Nelly – Putain

Et je me suis mise à vieillir à toute allure…

Nelly - AfficheUn film librement inspiré de la vie et de l’œuvre de Nelly Arcan. Le portrait d’une femme fragmentée, perdue entre ses identités irréconciliables d’écrivain, d’amoureuse, de putain et de star. Plusieurs femmes en une seule, naviguant entre grandes exaltations et grands désenchantements. Un film à l’image d’une vie violente et d’une œuvre radicale; un hommage à une écriture dense, glaçante et nécessaire.

D’entrée de jeu, je dois avouer que lorsque j’ai vu qu’un film sur la vie de Nelly Arcan serait tourné, j’ai tout de suite eu le sentiment que ça ne pouvait être bon. Disons que c’est le genre de film qu’on n’est pas capable de faire au Québec. Mais, lorsque j’ai vu qu’Anne Émond serait à la barre de Nelly, je me suis dit : peut-être… Malheureusement, mon sentiment était fondé.

Du positif

Tout n’est pas mauvais dans Nelly. La musique composée par Dear Criminals est tout simplement parfaite. Le groupe réussit à faire passer l’émotion sans que la musique prenne toute la place. C’est donc grâce à une présence forte, mais toute en subtilité, que la trame musicale crée une ambiance digne de l’auteure. Le choix des Dear Criminals n’est certainement pas un hasard. Leur côté minimaliste et leur style ténébreux faisaient d’eux le groupe parfait pour mettre en musique la vie de Nelly Arcan.

Il y a aussi l’image. Parfois floue, parfois léchée et par moments plus crue, elle permet de faire passer les sentiments et les états d’âme du personnage.

Mais malheureusement…

Bien des choses m’ont dérangé dans Nelly. À commencer par le fait

Scène du film Nelly
Nelly (Mylène Mackay)

que la réalisatrice ne pousse rien. Elle reste toujours en surface. Pourquoi aborder la famille pour ne la montrer qu’une fois, sans rien dire de pertinent, sinon que la jeune Nelly (Isabelle) s’est fait tirer au tarot par on ne sait qui dans le film. Selon certains biographes, il s’agirait de sa tante. Mais pourquoi mettre ça dans le film si ça ne sert à rien. Jamais on n’en reparle et aucun lien n’y est fait. Même chose pour ses parents. On montre la mère qui est allongée et le père qui demande à Isabelle de ne pas crier, car sa mère dort. Ça ne sert à rien si on ne va pas plus loin afin d’explique que sa mère était toujours fatiguée et, donc, peu présente pour ses enfants… Mais rien.

D’ailleurs, ces petites scènes sans intérêt rendent le film confus. On se promène dans le temps et d’une idée à l’autre sans créer de lien. Pour quelqu’un qui ne connait pas Nelly Arcan, ça devient dur à suivre. Et pour celui qui la connaissait bien, on se questionne à savoir si la réalisatrice voulait réellement faire un film sur Nelly ou pas. Dans ce cas-ci, on aurait probablement gagné à faire un montage plus chronologique.

Nelly arrivant à une fête
Nelly arrivant à une fête

Mais qui était Nelly Arcan? Si on se fie au film d’Anne Émond, juste une pute qui a réussi à publier un bon roman. C’est dommage, car elle était tellement plus que ça. Je cherche à comprendre les choix de la production. Lorsqu’on regarde le film, on a l’impression que Nelly Arcan a été escorte jusqu’à sa mort. Ce qui n’est pas le cas. Parlant de sa mort… Les tentatives de suicide de l’auteure ne sont pas très claires. On comprend qu’elle a tenté de se suicider 2 fois avant de réussir. Mais quand et où, ça, ce n’est vraiment pas clair. D’ailleurs, on a du mal à comprendre pourquoi. La détresse dont souffrait cette femme n’est pas évidente dans le film. Peut-être parce que la seule chose qu’on voit, ici, est sa vie de « putasserie ».

D’autres facettes que je considère importantes sont aussi laissées de côté dans le long métrage d’Émond. Par exemple, on ne montre aucunement qu’elle était une intellectuelle. Eh oui, elle avait plus qu’un beau cul et de jolis yeux. Mais surtout, on ne parle pas de sa relation destructive avec l’image. L’image corporelle. Pourtant, la grande épreuve de sa vie venait de son incapacité à accepter de vieillir. C’est au centre de son œuvre, de sa vie et de sa mort. Pourquoi n’en parle-t-on pas dans ce film? C’est tout juste si on voit le personnage du film rencontrer un plasticien. Pour moi, la chirurgie esthétique aurait dû faire partie de Nelly.

Je terminerai avec deux autres détails qui m’ont légèrement

Nelly Arcan
La vraie Nelly Arcan

dérangé. On parle de Putain, on aborde Folle, mais on arrête là. À croire qu’elle n’a publié que 2 romans. Et finalement, je me questionne sur le choix de l’actrice principale. Et comprenez-moi bien. Je ne questionne pas le talent de l’actrice, ni même sa performance dans le film. Mais un des attraits principaux de Nelly Arcan était son visage. Elle avait un visage innocent. Ce que n’a pas Mylène MacKay. Mais je concède que ce dernier point n’est peut-être pas critique.

Donc, plutôt que d’aller voir Nelly, je vous suggère de plonger dans l’œuvre de l’auteure et, peut-être, de lire une des biographies la concernant.

Note : 5.5/10

1 réflexion sur “Nelly – Putain”

  1. Entièrement d’accord, je n’ai pas regardé jusqu’à la fin tellement j’ai étédéçu par l’irressemblance à la vraie Nelly Arcan. J’ai lu d’elle Putain, Folle, A ciel ouvert, Burqa de chair et Paradis clef en main. Je pense qu’il y en a encore… Je n’ai pas encore lu de biographie de l’auteure. Si vous voulez me conseillez, n’hésitez pas.
    Cordialement, Jean-Philippe.

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