En janvier, le genre du court métrage est célébré par le festival Plein(s) Écran(s), un festival québécois qui se déroule entièrement sur Facebook. Voici une critique de quelques films de fiction présentés à l’occasion, toutes des productions locales.
Dans une mégalopole à l’architecture dépareillée, nous suivons le réveil de trois de ses habitants. C’est à travers ce moment de solitude que nous découvrons les plaisirs simples des sens qui s’éveillent.
Quels sont les gestes du quotidien qui rapprochent les habitants anonymes d’une mégalopole les uns des autres? Telle est la question soulevée dans le film animé À l’aube, réalisé par Anaë Bilodeau et Louis-Pierre Cossette. Que ce soit la jeune femme ou le sans-abri, les deux apprécient leur premier café le matin, peu importe comment il est fabriqué.
Sans paroles, mais uniquement par la force des images teintées de couleurs foncées et douces – celles qu’on rencontre à cette heure du jour –, les réalisateurs ont créé un court métrage poétique qui se comprend comme une invitation au recueillement réflexif, un moment d’arrêt dans le rush du quotidien, souhaitable aussi à l’aube de cette nouvelle année 2020.
Une troupe d’aérobie s’entraîne pour une compétition qui leur permettrait de sauver un refuge canin. Mais un malheureux incident poussera la leader Sandra à prendre sous son aile un bel étranger, qu’elle devra entraîner en une seule nuit.
De la retenue et la candeur dans À l’aube on passe à son contraire : filmés avec de vrais acteurs, A Night of Sweats de Rémi Fréchette suit une troupe d’aérobie dont le défi de la porte-parole consiste à apprendre une chorégraphie super érotique au danseur venu remplacer un collègue blessé au pied, et ceci en une nuit, car la compétition se déroulera le lendemain… L’objectif : sauver un refuge canin.
Britney Spears rencontre les Backstreet Boys, la belle Barbie, le beau Ken, Jennifer Grey Patrick Swayze dans Dirty Dancing. Si A Night of Sweats est conçu comme une parodie du dernier film ou de ses semblables, j’accepte endurer ces 8 minutes de trash intellectuel, même si – à vrai dire – je ne comprendrais pas son sens de toute manière.
Mai 2017. Alors que le nouveau Président des États-Unis est installé depuis peu à la Maison Blanche, la ville de Pont Breaux, en Louisiane, est le théâtre du festival de l’écrevisse. C’est un jour comme les autres, en Amérique.
Si le genre de films trash comme A Night of Sweats me déplaira toujours en raison de sa forme, le genre de films comme Acadiana le fera de par son contenu. Les deux recevront le même commentaire parmi les miens : « Ça viendra forcément des États-Unis. »
À la différence d’A Night of Sweats, Acadiana de Guillaume Fournier, Samuel Matteau et Yannick Nolin, qui montre une journée ordinaire au festival de l’écrevisse à Pont Breaux en Louisiane –grandes roues, cours de danse, concours de bouffe sous les yeux de Madame et Monsieur L’Écrevisse–, offre une approche expérimentale, techniquement plus intéressante. Sans dialogue, Acadiana observe l’agitation comme s’il s’agissait d’un film documentaire. Toutefois, la musique tantôt rêveuse, tantôt menaçante et les images d’enfants et d’adultes à l’air abattu et somnambulique supposent bel et bien la présence d’un commentaire caché sur la société américaine actuelle.
Fred et Julie, deux jeunes artistes, romantiques et rêveurs sont amoureux fous l’un de l’autre. Ils fileraient le parfait bonheur si leur situation financière n’était pas aussi désespérée, et si Julie ne venait pas d’apprendre qu’elle est enceinte. À bout de ressources, mais pas à court d’idées, le couple décide de se trouver un mari.
Parmi les quatre courts métrages, Le Pigeon de William Mazzoleni est le seul que je classifierais sans hésitation comme film de fiction. Si les autres entrent dans le vif du sujet dès le début et affichent un caractère plutôt expérimental, Le Pigeon offre une narration classique au développement habituel intelligible : une première partie pendant laquelle la caméra se rapproche de la scène principale, une villa de luxe à Montréal, et une voix off situant la scène en introduisant les protagonistes et le conflit dramaturgique. Ensuite suivent, intitulés d‘après les noms des personnages, les différents chapitres du film. L’intrigue en bref : deux jeunes artistes, Julie et Fred, passionnément amoureux l’un de l’autre, mais désespérément en manque d’argent, d’autant plus lorsqu’ils sont confrontés à une grossesse inattendue, s’accrochent à un multimillionnaire du même âge : le « pigeon » ayant inséré une petite annonce pour trouver une partenaire…
Divertissant, impeccable au niveau du jeu des acteurs et de la structure du film, Le Pigeon est à recommander sans restriction.
Quel est le point commun de ces quatre starters de fiction du festival Plein(s) Écran(s) dont la réalisation respective est pourtant si différente?
Je dirais que c’est la joie de vivre. Et quel autre message mieux approprié pour débuter la nouvelle année?
© 2023 Le petit septième