Avec l’aide d’un passeur, deux hommes, deux femmes et deux enfants ont réussi à se glisser dans un conteneur dans la cale d’un cargo en direction du Canada. Ces immigrants clandestins ne se connaissent pas encore et se retrouvent coincés dans 25 mètres carrés. Leur sort sera pour le moins incertain.
Dimanche dernier, dans le cadre du festival Éléphant ClassiQ, était présenté en première mondiale la copie restaurée du long métrage Clandestins (1997) du réalisateur québécois Denis Chouinard et du réalisateur suisse Nicolas Wadimoff. Bien que le film ait plus de 15 ans, il est aujourd’hui d’une troublante et triste actualité.
Avant la projection, François Audet, professeur à l’École des Sciences de la Gestion (ESG) de l’UQAM et directeur scientifique de l’Observatoire canadien sur les crises et l’aide humanitaire (OCCAH), est venu nous présenter ce film qu’il qualifie « d’intemporel » tant par le sujet qu’il aborde que par ce qu’il représente. Le film pourrait porter tant sur les Hongrois de la Seconde Guerre mondiale que sur les Syriens de 2015, en présentant ainsi la dure réalité des réfugiés clandestins.
Nicolas Wadimoff s’est ensuite joint à la discussion. Les réalisateurs avaient commencé à travailler sur le scénario de leur film en 1992 et ils ont fait des recherches pendant trois ans. Cela faisait un peu plus de dix ans aussi qu’il y avait eu la vague des Boat people, ces Vietnamiens qui arrivaient par centaine au Canada. Mais au début des années 1990, il y avait peu de vagues de migrants, du moins pas aussi importantes que celles que l’on connaît cette année. Avec l’arrivée attendue de près de 25 000 réfugiés syriens au Canada d’ici la fin de l’année, on voit ce récit d’un tout autre œil.
Il est troublant de voir ces hommes et ces femmes, même des enfants, s’embarquer dans une aventure qu’ils savent hautement risquée dans l’espoir de trouver une terre d’accueil plus clémente que le lieu qu’ils quittent alors. Avant de partir, ils doivent se débarrasser de leur passé, brûler leurs papiers d’identité afin de ne pouvoir être renvoyés d’où ils viennent. Ils deviennent personne. Ils risquent tout. Sans savoir s’ils arriveront à bon port.
Enfermés dans un espace exigu, ces gens terrifiés et affamés sont poussés dans leurs derniers retranchements. L’angoisse finit par céder la place à la folie. Pourquoi la traversée est-elle si longue? Que se passe-t-il donc hors du conteneur? Seront-ils secourus à temps ou mourront-ils de soif et de faim? Un huis clos qui devient de plus en plus intolérable pour ces clandestins.
Clandestins est un film à voir ou à revoir en ces temps de crise. Un film dur, violent, mais dans lequel on retrouve aussi des valeurs de partage et d’amour.
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