« Une ode respectueuse à l’orgasme féminin au Rwanda »
Guidé par Vestine, star extravagante des nuits radiophoniques, le film part à la découverte de la sexualité rwandaise, en quête de l’eau qui jaillit du corps des femmes et nous dévoile avec humour et spontanéité le mystère de l’éjaculation féminine. L’eau sacrée confronte le public occidental à sa propre intimité et vous immerge dans la société rwandaise d’aujourd’hui par son héritage le plus secret : le plaisir féminin.
Un film sur l’éjaculation féminine… Pourquoi pas? Un sujet peut-être trop montré par les pornographes, mais très peu traité de façon sérieuse. Et voici qu’un homme décide de traiter du sujet. Mais pas avec des femmes américaines, ni avec des Canadiennes ou des Françaises. Non. Avec des Rwandaises. Et le tout financé sur le site de sociofinancement KissKissBankBank.
Pourquoi est-ce qu’Olivier Jourdain a décidé de parler de ce sujet? « En lisant plusieurs écrits, j’ai découvert une culture du plaisir, mais aussi du devoir, avec ses codes et coutumes qui accompagnaient l’individu de sa plus tendre enfance jusqu’à sa mort. S’agissait-il d’une sorte de Kâma-Sûtra africain? Les Rwandais étaient-ils héritiers d’une autre façon de faire l’amour, jusqu’à ce jour? Le plaisir féminin y est-il vraiment central? », expliquait le réalisateur en entrevue.
L’éjaculation féminine – ou kunyaza – semble faire partie de la culture rwandaise. Elle a même son propre mythe, selon lequel une reine aurait éjaculé le lac Kivu…
Avec son approche anthropologique, le réalisateur nous fait découvrir une vision de la sexualité totalement à l’opposée de la vision occidentale où l’apprentissage se fait la plupart du temps de manière individuelle. Au Rwanda, il semble que ce soit une histoire
qui concerne tout le monde.
Jourdain ne fait pas, ici, l’apologie de cette pratique, ni même un pamphlet en faveur du sexe. Il s’intéresse plutôt à une culture de la sexualité, à une transmission de savoir et à une autre conception du « vivre ensemble ».
Pour parvenir à réaliser L’eau sacrée, le réalisateur a dû user de patience. Il explique que « [a]près avoir mis quelques années à assumer le sujet (pas facile pour un homme, blanc de surcroît), je suis parti tourner 3 fois entre 2013 et 2015 pendant chaque fois 3 mois. Il était essentiel pour moi d’avoir du temps, de chercher, d’écouter, de gagner la confiance. J’étais souvent seul, avec un(e) interprète, en fonction des situations. » Mais c’est sa rencontre avec Vestine qui a tout changé. Grâce à son statut de star locale, elle aura permis au réalisateur de pénétrer l’intimité des gens. Puis, petit à petit, il aura su gagner leur confiance.
Avec L’eau sacrée, on a droit à une autre vision du Rwanda. Souvent montré par les horreurs qui s’y sont passées par le passé, c’est vivifiant de voir un film positif sur ce pays en reconstruction. Un film sur des êtres humains, qui ont une vie, une culture, et qui sont acteurs de cette vie et non pas seulement des êtres soumis à une réalité qu’ils ne maîtrisent pas.
Note : 8/10
* Le film est présenté au Festival Vues d’Afrique.
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