« L’appartement est étrange Joo-young! »
Les réalisateurs de films d’horreur le savent bien : la terreur et l’angoisse peuvent venir de toutes sortes d’horizons. Ça peut être des peurs primales comme les ténèbres et la mort, de dangereuses créatures autant fictives que réelles, et même des choses anodines du quotidien qui peuvent prendre une allure inquiétante. Un visage qui peut rendre mal à l’aise, un élément qui ne semble pas être à sa place ou bien un simple son dont l’étrangeté peut perturber. C’est cette dernière approche qui a inspiré le réalisateur coréen Kim Soo-jin lorsqu’il a entrepris de faire son premier long métrage, Noise, qui a eu droit à sa première nord-américaine au Festival Fantasia.
Le film suit Joo-young, une jeune femme malentendante, qui apprend la disparition de sa petite sœur Ju-hee. Elles se sont séparées en mauvais termes, Joo-young étant exaspérée par le comportement de sa sœur, perturbée par le bruit venant de l’appartement du haut. Cependant, alors que Joo-young s’établit dans son appartement à la recherche de Ju-hee, elle découvrira les terrifiants secrets de son complexe et finira par entendre elle-même ce mystérieux bruit.
La prémisse du film est intéressante et rappelle de grands titres du cinéma asiatique comme Ju-on de Takashi Shimizu ou bien Dark Water d’Hideo Nakata, notamment dans la façon de transmettre l’horreur au sein d’une résidence banale. Cependant, Kim Soo-jin arrive à proposer un film qui lui est propre.
Cela se voit surtout avec tout le minutieux travail qui a été fait sur le son. En effet, puisqu’il s’agit du principal concept du film, il était évident qu’une attention particulière devait y être apportée et ça n’a heureusement pas été négligé. Tout le sound design du film est excellent, que ce soit en jouant avec la surdité de la protagoniste, avec le fameux bruit de l’appartement du haut qui donne son titre au film, ou bien avec les sons plus surnaturels qui perturbent les personnages et les spectateurs. Tout ce travail sur le son permet au long métrage de se démarquer. Mais le réalisateur arrive également à jouer avec le son de différentes manières. Le meilleur exemple étant l’utilisation par la protagoniste d’une application qui permet de retranscrire des voix ambiantes et qui amène de bonnes scènes effrayantes.
Si le son a reçu une attention particulière, c’est aussi le cas pour le lieu de l’action. À la manière des manoirs de Rebecca, de The Haunting et de Crimson Peak, le complexe d’appartements de Noise est un personnage à part entière. Le lieu possède une histoire et des secrets, un look qui le rend parfaitement identifiable et une atmosphère qui le met en valeur. Le réalisateur met aussi en lumière les autres locataires, les plus accueillants tout comme les plus inquiétants. De cette manière, Kim Soo-jin joue aussi sur la peur des autres, de ne pas savoir quels types de personnes sont nos voisins et d’imaginer le pire quand on entend des bruits étranges.
On peut cependant reprocher au film d’avoir trop d’idées. Kim Soo-jin réalise ici son premier film, qui pourrait possiblement être son dernier. Il est donc normal de mettre le plus possible ses obsessions et ses idées à l’image. Cependant, à ne pas se limiter à certaines idées, il met beaucoup trop de points scénaristiques. Entre l’enquête pour retrouver Ju-hee, le fameux son, les possibles fantômes dans le complexe, les personnes qui se font posséder ou bien le twist final, tout n’arrive pas à se regrouper dans le climax et finit par rendre confus le spectateur avec certains éléments qui restent inexpliqués, ce qui rajoute quand même à l’ambiance mystérieuse du film.
Si Noise reste imparfait sur certains aspects, il reste que ce premier film montre tout le potentiel de ce jeune réalisateur qu’est Kim Soo-jin. S’il continue dans cette voie et prend plus de contrôle au fur et à mesure qu’il réalise des films, il pourrait très certainement devenir un grand nom du cinéma d’horreur sud-coréen.
Noise est présenté au Festival Fantasia, le 17 juillet 2025.
Bande-annonce
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