« Il avait suffi de 8 mètres pour me briser les côtes, les vertèbres, le crâne… »
Un soir d’ivresse, Pierre, écrivain explorateur, fait une chute de plusieurs étages. Cet accident le plonge dans un coma profond. Sur son lit d’hôpital, revenu à la vie, il se fait la promesse de traverser la France à pied du Mercantour au Cotentin. Un voyage unique et hors de temps à la rencontre de l’hyper-ruralité, de la beauté de la France et de la renaissance de soi.
Denis Imbert a pris le défi de rendre intéressant un récit vécu de Sylvain Tesson, un écrivain voyageur qui avait fait une chute de 8 mètres alors qu’il était en état d’ébriété. Un film unidirectionnel d’un homme qui marche.
Le réalisateur a choisi Jean Dujardin pour incarner Sylvain Tesson. Là aussi, il avait un énorme défi à relever. Jean Dujardin c’est Un gars, une fille en France, c’est Brice de Nice, c’est OSS 117 sans oublier The Artist pour lequel Dujardin a remporté un Oscar. L’acteur devait devenir ce pauvre type qui se retrouve entre la vie et la mort et qui se décide de se lancer dans un sacrifice presque inhumain, celui de marcher plus de mille kilomètres.
En soi, c’est un sujet formidable, idée géniale à mettre en film. Mais il fallait trouver la façon d’éviter le documentaire et d’intéresser le spectateur durant tout le film. Imbert a réussi. Il a su insérer plein de flashbacks au déroulement continu de ce « Trail movie » qui nous font comprendre petit à petit pourquoi et comment Pierre en est arrivé là.
On peut qualifier ce film de souffrant. Un médecin lui dit : « Ce que vous faites dans votre état, c’est de la folie! » Parce qu’il faut savoir que Pierre n’est pas totalement remis de ses blessures dues à sa chute. Souffrant, aussi, parce qu’il subira des épreuves comme de débouler une pente, la pluie, le froid, le feu qui se mettent de la partie pour le décourager, mais… il tiendra bon jusqu’à la fin.
Le film de Denis Imbert ne tombe pas dans la catégorie des films de héros. Pierre a énormément de mérite d’accomplir la mission qu’il s’est donnée, mais il le fait pour lui-même. Il ne deviendra le héros de personne. On illustre sa détermination au début lorsqu’il rencontre une bergère qui aimerait bien le séduire, mais Pierre continue son chemin, choisissant le travail plutôt que le plaisir. De plus, Pierre fume beaucoup, ce qui nous le rend moins sympathique et les flashbacks nous confirment un être assez singulièrement tourné vers lui-même.
Ce que l’on retient de Sur les chemins noirs, c’est le voyage solitaire comme les pèlerins de Compostelle le font, ayant quelque chose à expier pour certains ou pour marquer un avant et un après dans leur vie pour d’autres. Pour le spectateur, c’est un beau film géographique au cœur de la France le plus souvent inhabitée, c’est un voyage intérieur.
Le film aurait pu s’appeler « Voyage au bout de la nuit » ou « Je voudrais voir la mer ». Un chemin pour se faire mal? Je dirais plutôt un sentier pour revenir vers soi.
Bande-annonce
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