Après douze ans d’absence, un écrivain retourne dans son village natal pour annoncer à sa famille sa mort prochaine. Ce sont les retrouvailles avec le cercle familial où l’on se dit l’amour que l’on se porte à travers les éternelles querelles, et où l’on dit malgré nous les rancœurs qui parlent au nom du doute et de la solitude.
Grand Prix du Festival de Cannes 2016, de même que récipiendaire du Prix œcuménique, Juste la fin du monde de Xavier Dolan sort au Québec et en France le 21 septembre. Il s’agit d’une adaptation de la pièce de théâtre éponyme de Jean-Luc Lagarce.
C’est Anne Dorval qui lui a d’abord parlé de cette pièce, il y a 5 ou 6 ans. Mais le texte ne l’avait pas enchanté sur le coup : « Pour être honnête, je ressentis à l’inverse [du coup de foudre] une sorte de désintérêt, et peut-être même d’aversion pour la langue. J’avais à l’égard de l’histoire et des personnages un blocage intellectuel qui m’empêchait d’aimer la pièce tant vantée par mon amie. » Ce n’est qu’après avoir terminé Mommy qu’il a relu la pièce et son sentiment était tout autre qu’à la première lecture : « Je sus vers la page 6 qu’il s’agirait de mon prochain film. Mon premier en tant qu’homme. Je comprenais enfin les mots, les émotions, les silences, les hésitations, la nervosité, les imperfections troublantes des personnages de Jean-Luc Lagarce », expliquait ainsi le réalisateur.
Dolan a réussit un tour de force, je crois. Il a su rendre vivante au cinéma une langue très théâtrale. Il faut dire que ses personnages semblent en constante représentation. Leur excentricité ou leurs maladresses et la façon dont les personnages sont joués font en sorte que ça passe bien. C’est le portrait d’une famille assez folle, et l’on sent que tout est sur le point de sauter. Bien que tous ensemble, ils sont seuls, démunis, blessés.
Je dois avouer que je n’ai pas compris que Juste la fin du monde ait été hué à sa première à Cannes. Il est certes différent des autres films de Dolan, mais il a une esthétique absolument magnifique. Dolan filme ses personnages en gros plans, constamment. Il y a même peu de plans d’ensemble. Il scrute les visages, nous livre avec force l’émotion des personnages. On se sent un peu voyeur. Il faut dire que les acteurs sont superbes : Nathalie Baye, Vincent Cassel, Marion Cotillard, Léa Seydoux et Gaspard Ulliel.
Presque un huis clos, on étouffe avec le protagoniste, qui voudrait trouver la force de dire ce qu’il est venu annoncer, dans cette atmosphère enfumée. Le début du film est très proche du rêve. Et lorsque les deux frères se promènent en voiture, les paysages sont légèrement flous. Ce qui importe c’est leur conversation (si l’on peut dire), leur gestuelle. Le reste ne compte pas.
Venez passer un dimanche imprévisible, prendre un déjeuner en famille avec des gens un peu relou.
Note : 9/10
Connaissez-vous les autres films de Dolan? Voici nos critiques de deux autres de ses films : Mommy et Tom à la ferme.
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