« Quatre des sept ovules ont été fécondés avec succès. Il faut maintenant attendre qu’ils se développent. »
Lorsque sa fille, Zuer (Eugenie Liu), meurt dans un accident, Jin (Sylvia Chang) s’envole pour New York et découvre qu’elle est responsable de l’embryon de Zuer. Mais avec le sort de l’embryon entre ses mains, elle doit affronter sa première fille, Emma (Karena Lam), que Jin a abandonnée après une grossesse à l’adolescence. Les regrets du passé et les responsabilités futures entrent en collision.
Avec Daughter’s daughter (女兒的女兒), Huang Xi propose une œuvre poignant sur le deuil et la maternité. Et elle pose la question suivante : peut-on se racheter lorsqu’on a été une mauvaise mère?
Daughter’s daughter met en scène une histoire racontée mille fois, soit une mère et sa fille qui ne s’entendent pas, qui sont en chicane. Mais là où ça devient intéressant, ici, c’est que la réalisatrice ajoute une autre fille, née d’une relation précédente, alors qu’elle n’était qu’une adolescente. Et parce que la culture chinoise en est une dans laquelle les familles ne jettent pas les aînés à la poubelle, on se retrouve aussi avec la grand-mère, avec qui la relation est, aussi, tendue.
A priori, on pourrait croire que cette histoire tournera rapidement au ridicule, mais ce n’est pas du tout le cas. Une partie de la force poignante de Daughter’s Daughter vient de la manière élégante avec laquelle Huang glisse en douceur d’avant en arrière dans le temps afin de présenter les relations qui unissent les personnages.
Les relations qui unissent ces 4 femmes sont complexes dues aux différents secrets qui les ont séparés. Non seulement Emma et Zuer ne se connaissaient pas jusqu’à ce que les deux femmes soient dans la trentaine, mais la famille de Zuer ne savait pas, non plus, qu’elle était en couple avec une femme jusqu’à très tard dans la relation. Toutes ces femmes se retrouvent soudainement en contact lorsque Jin se blesse et se retrouve à l’hôpital.
C’est là que non seulement Huang en profitera pour traiter des relations mère-filles et de ce que c’est que d’être maman, mais ce sera aussi l’occasion de traiter de deux autres sujets : l’homosexualité et la conception d’un bébé pour un couple de deux femmes.
Lorsque Zuer et sa partenaire décident d’essayer de tomber enceintes par fécondation in vitro, elles finissent par se rendre aux États-Unis pour suivre des traitements. Malheureusement, le couple décède dans un accident, mais leur embryon reste vivant et en bonne santé – et Aixia Lin en est la tutrice légale. À son arrivée à New York, accablée de chagrin, elle doit faire un choix : faire don de l’embryon, le détruire ou trouver une mère porteuse pour l’embryon et devenir la mère par adoption du bébé. Mais après une vie passée à se sentir incapable en tant que mère, qui est-elle pour décider quoi faire de l’enfant à naître de sa fille décédée?
Au cœur du film, on retrouve donc la question de la procréation assistée, mais aussi l’éthique qui entoure cette pratique. Évidemment, la situation que l’on voit dans ce long métrage n’est pas fréquente. Et c’est probablement ça qui la rend si intéressante, car au-delà de l’histoire familiale, c’est cette question de quoi faire de l’embryon qui est obsédante.
La réalisatrice pose donc son regard tendre sur cette femme qui a passé une bonne partie de sa vie à fuir ses responsabilités de mère et qui se retrouve maintenant à la croisée des chemins. Quoi faire lorsque sa fille qu’elle aimait réellement malgré l’éloignement, meurt et demande comme dernier souhait, que sa mère s’occupe de son bébé à naître?
Au final, Daughter’s daughter est un film lent, qui amène le spectateur à se questionner sur la vie et sur ce que ça représente d’être parent. Jamais on ne sent de jugement de la part de Huang Xi.
La réalisatrice à un grand respect pour son sujet qu’elle traite presque comme s’il s’agissait d’un documentaire, mais avec une intrigue typique de la fiction. Le résultat est parfaitement réussi.
Daughter’s daughter est présenté au TIFF les 5, 11 12 et 13 septembre 2024.
Bande-annonce
© 2023 Le petit septième