« Le temps n’est plus au secret. »
Février 1974. Parce qu’elle se retrouve enceinte accidentellement, Annie, ouvrière et mère de deux enfants, rencontre le MLAC – Mouvement pour la Liberté de l’Avortement et de la Contraception qui pratique les avortements illégaux aux yeux de tous. Accueillie par ce mouvement unique, fondé sur l’aide concrète aux femmes et le partage des savoirs, elle va trouver dans la bataille pour l’adoption de la loi sur l’avortement un nouveau sens à sa vie.
Avec ce film, Blandine Lenoir souhaite mettre en lumière l’histoire du MLAC, association créée en avril 1973 afin de légaliser l’interruption volontaire de grossesse (IVG) en France. Elle regroupait des militants du Planning familial, du Mouvement de libération des femmes et du Groupe information santé.
Lors de la première séquence du film, nous apercevons Annie au travail, dans une usine de matelas. Nous sommes en 1974, le MLAC n’a alors pas encore un an d’ancienneté. L’héroïne se rend ensuite dans une librairie, où se rassemblent les membres de ce groupe avec qui elle va faire connaissance. D’autres femmes découvrant le mouvement sont également présentes et la « méthode de Karman » est vite expliquée. En effet, Annie est là avec un objectif précis : se faire avorter suite à une grossesse non désirée.
En quoi consiste cette méthode ? Elle doit son nom à Harvey Karman, psychologue et militant pour la liberté de l’avortement en Californie depuis les années 1950. Elle était pratiquée entre cinq et huit semaines de grossesse et la lutte pour l’avortement a été facilitée avec l’apparition de cette « méthode d’avortement par aspiration ». En effet, elle a été utilisée durant cette période du fait de la simplicité de sa technique et, car elle ne nécessitait pas d’anesthésie.
La réalisatrice fait par ailleurs un clin d’œil à Delphine Seyrig, qui apparaît au cours du film dans une émission télévisée. Cette actrice était très engagée au sein du mouvement féministe à partir de la fin des années 60 et a participé au Manifeste des 343, pour défendre la liberté d’avorter. C’est chez elle, place des Vosges, qu’a eu lieu en 1972 la première démonstration en France de la « méthode Karman ».
Ainsi, la vie d’Annie va se trouver bouleversée suite à son avortement, avec la découverte de ce nouvel univers : celui du MLAC, fondé par des médecins militant.es et des féministes, en réaction aux nombreux décès provoqués par des avortements clandestins.
Annie va progressivement prendre conscience de ce qu’elle peut apporter aux autres, au-delà de sa vie familiale et de son travail répétitif et peu valorisant. La place des femmes à cette époque était discutée au sein de mouvements féministes, et l’héroïne va se rapprocher de certains de ces combats. C’est également durant cette période que la prise de la pilule va commencer à faire son effet, afin de favoriser la liberté de contraception des femmes et leur droit à la liberté.
Le film suit la trajectoire d’Annie à la suite de son avortement, son implication au sein du MLAC ainsi que les quelques répercussions familiales.
Suite à un événement tragique, elle va décider de s’impliquer presque quotidiennement au sein du groupe, développer de solides amitiés et réviser son objectif de vie : si sa fille comprend son action, les relations avec son conjoint en pâtissent. Mère de deux enfants, elle souhaite s’éloigner du schéma familial classique qui était encore prépondérant à cette époque.
Ce film est avant tout un descriptif historique et sociologique d’une certaine période, fondamentale pour les mouvements féministes. En effet, face à l’ampleur d’un tel mouvement, le gouvernement a fait voter la loi pour la légalisation de l’avortement en 1975. Simone Veil, alors ministre de la santé, a mené un combat fondamental pour les droits des femmes.
Cependant, la mise en scène reste très classique et les réactions des protagonistes sont attendus et sans surprises. Je conseille ce film pour la mise en lumière de cette période de l’histoire sociale et médicale en France, avant tout pour la qualité apportée aux détails du quotidien à cette époque, ainsi que pour le jeu de l’actrice principale, Laure Calamy.
Bande-annonce
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