Stéphane a une vie sans encombre. Il a repris le restaurant de son père, a deux fils aujourd’hui adultes, une ex-femme, et tombe amoureux de Soo, une mystérieuse Coréenne de 35 ans qu’il rencontre sur Instagram. Sur un coup de tête, Stéphane décide de lui rendre visite à Séoul. Il va passer ses 10 prochains jours à la chercher. Rempli d’aventures, son parcours lui permet de s’ouvrir à un nouveau monde et de se redécouvrir.
Éric Lartigau (La famille Bélier) a réalisé un film très personnel avec #JeSuisLà, un film qui cherche à toucher le spectateur dans son inconscient.
Stéphane (Alain Chabat) coule une vie sans problème: les affaires roulent bien, il a de la relève, une bonne collaboratrice en Suzanne (Blanche Gardin), son restaurant se porte très bien. Il n’a pas à se plaindre et, d’ailleurs, il ne se plaint de rien. Le portrait est parfaitement établi, le premier tiers du film présente une harmonie enviable, un bonheur tranquille. Le réalisateur dit en entrevue qu’il voulait d’un personnage qui ne soit ni mélancolique, ni morose.
Son bonheur est pimenté par une correspondance Instagram avec Soo, une Coréenne qui lui raconte son pays, les cerisiers en fleurs et lui envoie des photos de ses toiles en échange de commentaires et de clichés du grand chêne de Stéphane. Stéphane envoie de l’argent à Soo pour acheter ses tableaux en vue de redécorer son restaurant. On sent ici le goût de changement du personnage.
En fait, on découvre lentement que Stéphane a besoin d’un « plus » dans sa vie. Même sur un nuage de réussite, il sent le besoin d’aller au-delà de son quotidien. Contrairement à la gestion de son commerce et de sa vie, il ne sait pas ce qui l’attend, il n’a pas le contrôle sur ce qui l’attire mais, tout comme Victor Hugo l’avait écrit sur William Shakespeare, chacun porte en lui son Patmos et est libre d’y aller ou de ne pas y aller. S’il n’y va pas, il reste dans la vie ordinaire, le doute ordinaire et la conscience ordinaire et c’est bien. Pour le repos intérieur, c’est évidemment le mieux. S’il décide plutôt de se rendre sur cette cime, il est pris, les vagues du prodige lui apparaissent… C’est ainsi qu’on pénètre dans l’impénétrable, et c’est ainsi qu’on s’en va dans l’élargissement sans bornes de la condition infinie…
Bien sûr, modestement parlant, chacun va faire ou non ce pas. Stéphane se met en mouvement vers lui-même lorsqu’il prend l’avion pour Séoul. Lors d’une toute petite scène où il surprend Ludo, son fils hétéro, en train d’embrasser un copain, il semble saisir que la vie n’est pas nécessairement limitée à ce que l’on vit.
En se rendant à Séoul, Stéphane a franchi le miroir de son patmos. Et c’est là toute l’essence de ce film.
La deuxième partie du film se déroule dans l’aéroport de Séoul. Un endroit Disneyland où il va passer dix jours en attendant des nouvelles de Soo. Soo ne viendra pas. Il ne va pas la rencontrer, mais il va se rencontrer, lui.
La troisième partie présente Stéphane dans la ville de Séoul, que l’on visite avec grand plaisir. Ses marchés, ses restaurants, son grand parc où le rejoignent ses deux fils qui vont le retrouver transformé, épanoui. Il a finalement rencontré Soo qui a eu la gentillesse de lui expliquer le concept du nunchi, un trait culturel asiatique qui fait appel à l’intelligence émotionnelle… Il devrait comprendre et nous aussi. Mais on retrouve ici la principale faiblesse de ce film.
On est en présence d’un excellent scénario moderne, libre et profond. La réalisation ne nous amène pourtant pas aussi loin que souhaité. Le film nous laisse nous questionner sur Soo, les tableaux qu’elle n’a jamais peints, les dix jours et nuits à l’aéroport qui nous rappellent évidemment The Terminal avec Tom Hanks, mais qui nous permettent toutefois d’assister à un festival Alain Chabat, touchant et sympathique.
Donc, un film pas totalement réussi, mais qui illustre néanmoins la capacité des humains à se dépasser, même lorsque leur vie semble réussie. Franchir le pas pour se sortir de l’ordinaire…
Blanche Gardin a une belle présence malgré un accent un peu agaçant, du moins pour le Québécois que je suis.
Une scène où on dépoussière des animaux empaillés qui meublaient les murs du restaurant nous rappellent notre vie qu’il faut dépoussiérer à un moment donné.
En bref, Stéphane part d’un lien virtuel avec Soo, qu’évoque le hashtag du titre #JeSuisLà, pour aboutir dans sa vie avec une telle présence et arriver à dire « Je suis là »…
À voir pour les amateurs (nombreux) d’Alain Chabat.
Note: 8/10
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