YOUNG WERTHER - Une

Young Werther — Ce qu’on doit retenir

« We held hands. Paul, while running it is the most intimate thing one person can do. »
[Nous nous sommes tenus la main. Paul, en courant, c’est la chose la plus intime qu’une personne puisse faire.]

Young Werther - Poster

Werther (Douglas Booth), un jeune écrivain insouciant et charmant, tombe par hasard sur l’amour de sa vie et découvre qu’elle est fiancée (Alison Pill). Contre les insistances de sa meilleure amie, Werther bouleverse son monde dans une quête malavisée et hilarante pour gagner son cœur.

Une chose à la fois

Après avoir célébré le Nouvel An, on reprend notre petite vie ordinaire malgré qu’on ait promis entre deux bouchées de dinde que, l’année prochaine, ça serait différent. On veut mettre de la magie ou un peu de piquant dans notre vie, mais les opportunités se présentent sans que nous sachions quoi faire puisqu’il est bien plus difficile de changer que de ne rien faire. L’être humain est probablement une des créatures les plus résilientes qui soient. Combien d’entre nous sont prêts à endurer une situation qui ne leur est pas favorable pour maintenir l’équilibre et l’harmonie dans leur vie? Les amitiés, une profession ou la famille; est-ce plus important que l’amour? C’est la Saint-Valentin le mois prochain, déjà.

Avec tous les souhaits que j’ai faits pour un monde plus harmonieux cette année, je me questionne également sur le sens de l’amour. Est-ce que l’amour c’est avoir des enfants ou une maison; une stabilité? L’affection, le désir et le confort… sont-ce des termes qui définissent les sentiments du cœur ou leur avons-nous étiqueté un sens qui ne leur appartient pas? Je crois que — comme l’avait si bien chanté Nicola Ciccone — l’amour n’est qu’un seul mot. Les choix que nous posons vont dans ce sens ou non. 

Young Werther - Une chose à la fois
La fiancée (Alison Pill)

Young Werther est une comédie romantique apparemment innocente qui porte tout de même à réfléchir au concept de l’amour romantique. On commence de façon dramatique avec un homme encravaté dont le charme rend sa coupure au front quasiment saillante. C’est ainsi que ce bel homme nommé Werther (rien à voir avec les bonbons au caramel) monologuant sa misère à travers les événements qui l’amenèrent à se retrouver seul au beau milieu de nulle part associe l’odeur du tilleul à celui du sperme chaud. Dooglas Booth interprète ce symbole du nouvel homme parfait; soigné et portant des vestons cravate sans occasion particulière, dégourdi autant physiquement que mentalement, beau parleur insaisissable à un cheveux d’être perçu comme un pervers narcissique. 

Le feu aux poudres

L’honnêteté de nos jours est chose plutôt rare. Les gens en général semblent avoir pris l’habitude d’être poli à la place de gentil tellement que la franchise paraît parfois comme étant une autre facette de cette hypocrisie. L’ironie c’est que l’on finit par avoir l’air malhonnête, manipulateur, ou tout simplement effrayant (comme un méchant harceleur). Décidément, Werther et moi nous ressemblons bien plus que je ne le crois; à une exception près. Notre jeune trentenaire — résidant à nul autre endroit que Westmount à Montréal — est bien entendu très bien nantie, ce qui lui permet quelques folies que la plupart de ses congénères masculins ne sauraient se permettre sans se ruiner. Il est un écrivain qui fait de l’argent parce que… et bien son père est riche en tabarnak comme dirait l’autre. Sans trop de raison d’être autre que l’hédonisme, Werther s’entiche d’une jeune robot… Euh femme, interprétée par Alison Pill (désolé de la confusion, des reflux de Star Trek Picard), alors qu’elle prend une crème glacée pour son anniversaire.

Apparemment non accompagnée, c’est avec une face de morse triste que notre protagoniste apprend que la belle Charlotte est fiancée à un ingénieur (ou architecte) accompli qui gagne bien sa vie et tout, et tout. Ça, c’est pour pas qu’on croit que l’argent n’a aucun rôle à jouer dans l’appréciation que Charlotte porte sur l’un ou sur l’autre de ses prétendants. En même temps, Werther est un peu weird… la fille à clairement un fiancé qu’elle aime et il ne la lâche pas comme s’il ne pouvait pas s’engouer de quelqu’une d’autre, quelqu’un point, puisqu’il est ouvertement pas regardant là-dessus. Il va même jusqu’à devenir très bon ami avec le fiancé de Charlotte, interprété par Patrick Stewart… Euh, je veux dire Patrick J. Abrahams… euh Adams. (coudonc, c’est ben compliqué). Que de justifications maladroites pour que son amour semble le plus sincère qui soit. 

Young Werther
José Avelino Gilles Corbett Lourenço

J’avais de vagues impressions de The Note Book et cela n’était pas une mauvaise chose entièrement. Comment une femme peut aimer deux hommes également? Ça me semble être ça l’idée derrière tout ça. C’est à Charlotte que revient le choix de décider quel genre de vie elle veut mener; avec qui n’est peut-être pas le plus grand de ces soucis, car finalement elle obtient le beurre et l’argent du beurre. Je crois que l’on peut aimer plusieurs personnes, je crois aussi que d’être amoureux n’empêche pas de vivre; je ne parle pas sur deux jours ou deux mois, mais regardez sur 20 ans (et si vous ne le pouvez pas, attendez encore avant de croire que vous avez tout vu). Charlotte n’a pas une vie malheureuse, mais se sent-elle épanouie? Pas vraiment. Elle a maintenant un engagement avec Albert, son fiancé, ainsi qu’une famille de deux enfants.Il est difficile de croire que dans ces circonstances on veuille tout laisser tomber pour tout recommencer comme dans un jeu vidéo; une nouvelle partie, ça vous dit? Toutefois, la vie ne fonctionne pas comme ça.

Brûler les étapes

La seule chose qui différencie réellement Werther d’Albert, est la disponibilité ou le temps qu’ils ont à consacrer à Charlotte. Pourquoi? Parce qu’Albert travaille et pas Werther. Ça me fait penser à un cas d’ennui trop typique pour que je puisse sympathiser avec les personnages et les problèmes qu’ils ont à surmonter. Y’en a pas marre à la fin de toujours voir la vie tragique des gens riches et célèbres (ou de quoi de même)? La nouvelle épistolaire de 1774 rend sans doute justice avec bien plus d’élégance qu’un scénario précipité. On installe maladroitement la chimie entre les personnages, iels rigolent et mangent des crèmes glacées, vont dans les musées, regardent secrètement des photos de l’autre chacun de leur côté; un béguin tout au plus. Après tout, c’est quoi le temps d’attention moyen d’une personne en 2025 déjà? 0.02 secondes, qu’on dit? Les gens ont plus de temps pour vivre que jamais auparavant et sont pourtant tellement pressés que rien de véritablement profond ne semble pouvoir s’installer en eux. 

De nos jours, l’amour se résume à avoir du bon sexe (je souligne le mot « bon »), pas avoir de différents (donc, aimer les mêmes choses) et donner des cadeaux. C’est tout de même hilarant de constater que Werther se présente comme un écrivain romantique alors que sa vision de l’amour est superficielle autant que celle qu’il convoite. Un amour viscéral ça ne se discute pas, mais ça se vit avec plus de force qu’un simple coup de foudre. Il doit y avoir une preuve irréfutable et indéniable — même si elle reste tacite — de ce sentiment réciproque et contraignant comme la gravité qui régit l’univers dans lequel nous habitons. Les corps qui s’attirent sont bien plus que physiques lorsqu’ils sont célestes. Young Werther accomplit tout de même cette tâche ingrate et difficile qu’est de banaliser l’intensité que ce genre d’attachement soudain peut provoquer.

C’est effectivement rare de voir une comédie romantique prendre une avenue autant moralisatrice. C’est à se demander si les points apparemment faibles ne sont que le parfait constat des tentations auxquelles nous sommes — nous, contemporains — amenés à faire face. L’immédiateté et l’instantanéité seront des fléaux pour les générations à venir puisque cette quête de sensations fortes nous amènera irrévocablement vers l’impulsivité des désirs éclipsant nos besoins. Dans une société où bon nombre d’entre nous avons le privilège de vivre sans penser à se loger où se nourrir, ce pourrait-il que les besoins criants de l’âme deviennent moins sourds? J’ai l’impression que 2025 sera marqué par cette reconsidération de la profondeur nécessaire d’une chose pour qu’on la qualifie avec amour plutôt qu’avec affection. À quoi bon se raconter des histoires entre nous pour ne pas se froisser ou se faire de peine? Il ne faut pas se duper soi-même. Pour toujours ou juste pour faire un tour, je vous souhaite d’apprécier Young Werther peu importe le temps que ça va durer.

Bande-annonce  

Fiche technique

Titre original
Young Werther
Durée
101 minutes
Année
2024
Pays
Canada
Réalisateur
José Avelino Gilles Corbett Lourenço
Scénario
José Avelino Gilles Corbett Lourenço et Johann Wolfgang von Goethe
Note
7.5 /10

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Fiche technique

Titre original
Young Werther
Durée
101 minutes
Année
2024
Pays
Canada
Réalisateur
José Avelino Gilles Corbett Lourenço
Scénario
José Avelino Gilles Corbett Lourenço et Johann Wolfgang von Goethe
Note
7.5 /10

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