« Nous devons y aller. Les adultes sauront quoi faire. »

Achraf et Nizar ont 13 et 14 ans respectivement et sont cousins dans un petit village de Tunisie près des montagnes Mghila, en 2015. Acharf (Ali Helali) ne va plus à l’école depuis que son père est parti en Algérie, car sa mère ne parvient plus à s’occuper seule des tâches de la maison et de la ferme. Un matin, Nizar (Yassine Samouni) amène son jeune cousin dans les montagnes pour y nourrir leurs chèvres, malgré l’interdiction de Mounir, le grand frère de Nizar. 

Leur escapade se termine tragiquement, lorsqu’un groupe djihadiste les attaque et décapite Nazir. Acharf est épargné uniquement pour rapporter la tête, afin que cela serve d’avertissement à la communauté. 

Lotfi Achour, le réalisateur et co-scénariste, nous offre un deuxième long-métrage basé sur une histoire vraie, soit le récit intime d’une famille qui vit un deuil tragique.

Narration onirique

Lotfi Achour nous raconte l’histoire d’Acharf en alternant entre la dure réalité et l’imaginaire du jeune garçon. Pour ce faire, la majorité du film est filmée dans un style quasiment documentaire, renforçant le réalisme et la proximité des horreurs que vit cette famille. Cependant, lorsqu’Acharf tombe dans une rêverie ou tente de faire sens de son traumatisme, le visuel devient enchanté, presque mystique. 

Plus le film progresse, plus la réalité et la rêverie deviennent liées, spécialement au moment où Acharf se fait demander de revenir sur la scène du crime, pour aller récupérer le reste du corps de son cousin Nizar. Devant faire face à son traumatisme, il se met à voir Nizar sur le chemin et parvient à lui parler, brouillant la frontière entre les deux mondes.

Pour qui est l’enfance?

Le film est très frontal dans le message qu’il veut nous montrer. Nous savons tous que les enfants souffrent de la guerre, mais la souffrance prend diverses formes. 

Acharf doit quitter l’école et même s’il tente de se montrer indifférent à la situation, une scène avec son amie Rahma (Eya Bouteraa) nous montre qu’il regrette de ne pouvoir aller à l’école. Il doit déjà prendre des responsabilités d’adultes, en devenant l’homme de la maison. 

De plus, réalisant que les autorités locales n’iront pas récupérer le reste du corps de Nizar dans la montagne, il est mandaté par sa famille de les guider pour retrouver son cadavre, afin de leur permettre d’effectuer les rites funèbres. 

On en vient à oublier que les acteurs principaux sont des jeunes adolescents, tant ils doivent prendre des décisions difficiles et vivre des expériences qu’aucun enfant ne devrait vivre. Et le jeune Ali Helali, qui interprète Acharf, nous livre une interprétation magnifique. Il parvient à se montrer fort et vulnérable, selon la scène. Il porte le film sur ses épaules avec brio, tout comme ses co-stars Yassine Samouni et Eya Bouteraa, qui jouent avec un naturel qui crève l’écran. 

Devoir de conscience

J’aimerais finir par une déclaration de Lotfi Achour : « Quand on attaque les enfants, c’est toute une génération qui sera perdue. »

Les enfants rouges est présenté au Festival Vues d’Afrique, le 8 avril 2025.

Bande-annonce