André Montpetit dit « Arthur » est passé comme une étoile filante dans le paysage artistique québécois. Dessinateur hors pair à l’imagination débordante, il enflamme à la fin des années 1960 l’univers de l’affiche et de la bande dessinée avant de disparaître complètement. Si le mythe « Arthur » est bien vivant aujourd’hui, un mystère complet entoure le destin d’André Montpetit, l’homme. Est-il toujours vivant? Dessine-t-il encore?
Le long métrage documentaire Sur les traces d’Arthur de Saël Lacroix présente la vie et l’œuvre du dessinateur et bédéiste québécois André Montpetit. Le film prend l’affiche le 21 octobre. À la Cinémathèque québécoise, jusqu’à la fin du mois d’octobre, seront exposées quelques pièces de Montpetit : sérigraphies, affiches, dessins et bandes dessinées.
Certains d’entre vous se demandent peut-être qui est cet homme? Il est même fort probable que vous ne le connaissiez pas, et c’est somme toute normal. Arthur s’est lui-même effacé du milieu artistique. Plusieurs de ses amis – des gens du milieu artistique québécois, dont le graveur Richard Lacroix, le caricaturiste Serge Chapleau, les cinéastes Dorothy Todd Hénaut et André Gladu, le producteur Nardo Castillo – témoignent dans ce film du talent d’Arthur, de son incroyable coup de crayon et de son entêtement. Ce dernier incarne bien le stéréotype de l’artiste tourmenté, et c’est dit ici sans aucun préjugé.
Le documentaire est ainsi rythmé par ces témoignages, de même que par des séquences animées, des films datant des années 1960, plusieurs photographies et des œuvres de Montpetit. Lacroix ajoute certains effets 3D à des planches de l’artiste, qui rendent les dessins bien vivants.
Plus ça change, plus c’est la même chose. C’est là une idée qui ressort de ce film du point de vue sociétal. Plusieurs dessins de Montpetit dénonçaient à leur manière certaines inégalités, représentant l’époque dans laquelle il vivait. Une image comme « Which side has power? » : « C’est le 1 % contre les 99 %, c’est les indignés. Ce ne pourrait pas être plus actuel », commentait Dorothy Todd Hénault. On voit ainsi un puissant et ses deux acolytes contre le reste de la population, parmi laquelle Arthur montre toute la diversité.
Arthur aimait provoqué par ses dessins, ses affiches. Et il réussissait bien, comme en témoigne Nardo Castillo : « Arthur, c’est un gars qui dérange. C’est un électron libre. C’est emmerdant un électron libre, ça peut foutre le bordel. Ça peut déclencher une bombe atomique si c’est à la mauvaise place. »
Ces dessins de type bédé sont le plus souvent très colorés, caricaturaux. Il avait tout le talent pour réussir, pour contribuer à révolutionner le monde de la bédé, mais ce n’était pas son ambition. Il aimait dessiner, il dessinait tout le temps, pour lui-même. Contrairement aux artistes qui recherchent la gloire et la reconnaissance, Arthur semblait rechercher l’oubli et l’anonymat. On lui avait même proposé de faire des films d’animation pour l’ONF, mais l’horaire à respecter et la laideur des lieux l’en ont découragé. C’est dire comme il en fallait peu.
Sur les traces d’Arthur offre l’opportunité de découvrir un artiste visuel de talent, son univers coloré et affirmé, son importance dans le paysage culturel québécois des années 1960-1970 tout particulièrement, et peut-être de mieux comprendre sa disparition.
Note : 7,5/10
Pour voir quelques-uns des dessins d’Arthur, visitez La guilde graphique.
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