement une scène douce avec une lumière chaude et deux êtres heureux. C’est pourtant l’inverse qui défile sous nos yeux alors que la réconciliation avec le vide apparent qui se dresse devant Pénélope semble irréalisable. J’en reviens au pleurs incessants du poupon de quelques mois à peine qui pourrait nécessiter une forme d’avertissement du genre : « Attention, certaines scènes pourraient déclencher des réactions parentales involontaires ».

Guide pour les mamans

On peut aussi dire que le titre choisi, Peau à peau, est très astucieux. Ça m’a permis d’en connaître davantage sur les études de plus en plus répandues sur les phénomènes de l’Homme au féminin. Le cinéma n’est pas juste un endroit où on exprime seulement la valeur et la grâce humaine. Il arrive souvent que l’on veuille souligner une faiblesse, une bassesse ou un échec; parce que la vie c’est aussi cela. 

Peau à peau - Guide pour les mamans

Le peau à peau est une méthode où un bébé (prématuré ou à terme) est placé nu sur la poitrine d’un parent, ventre contre ventre, pour créer un contact direct entre leurs peaux. Cette pratique, parfois appelée méthode Kangourou, offre des bienfaits importants, comme la régulation de la température et des fonctions vitales du bébé, le calme, le développement de l’attachement et la facilitation de l’allaitement. Le contact peau à peau peut être pratiqué dès la naissance et se poursuivre à la maison, favorisant ainsi le lien parent-enfant. 

Finalement, mon seul regret c’est d’avoir senti qu’on laissait un peu les types comme moi à l’écart. Une sensation quelque peu sectaire. C’est-à-dire que malgré toutes les études qui entourent la chose, j’ai toujours la chair de poule quand je pense à celles qui essaient de justifier le sujet de la violence mère-enfant pareil à des films ou des documentaires comme Witches de Elizabeth Sankey. Mis à part cela, il manquait à mon avis un petit je-ne-sais-quoi évoquant les analogies subtiles que Mary Shelley utilisait pour transformer l’extase de la création de la vie, en une horreur palpable bien au-delà du spectre de la peur ou de l’anxiété. Néanmoins, c’est un bon film, fait avec une expertise ou, du moins, un talent notable. À vous maintenant d’en juger, cher lectorat.

Bande-annonce  

Fiche technique

Titre original
Peau à peau
Durée
103 minutes
Année
2025
Pays
Québec (Canada)
Réalisateur
Chloé Cinq-Mars
Scénario
Chloé Cinq-Mars
Note
8 /10

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Fiche technique

Titre original
Peau à peau
Durée
103 minutes
Année
2025
Pays
Québec (Canada)
Réalisateur
Chloé Cinq-Mars
Scénario
Chloé Cinq-Mars
Note
8 /10

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